Nous vous avons sondés
Voici les 1001 solutions des lecteurs de Blick pour contrer les 39% de Trump

Un millier d'idées de lecteurs de Blick pour sauver la Suisse: nous avons compilé vos solutions réfléchies, ou folles, pour répondre aux taxes punitives de Donald Trump. Parmi elles: renoncer aux F35, désinvestir la retraite des Suisses ou rétablir le secret bancaire.
Publié: 06:10 heures
Partager
Écouter
Les lecteurs de Blick déroulent des stratégies d'ingénierie douanière ou de rétorsions audacieuses par le menu détail.
Chroniques Teaser (2).png
Myret ZakiJournaliste Blick

Si vous étiez conseiller(ère) fédéral(e), que feriez-vous? Vous avez été très nombreux à répondre à notre appel à solutions, en vue de sauver la Suisse des 39% de droits de douane américains. Près de 1000 propositions nous sont parvenues, souvent détaillées, véritables ébauches d’accord commercial, parfois! Nous les avons toutes parcourues et vous en remercions.

Dans leur grande majorité, les lecteurs se montrent combatifs. Ils veulent voir une Suisse souveraine, qui contrôle sa destinée commerciale. Mesures de loin les plus citées: l’annulation du contrat des avions F35, et le retrait des fonds AVS placés sur le marché américain. Le sentiment de se faire avoir par Donald Trump domine. Les lecteurs veulent un Conseil fédéral qui défende mieux les intérêts nationaux, et prônent en majorité l’idée d’une taxe réciproque de 39% contre les Etats-Unis, en plus de se tourner vers d’autres débouchés. D’autres, plus portés au compromis, seraient prêts à… acheter deux fois plus de F35. Voici les 5 mesures que vous avez les plus souvent évoquées.

1

Prendre des mesures de rétorsion

Renoncer aux F35 américains revient très souvent. En général, peu de commentateurs proposent d’adhérer à l’UE, mais ils préconisent d’acheter le matériel militaire en Europe. Pour certains, cela ferait sens de «parler aux Français pour avoir une offre tangible pour des Rafale qui tiennent la route».

Former une alliance commerciale avec d’autres pays pour être plus forts contre Trump: les lecteurs sont nombreux à vouloir «construire un front commun avec d’autres économies visées par les surtaxes américaines». Le prix Nobel Joseph Stiglitz l’a aussi évoqué dans la «NZZ» le 7 septembre.

Appliquer des taxes de 39% réciproques contre les USA: les ¾ de nos lecteurs en parlent. «Chaque Suisse consomme 10 fois plus de biens américains qu’un Américain consomme de biens suisses. Il n’y a aucune raison de surtaxer la Suisse», dit l’un d’eux.

Taxer à 39% l’or exporté vers les Etats-Unis: vous êtes nombreux à l’évoquer. C’est aussi la «solution Hayek», proposée à Blick par le patron de Swatch Group le 13 août. Cela ferait monter les prix de l’or (actuellement exempté par Trump) sur le marché américain. Toutefois, ce ne serait pas sans conséquences: les raffineurs et négociants suisses perdraient en compétitivité, et les États-Unis pourraient toujours se fournir ailleurs (à Londres ou Dubaï, notamment).

Interdire la vente de médicaments vitaux par les pharmas suisses sur le marché américain: cela fait partie des rétorsions envisagées. Plus radical: provoquer le chômage aux USA en fermant les usines pharmas helvétiques, qui y emploient plus de 30'000 personnes. C’est toutefois mal connaître la politique suisse: les autorités n’ont jamais eu une telle emprise sur les entreprises. En réalité, les géants de la pharma suisse ont déjà décidé de délocaliser massivement leur production outre-Atlantique.

Cesser d’investir aux Etats-Unis: l’arme financière est souvent évoquée. La BNS détient en effet plus de 300 milliards de dollars en bons du Trésor américain, mais aussi des dizaines de milliards en actions. Le fonds de l’AVS investit également en titres américains. Beaucoup plaident pour rapatrier ces fonds. En général, l’idée de retirer tout l'argent des retraites qui se trouve aux Etats-Unis s’avère populaire chez nos lecteurs.

Porter plainte auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) contre les surtaxes américaines, comme l’ont fait la Chine, le Canada et le Brésil: les internautes défendent l’idée, tout en étant conscients que la procédure est longue et incertaine.

Imposer des visas pour les Américains en voyage de tourisme ou s'affaires en Suisse est aussi évoqué. Là, il faut rappeler que le secteur du tourisme suisse est très dépendant des touristes américains, qui deviennent notre marché numéro un.

Baisser le franc suisse en fixant le taux de change USD / CHF à 1-1,2, ce qui annulerait les effets des droits de douane: «La Suisse est déjà régulièrement accusée par les USA de manipuler sa devise, dit un commentaire. Elle n’a donc pas grand-chose à perdre. Le désavantage est que cela ferait monter l'inflation en Suisse.»

2

Diversifier nos marchés

Diversifier les partenariats commerciaux et ne pas se limiter à l’Union européenne et aux Etats-Unis: cette idée fait l’unanimité. «Booster les exportations vers l’Asie-Pacifique (Thaïlande, Vietnam, Chine, Inde), là où la croissance est forte et les droits de douane moins élevés», dit un avis. «Rejoindre les BRICS», disent de nombreux autres. «Renforcer la coopération avec l’Organisation de coopération de Shanghai», lit-on également. Idée annexe: «Je créerais des subventions pour permettre aux entreprises suisses de proposer des prix d'appel aux partenaires émergents.»

3

Renforcer notre souveraineté

Sur ce volet, les propositions ont afflué. A commencer par «rétablir la neutralité suisse», et «rétablir le secret bancaire suisse». Mais aussi: «reconstituer nos réserves d’or». Si Donald Trump applique la devise America First, nos lecteurs ont plaidé pour Switzerland First afin de répondre au nationalisme par le nationalisme. Cela passe aussi par l’idée de mieux «appliquer la préférence nationale».

Le soutien aux entreprises est au cœur des préoccupations: on plaide pour des «aides à l’innovation», et pour le «chômage partiel si besoin – priorité aux PME qui subissent le choc».

Face au risque de voir les pharmas suisses tomber en mains américaines, d’aucuns plaident pour «protéger ce secteur de toute vente ou contrôle étranger ainsi que d’autres industries stratégiques».

Pour plus d’autonomie monétaire, «développer un système de paiement instantané basé sur la blockchain, et indépendant du dollar et des lois américaines» fait partie des propositions.

Incontournable aussi est l’idée d’«investir massivement en R&D et formation pour rester compétitifs mondialement et garder notre avance technologique.»

4

Négocier des exemptions

Des négociations ciblées avec les USA passionnent aussi nos lecteurs. Comme l’idée de «négociations sectorielles (horlogerie, pharma, machines)». Par secteur, il serait plus facile d’obtenir de telles dispenses des 39%, par exemple dans le domaine pharma et medtech, ou machines de précision et montres. Il faurait, préconisent des commentaires, «se greffer aux précédents cas d’exemptions obtenus». Comme la dispense pour l’or suisse, ou l’aérospatiale britannique. Les exemptions ont plus de chances «là où l’impact sur l’économie américaine est négatif, et affecte les emplois chez les importateurs/distributeurs, et provoque des hausses de prix pour les consommateurs américains». L’or suisse est d’ailleurs dispensé des 39% grâce à la pression des marchés américains, constatent nos lecteurs.

Tuyau d’un internaute: «Faire porter la demande d’exemption par ces acteurs américains qui souffrent du 39%» (détaillants de montres, importateurs, associations de consommateurs, chambres de commerce locales).

Dans le même ordre d’idées, d’aucuns préconisent d’y aller Etat par Etat, en documentant les emplois liés aux filiales suisses (pharma, chimie, agro, instruments) et en mobilisant les gouverneurs/députés des Etats concernés pour qu’ils poussent les exemptions.

En parallèle, l’idée est aussi, en Suisse, de «faire pression sur l'industrie pharma pour qu'elle réduise ses marges aux Etats-Unis.» 

Nos lecteurs parlent aussi d’«ingénierie douanière»: ou l’art de changer l’origine par des reconfigurations industrielles. Bref, il s’agirait de travailler avec les exportateurs suisses pour faire des reclassements tarifaires avantageux, la dernière transformation substantielle hors de Suisse pouvant faire baisser le taux final sous les 39%. 

Contourner les taxes, à cet égard, peut se faire «en passant par le Canada pour transformer ou emballer le chocolat, dit cette lectrice, ou par le Mexique pour y implanter les usines de capsules de café, ou par une rue aux Bahamas dédiée aux marques horlogères suisses.»

En revanche, aux nombreux internautes qui suggèrent l'idée de contourner les 39% en passant par le Liechtenstein, nous répondons que c'est une fausse bonne idée, qui serait rapidement repérée par les douaniers américains. 

En attendant, des lecteurs veulent de Berne des «mesures d'aides ciblées (temporaires) pour les secteurs très exposés (montres, machines spéciales)», à travers un «soutien en liquidités, en assurance-crédit renforcée, en aide à la réorientation vers l’UE/Asie tant que la négociation n’a pas abouti.» 

5

Booster notre marketing

Des idées marketing, parfois un peu folkloriques, ont fleuri sur les fils de commentaires. Comme «Offrir à la famille Trump un chalet à Verbier ou Zermatt».

Un autre commentaire enverrait «à Mme Trump un panier de bons fromages, de biens de consommation suisses, même un Victorinox, des bouteilles de vin, dont une de Chamoson... et pourquoi pas un repas raclette. Le tout, dans les jardins de la Maison Blanche avec cor des Alpes, un peu de neige, et de l'absinthe ou une bonne Williamine de Martigny...»

Autre idée: «Inviter Trump à une partie de Golfe à Crans-Montana, le laisser gagner et lui expliquer ce que la suisse peut apporter à l’Amérique.»

Pour nos horlogers, fromagers et notre industrie des machines, «le Secrétariat à l'économie pourrait faire appel à des youtubeurs et influenceurs qui diffuseraient leurs produits et les feraient connaître dans le monde, sous un hashtag de type Switzerland Has Great Products». 

Quelques perles finales

En bonus, certains imaginent de «racheter le Delaware et en faire le 27ème canton suisse». A moins de… «Menacer les USA de les annexer pour en faire le 24e canton suisse». Ou encore: «Augmenter de 39%... les trous de l’Emmenthal». 

Autre perle, teintée de cynisme: «Présenter des excuses pour avoir voulu négocier au lieu d’écouter les instructions du Président pour la conclusion d’un accord. Demander lesdites instructions et les suivre. Conclure. Puis remercier et féliciter le Président pour l’un des plus grands et beaux accords jamais conclus». 

Mais encore: «Renommer le Léman en Lake of America» et «Rebaptiser le Cervin Trump Mountain». Et pour couronner le tout: «Réserver un lopin de terre dans le canton d'Uri pour faire une nouvelle version de l'île d'Epstein. Avec la promesse qu'on ne dira rien.»

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la
Articles les plus lus
    Articles les plus lus