Décidément, le Parti socialiste (PS) veveysan a de la peine à remonter la pente. Après le scandale éclaboussant l’ex-municipal Lionel Girardin, la formation avait besoin de nouvelles bases solides. Ce n’est visiblement pas pour tout de suite: moins d’une année après avoir été élu à la présidence du parti, Cédric Cramatte a donné son sac, a appris Blick.
En coulisse, on raconte que l’archéologue de formation s’apprêterait à rejoindre les Verts. «Les transfuges sont toujours difficiles à accepter», persiflent certains camarades.
Un proche raconte: «En janvier, les membres du PS Vevey ont reçu un mail de leur président Cédric Cramatte qui annonçait quitter la présidence principalement pour des raisons professionnelles. Mais, lors de l’assemblée générale de jeudi soir convoquée pour renouveler le comité, valider le budget et notamment les comptes, il a expliqué pendant son discours de départ qu’il rejoignait les Verts. Sans gêne. En disant juste que ses convictions vont davantage vers l’environnement.»
Il enchaîne: «Avez-vous déjà vu le président d’une section communale d’une grande ville rejoindre un autre parti? Moi, jamais. Mais ça n’est pas le plus fou. Non seulement personne n’a tiqué ou réagi lors de cette annonce mais en plus les membres présents lui ont offert un cadeau pour le remercier de son engagement. On vit vraiment sur une autre planète à Vevey.»
Un départ sincère?
Contacté par Blick ce vendredi matin, Cédric Cramatte confirme avoir annoncé sa démission et son intention de rejoindre les écologistes. L’archéologue entend les critiques et assure parfaitement comprendre que son départ puisse interpeller. «Ça n’arrive pas tous les jours, concède-t-il. Mais ma démarche est sincère.»
L’homme martèle avoir été transparent avec sa famille politique, dont il est en train de se séparer. «J’avais déjà annoncé en automne que j’allais prochainement lâcher la présidence pour des raisons professionnelles, affirme-t-il. J’ai une thèse à terminer, un changement dans mon cahier des charges et des engagements associatifs. Pour moi, il me semblait juste de passer le flambeau plutôt que de rester en fonction et de ne rien pouvoir faire.»
Sa fibre écologiste s’est aussi accentuée avec le temps, raconte-t-il. «J’ai vécu ma présidence comme un challenge car il fallait mettre fin à la chute du parti après l’affaire Girardin et je pense avoir participé à sa stabilisation, glisse-t-il. Mais, quand on fait de la politique, on pense à ses enfants.»
Il s’explique. «J’ai un ado qui vit en Australie, un pays particulièrement touché par les changements climatiques. C’est devenu mon combat principal au fur et à mesure de mon engagement. Et n’ayant pas été contenté au sein de ma section… J’ai estimé que plus beaucoup de socialistes veveysans n’étaient engagés là-dedans et que je n’aurais donc pas beaucoup de gens avec qui proposer des choses.»
Alors que le parti à la rose vaudois a tendance à s’effriter (-5 sièges au Grand Conseil) et que les écologistes ont le vent en poupe (+4 sièges au Grand Conseil), Cédric Cramatte insiste: son changement de parti n’est pas opportuniste. «C’est uniquement lié à mes convictions et je ne souhaite pas de responsabilités, du moins pas pour l’instant, répète-t-il. Quant au PS de Vevey, il est entre de bonnes mains puisque c’est Cédric Bussy qui me succédera.»
«Pas dans une situation de conflit»
Romain Pilloud, président du Parti socialiste de Montreux, confirme l’information. «Je m’en réjouis, Cédric Bussy est une personnalité qui rassemble largement», appuie-t-il. Toutefois, le conseiller communal qui vient d’être élu au Grand Conseil estime que le départ de Cédric Cramatte est un non-sujet. «Nous sommes très proches des Verts au niveau des valeurs, rappelle-t-il. Nous ne sommes pas dans une situation de conflit, l’annonce a été faite correctement. Cédric Cramatte a souhaité se préserver, c’est tout à son honneur.»
Loin de ce discours lénifiant, un cadre socialiste s’inquiète. «Ce départ illustre d’abord le déclin inexorable du PS à Vevey qui est tombé si bas qu’il n’y a personne pour se rendre compte des erreurs de casting, peste-t-il. Avec à peine une dizaine de membres lors des assemblées, un homme qui n’a aucune conviction politique, capable de changer de parti en moins de 12 mois, peut se faire élire à la présidence. Il y a eu d’autres cas avant lui. Quand on débarque au PS sans aucune expérience ni vision à quelques mois des élections, qu’on a jamais eu aucun mandat électif, qu’on est désigné candidat (ndlr: à la présidence) ou élu par acclamation uniquement parce qu’il n’y a pas d’autre candidat ni aucune relève, on se retrouve dans ce genre de situations.»
Un autre poids lourd du parti tempère cette analyse. «Il est irréaliste de penser que la section veveysanne va se relever rapidement de l’affaire Girardin, il faudra au moins une dizaine d’années! Il faut maintenant de la patience, des convictions et de la stabilité. Cédric Bussy, un militant de longue date, est la personne idéale pour commencer à remonter la pente.»