En attendant l'interdiction
Les jouets contiennent des PFAS: voici 6 conseils pour les éviter au maximum

Alors que le Conseil fédéral se dit enclin à suivre l'UE, qui a promis d'interdire les PFAS dans les jouets d'ici à 2030, voici quelques recommandations pour protéger les enfants autant que possible, en attendant les nouvelles réglementations.
Publié: 21:51 heures
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Les PFAS sont présentes dans de nombreux jouets, dont ceux destinés au bain ou encore les anneaux de dentition.
Photo: Unsplash
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

Hélas, la bonne nouvelle est flanquée, de façon presque ironique, d'une mauvaise. Commençons par célébrer le positif: le Conseil fédéral vient d'accueillir favorablement la motion du socialiste Emmanuel Amoos (PS/VS), qui incite la Suisse à imiter l'UE en interdisant les PFAS dans les jouets et autres objets dédiés aux enfants.

Ces nouvelles réglementations ne devraient, en revanche, pas voir le jour avant l'année 2030. L'équivalent d'une éternité pour les parents qui s'inquiètent de l'exposition des plus jeunes à des substances nocives et potentiellement cancérigènes. Pour rappel, comme le déplorait l'eurodéputé Pascal Canfin, d'après Swissinfo, ces fameux «polluants éternels» peuvent se trouver dans des jouets pour le bain, des jeux de plage ou des anneaux de dentition, et pénétrer dans l’organisme des enfants par contact avec la bouche, avec la peau ou par les voies respiratoires. 

En réponse, le Parlement européen s'est penché sur un nouveau règlement, accepté par ses Etats membres, visant à interdire leur utilisation et à réduire drastiquement le nombre de jouets contenant ces substances présents sur le marché. Cet accord a été soumis au vote et largement validé le 25 novembre

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Que faire, en attendant les nouvelles lois?

En attendant la mise en application de ces nouvelles exigences, comment les parents peuvent-ils protéger au maximum leurs enfants? Rappelons en effet que les enfants, dont la capacité à métaboliser les toxines est encore limitée, sont particulièrement vulnérables à ce type de substances. 

S'il est impossible de les éviter complètement, voici quelques recommandations utiles: 

1

Guetter le logo CE

«L’UE dispose de l’un des cadres les plus stricts au monde en matière de sécurité des jouets», souligne le Parlement européen dans un communiqué. Si cela n'empêche pas des produits contenant des substances nocives d'atterrir dans nos foyers, on peut au moins se fier aux exigences européennes en la matière. A défaut de constituer un bouclier total, c'est mieux que rien: 

«Le logo CE garantit le respect de certains critères minimum de sécurité, rappelle le Dr. Florian Breider, chef d’unité au laboratoire central de l’environnement de l’EPFL. Mais tant que l’utilisation de ces substances ne sera pas clairement réglementée ou interdite, les producteurs seront libres de faire ce qu’ils veulent.»

En effet, la présence des PFAS dans les jouets s'explique davantage par un manque de restrictions que par une réelle utilité pratique: «Leur présence dans ces objets me semble superflue, observe notre expert. Sans doute que les fabricants préfèrent utiliser les mêmes matériaux pour toute une série de produits, sans de poser la question. Le problème vient souvent d’un manque de connaissances couplé à un manque de volonté, mais le rôle des industries est aussi de se demander si les matériaux sont adaptés à l’utilisation des objets qu’elles produisent.» 

2

Eviter d'acheter des jouets sur des sites chinois

Cela signifie donc que des jouets produits et vendus en dehors de l'UE ne respectent pas les exigences européennes. «Les produits vendus par certains sites chinois tels que Temu peuvent contenir beaucoup de substances toxiques, prévient Florian Breider. Sur ces plateformes, un laxisme important peut être observé au niveau de la qualité de ce qui est vendu.»

Dans un précédent article, Nathalie Chèvre, écotoxicologue à la Faculté des Géosciences et de l’Environnement de l’Université de Lausanne, nous expliquait par ailleurs que certains jouets en plastique vendus sur ce type de plateforme peuvent également contenir trop de phtalates ou de métaux lourds. 

3

Laver ou rincer tous les jouets neufs

Par ailleurs, en déballant un jouet en plastique flambant neuf, Florian Breider conseille de le rincer précautionneusement, avant de le tendre à l'enfant: «Cela permet de retirer une partie de la charge chimique qui peut être ingérée», pointe-t-il.

Car il est presque impossible de calculer la quantité de toxines pouvant être respirées ou ingérées pendant que l'enfant manipule l'objet: «La facilité avec laquelle ces substances peuvent entrer dans l’organisme dépend du type de PFAS utilisé, précise Florian Breider. Et il en existe des milliers! Certains sont volatils, d’autres non… Mais de manière générale, tous les jouets pouvant être mis à la bouche représentent un certain risque, puisque la salive peut mobiliser ces substances. Il est toutefois difficile de définir la proportion de la voie d’exposition: cela mériterait des études, mais ce type de travaux est complexe à mettre en œuvre, surtout avec des enfants.»

4

Choisir des matériaux plus naturels

La simple idée d'éviter au maximum les jouets en plastique peut sembler salvatrice… mais ce n'est malheureusement pas aussi simple. «On peut tenter de privilégier les matériaux plus naturels, comme les textiles ou le bois, admet notre intervenant. Or, il faut quand même rester réaliste: certains objets en bois low cost, contenant des colles ou traités avec des colorants, des vernis ou de la peinture, peuvent aussi s’avérer problématiques.»

Dans l’idéal, Florian Breider conseille de se tourner vers du bois massif avec peu de vernis, mais reconnaît que cela n'est pas toujours possible. Il convient donc de se rendre à l'évidence: il est impossible d'échapper complètement au plastique: «On ne peut enfermer nos enfants dans une bulle et les exposer uniquement au bois naturel et à la laine», regrette l'expert. 

5

Privilégier le label «sans BPA»

Au cœur du rayon jouets, dont la richesse et l'explosion de couleurs est à même d'agresser les sens, notre regard peut également tomber sur des labels «sans BPA», qui diminue automatiquement notre angoisse. Bien que rassurante, l'absence de bisphénol A ne garantit toutefois pas une sécurité totale, sachant que ni la liste d'ingrédients, ni le processus de fabrication, ne sont renseignés au dos des jouets. 

«Il arrive qu’en interdisant une substance, on ouvre la porte à des alternatives pas forcément plus sûres, déplore notre expert. On ne dispose pas de données suffisantes pour établir si l’alternative est plus sûre. Même pour les plastiques, bien qu’on puisse parfois déterminer quel polymère a été utilisé, on ne connait pas les additifs, et la transparence n’est pas près de s’améliorer, de ce côté-là.» Or, par principe, le spécialiste préconise quand même les objets portant une mention «sans BPA», dans la mesure où cela peut au moins suggérer que le fabricant est sensibilisé à ces problématiques. Une fois de plus, c'est mieux que rien! 

6

Rester attentif à l'évolution des législations

Puisque l'Etat semble de plus en plus enclin à lutter efficacement contre l'omniprésence des PFAS, les règlements risquent de changer (on l'espère) de manière concrète, ces prochaines années. Pour cette raison, Florian Breider suggère aux parents de rester attentifs à ces évolutions, afin d'aiguiller et adapter leurs achats aux nouvelles recommandations: 

«Par exemple, si l’on a acquis des jouets pour son premier enfant il y a plusieurs années, il vaut mieux s’interroger quant à la nécessité de le remplacer, selon les réglementations actuelles, avant de le tendre à un autre enfant», propose-t-il. 

Déculpabiliser les parents

Cela dit, la solution miracle n'existe malheureusement pas encore, et rien ne sert de s'auto-flageller si l'on s'est tourné vers des jouets en plastique: «On peut faire de son mieux, prendre des mesures, mais il est impossible de tout faire juste et d’éviter totalement ces substances, tempère notre expert. Les petits enfants sont souvent au sol, mettent tout à la bouche et, sachant que même les poussières peuvent contenir des traces de phtalates et de PFAS, il est impossible de les protéger de tout.» Du côté des enfants plus grands et des adolescents, Florian Breider encourage les parents à les sensibiliser au maximum, en les aidant à réfléchir à leurs modes de consommation.

Et que peut-on attendre de l'avenir, en voyant apparaître les ébauches du changement? Dans un monde idéal, lorsqu’on achète un objet en plastique qui peut être en contact avec la bouche, notre intervenant estime qu'il faudrait pouvoir consulter la liste des substances. «Selon moi, plutôt que d’indiquer ‘sans PFAS’, il faudrait que les industries soient contraintes d’afficher un label ‘avec PFAS’, afin que l’absence de ces substances aille de soi et que leur présence soit obligatoirement notifiée, conclut-il. Cela mettrait bien plus de pression aux fabricants.» On ne peut qu'espérer. 

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