Les indispensables du CV
En savez-vous assez sur l'IA pour décrocher un emploi?

Alors que l'IA s'empare rapidement du marché de l'emploi, deux experts décrivent les aptitudes indispensables qu'il vous faut perfectionner, avant de viser le poste de vos rêves.
Publié: 04.09.2025 à 17:00 heures
Partager
Écouter
Comment devenir «AI fluent», c'est-à-dire suffisamment habile en matière d'IA pour séduire un recruteur? Deux experts nous répondent.
Photo: Shutterstock
Capture d’écran 2024-09-17 à 11.24.33.png
Ellen De MeesterJournaliste Blick

Sa puissance n’a d’égale que son évolution exponentielle: d’abord discrète et d’allure ésotérique, l’intelligence artificielle (IA) a fini par déferler sur la société telle une vague irrépressible. On a beau la craindre ou tenter de la réfuter complètement, rien ne semble pouvoir freiner sa progression.

La preuve: une étude Digimonitor publiée fin août 2025 par l’Institut de recherche des médias publicitaires (REMP) révèle qu’une majorité de Suisses (environ 60%) utilise les outils d’intelligence artificielle au moins «occasionnellement». En 2024, ce taux n’atteignait que 40%, soulignant à quel point la fulgurante fusée de l’IA gagne en rapidité.

En outre, son intégration au marché du travail est tellement spectaculaire que les employeurs s'arrachent désormais des candidats «AI fluent» ou «AI literate»: ces anglicismes, notamment repérés sur le réseau social LinkedIn, désignent l’éventail d’aptitudes en matière d’IA que requièrent de nombreuses offres d’emploi actuelles. Selon le «Washington Post», leur mention a carrément triplé en l'espace d'une année.

Mais que signifie concrètement d’être «fluent» ou «acculturé» en termes d’IA? Si l’expression semble bien abstraite, elle reflète une réalité que tout candidat serait naïf d’ignorer, au moment de peaufiner son CV.

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

L'IA atteint chaque niveau hiérarchique

Si l'ensemble des professions sont concernées, de près ou de loin, notons que certains domaines seront naturellement plus touchés que d'autres. En revanche, aucune strate hiérarchique n'est épargnée. Valérie Isabel, senior consultant au cabinet de recrutement lausannois Finders, confirme que l'IA concerne aussi les managers, qui pourraient à priori engager de jeunes experts pour mener la danse: «D'un point de vue purement stratégique, les cadres ont la mission d'identifier la valeur ajoutée qu'est susceptible d'apporter l’IA, tout en anticipant son évolution, résume notre intervenante. À tous les niveaux, il est donc essentiel d’apprendre à connaître l'outil et ses limites.» 

En ratant le train (ou la fusée) en marche, une entreprise risque de perdre en compétitivité, souligne Blaise Reymondin, spécialiste en marketing numérique au sein du collectif Blaise & Bruno, basé à Pully (VD): «Un employeur soucieux de rester compétitif a tout intérêt à savoir reconnaître un candidat habile avec ces outils, qui peut réunir à lui seul une véritable équipe d’experts virtuels autour de lui. Ce type de compétences peut d'ailleurs compenser partiellement le manque d’expérience d’un jeune candidat.» 

Dans le cas des profils plus séniors, notre expert précise qu'il s'agira de maîtriser suffisamment l’IA pour être capable de poser un regard critique sur les résultats qu’elle fournit: «Car si l'intelligence artificielle a réponse à tout, cela ne signifie pas pour autant qu’elle apporte la bonne solution, ajoute-t-il. Un humain qualifié doit y veiller.» 

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

Comment devenir «AI fluent»?

Bref, personne n'y échappe et tout le monde peut y gagner. Mais comment savoir si nos aptitudes actuelles sont suffisantes, dans un marché du travail en évolution constante? 

Pour nos experts, il ne s'agit pas forcément de décortiquer les arcanes de l'intelligence artificielle ou de se plonger corps et âme dans la totalité de ses innombrables possibilités: la simple ouverture d'esprit peut déjà déverrouiller certaines opportunités. «La clé réside dans la capacité à utiliser intelligemment l'IA, résume Valérie Isabel. On attend d'un jeune candidat de faire preuve d'une pensée critique et structurée, d'une aptitude à vérifier le résultat et de le compléter avec des sources fiables.»

La curiosité et l'enthousiasme deviennent ainsi des qualités inestimables: «Expérimentez! conseille Blaise Raymondin. Avec ChatGPT ou Gemini, chacun peut explorer à son rythme sur des cas personnels ou professionnels. L’évolution des outils est si rapide qu’aucune formation théorique ne peut être à jour, c’est seulement en pratiquant intensément qu’on peut développer – et revendiquer – ces nouvelles compétences.»

Que noter sur un CV ou sur LinkedIn?

Justement, comment revendique-t-on ses connaissances de manière pertinente et précise, lors d'une recherche d'emploi? Notre intervenant encourage tout candidat à mettre en valeur les ressources acquises via l'expérimentation: «Il ne suffit pas de mentionner ChatGPT parmi les outils qu’on utilise à la manière de Word ou PowerPoint, explique-t-il. Le but est de parvenir à démontrer qu’on est animé d’une curiosité, qu’on fait la différence entre les différents modes (réflexion, recherche approfondie, création de visuels), qu’on en fait un vrai usage pratique. Et si l’on souhaite aller plus loin, il existe des outils pouvant vraiment faire la différence sur un CV, dont n8n par exemple, qui permet l’automatisation de processus entiers de l’entreprise.»

À nouveau, nul besoin d'épouser l'ambitieux sillage de SpaceX en visant la lune, lorsqu'on est avide d'apprendre: «En parcourant un profil Linkedin ou un CV, je trouverais intéressant de constater qu’une personne a consacré quelques heures à une formation dédiée au prompting, par exemple, affirme Valérie Isabel. Or, il est probable que, dans un futur proche, ces compétences-là seront devenues tellement normales qu'elles ne mériteront même plus d'être mentionnées: ce type de savoir sera pris pour acquis, comme le sont actuellement le maniement de Word ou Excel.» 

Par où commencer quand on n'y comprend rien?

Si le saut dans l'IA vous semble vertigineux, au moment de rechercher un poste, sachez que les outils sont plus accessibles qu'on pourrait le croire. Il convient simplement... de se lancer! Pour Blaise Raymondin, la transformation occasionnée par l'IA est plus abordable que celle du numérique, qui avait déjà révolutionné le monde du travail il y a une vingtaine d'années: «Contrairement à l’informatique qui demandait de maîtriser des logiciels complexes, l’IA parle notre langue, rappelle-t-il. On dialogue avec elle naturellement, on lui explique notre but, notre contexte. C’est aussi une révolution de l’accessibilité!»

Voilà qui devrait rassurer les âmes anxieuses, encore nombreuses selon nos intervenants: «Il y a actuellement débat entre les spécialistes, car certains relativisent l’impact de l’IA sur l’emploi, conclut Blaise Raymondin. Mais il me semble impossible qu’il n’y en ait aucun, bien qu’il soit difficile d’en prédire l’ampleur ou le moment où cela deviendra significatif.»

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la
Articles les plus lus
    Articles les plus lus