Le ton monte à Copenhague
Au fait, la Suisse cache-t-elle encore des fonds russes?

Plusieurs dirigeants européens se sont interrogés, au sommet de Copenhague, sur l'application des sanctions contre la Russie par la Suisse. Et si la Confédération cachait encore les milliards des oligarques de Poutine?
Publié: 14:21 heures
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Dernière mise à jour: 14:56 heures
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Vladimir Poutine est-il fragilisé par les 18 paquets de sanctions européennes déjà adoptés? Pas si sûr.
Photo: imago/ZUMA Press
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Richard WerlyJournaliste Blick

La Suisse cache-t-elle encore des avoirs russes d’oligarques proches de Vladimir Poutine? Cette question n’a pas été posée, à Copenhague, par un journaliste mal intentionné vis-à-vis de la Confédération. Cette interrogation a été prononcée, lors d’un briefing devant la presse, par l’entourage d’un des dirigeants de l’Union européenne présent au sommet des 27 à Copenhague le 1er octobre.

«Je vais être très bref. La Suisse n’est bien sûr pas membre de l’Union européenne. Elle n’est pas membre de la coalition des pays volontaires pour aider l’Ukraine. Vous savez qu’elle détient des actifs, des actifs russes. Je ne sais pas dans quelle mesure il s’agit d’actifs souverains. Je ne dispose pas de cette information. Je dispose d’une estimation qui m’a été fournie il y a quelques années par l’administration d’un pays allié. C’est tout ce que j’ai. Je ne vais donc pas donner de chiffres et de faits qui ne sont pas vérifiés. Je ne le ferai pas. Nous savons qu’il y a de l’argent russe, mais nous ne connaissons pas la nature de cet argent…»

Cesser d’acheter le pétrole russe

L’évocation quasi publique de ce doute (dans un briefing «off» donc pas attribuable aux participants) est révélatrice de l’énervement de plusieurs pays européens face à deux interrogations centrales, à la veille de l’adoption par l’UE d’un 19e paquet de sanctions économiques et financières contre Moscou. Reste-t-il des trous dans la raquette, qui permettent au régime de Poutine de continuer à se financer?

On sait que Donald Trump a mis les pieds dans le plat, en exigeant que les Européens cessent d’acheter du pétrole et du gaz russe (pour un montant de 214 milliards d’euros depuis le début du conflit en Ukraine, le 24 février 2022) avant de prendre à son tour d’éventuelles sanctions «secondaires» visant les entités qui permettent à Moscou d’exporter ses hydrocarbures. On sait aussi que des pays comme la Belgique redoutent l’éventuelle saisie des 200 milliards d’euros d’actifs gelés de la banque centrale russe, entreposés dans le système Euroclear basé à Bruxelles. D’où les questions sur le degré de coopération et de transparence de tous les pays qui appliquent les sanctions européennes…

Souveraineté suisse

«C’est à la Suisse, en tant que nation souveraine, de dire: «Nous sommes disposés et capables de donner cet argent à l’Ukraine. Nous allons également contribuer. Mais c’est une décision qui revient à la Suisse. Elle ne fait pas partie de l’Union européenne. Elle ne fait pas partie de la coalition» poursuit cette source. Pour mémoire, le Conseil fédéral a décidé d’appliquer les sanctions européennes contre la Russie, malgré la neutralité de la Suisse, lors de sa session spéciale du 28 février 2022, soit quatre jours après l’assaut russe.

Mais la Confédération s’en est toujours tenue au gel de ces avoirs estimés à 7,4 milliards de francs au 31 mars 2025. Leur saisie, et leur éventuel versement à l’Ukraine demeure hors sujet: «Si la Suisse désirait pouvoir utiliser les avoirs gelés pour la reconstruction de l’Ukraine, elle devrait créer la base légale nécessaire à cette fin peut-on lire dans la notice explicative des sanctions. Or le Conseil fédéral considère que la création d’une telle base légale pour confisquer les avoirs des personnes sanctionnées, du seul fait de leur présence sur la liste des sanctions, n’est pas opportune».

La flotte fantôme

Une autre mention de la Suisse a été faite en marge du sommet de Copenhague à propos des pavillons de complaisance utilisés par les pétroliers de la flotte fantôme qui, via la Baltique, acheminent les hydrocarbures russes vers leurs clients asiatiques. L’un d’entre eux, le Boracay ou Pushpa, actuellement stationné au large des côtes françaises, a navigué dans le passé sous pavillon helvétique. Il arbore maintenant le drapeau du Bénin. Il pourrait avoir hébergé des lanceurs de drones dans le ciel européen. Son propriétaire, Baaj Shipping, est une compagnie immatriculée aux Seychelles dont l’un des administrateurs est à Londres. La flotte marchande suisse comporte une quarantaine de navires. Pour être enregistré en Suisse, un bateau doit appartenir à un détenteur de passeport helvétique.

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