Le «département du chaos»: c'est le surnom dont a hérité à Berne le DDPS. Le nom de ce département est particulièrement long: Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports. Pourtant, la liste de ses échecs l'est encore plus. De nouveaux avions de combat F-35? Oui, mais à un prix exorbitant. Le remplacement des systèmes de radars obsolètes? Retardé de plusieurs années. L'exploitation des drones de reconnaissance plus modernes? État du projet insuffisant.
Pour mettre un terme à cette série de mauvaises nouvelles, un nouveau venu est à l'œuvre depuis avril: le conseiller fédéral Martin Pfister. En temps normal, les magistrats se laissent 100 jours avant de fixer leurs premières priorités. Martin Pfister s'est, pour sa part, présenté devant les caméras après 50 jours seulement. Le politicien compte bien faire le ménage et rétablir la confiance dans le DDPS le plus rapidement possible.
Le conseiller fédéral souhaite désormais externaliser complètement la gestion de la qualité et des risques pour les 17 projets de son département. Jusqu'à présent, cet aspect-là était géré de manière interne et externe. Sont concernés tous les projets de défense qui sont essentiels pour la sécurité de la Suisse. Parmi eux, l'achat des avions de combat F-35, l'acquisition du système de défense aérienne Bodluv ou la numérisation de l'administration militaire.
Des projets surveillés «à titre accessoire»
Dorénavant, ce ne sont plus les chefs de projet respectifs qui tiennent les rênes, mais le secrétariat général. A l'avenir, le vice-secrétaire général Robert Scheidegger répartira tous les mandats liés à la gestion de la qualité et des risques. Le DDPS espère que cette centralisation de l'attribution des mandats permettra de réaliser des «économies d'échelle» et de réduire les coûts. Les nouveaux contrats-cadres devraient s'appliquer à partir de 2026, pour 2400 heures par an pendant douze ans. Il s'agit donc de beaucoup d'argent, mais le DDPS ne souhaite toutefois pas révéler combien exactement.
Avec cette décision, le conseiller fédéral Martin Pfister donne l'impression qu'il se méfie de ses propres gestionnaires de risques et laisse entendre que les spécialistes externes sont plus compétents. «La question de la gestion de la qualité et des risques exige une certaine indépendance afin de contribuer à l'amélioration de la conduite et du pilotage des projets», affirme le service de presse de l'homme politique.
Des licenciements en vue? Le plus grand département de Suisse compte plus de 12'000 employés et le conseiller fédéral du Centre ne licenciera aucun de ses experts. «Il n'y a pas de suppression de postes», confirme le service de presse. «Les rôles assumés jusqu'ici en interne ont été exercés à titre accessoire», affirme Renato Kalbermatten, chef de la communication.
Jusqu’à présent, les projets les plus complexes du pays – impliquant des sommes importantes et touchant à la sécurité de la population – n’étaient surveillés qu’à titre accessoire.
Un «spécialiste» qui n'en est pas un
La débâcle des drones Hermes illustre bien le problème de ces internes responsables «à titre accessoire» de projets de pointe. Ces drones devaient être en service depuis 2020. Mais le Contrôle fédéral des finances a examiné le projet et constaté en janvier qu'il avait toujours le «caractère d'un projet de développement». La faute, entre autres, à une «gestion des risques insuffisante».
Le spécialiste interne de ce projet était un collaborateur du secrétariat général que le DDPS avait mis sur le projet. Selon le rapport des contrôleurs financiers, la personne en question a signalé à plusieurs reprises qu'il lui manquait des connaissances essentielles pour ce rôle. Il a même exigé de ses supérieurs qu'il soit remplacé par une «personne experte». Mais son appel à l'aide est resté sans réponse. Ce n'est qu'après le rapport du Contrôle fédéral des finances (CDF) que les choses ont été prises en main. Le service de presse écrit que «depuis peu», les 17 principaux projets du DDPS sont tous dotés d'un gestionnaire de la qualité et des risques.
Tous les spécialistes internes qui souhaitent continuer à exercer cette fonction au DDPS peuvent toutefois y rester. Ils sont «indispensables» pour la mise en œuvre, la gestion des connaissances et l'ancrage durable au sein du département, écrit le chef de la communication Renato Kalbermatten. A l'avenir, ils pourront davantage se concentrer sur leurs tâches principales ou assumer, dans le cadre des projets, d'autres tâches qui auraient sinon été effectuées par des personnes externes. «La sous-traitance externe complète l'expertise interne, mais ne la remplace pas», précise le chef de la communication.
Et les dépenses de personnel?
La décision du DDPS a entrainé une multitude de questions: quelles sont les tâches principales de ces soi-disant «spécialistes»? Comment seront-ils impliqués dans les projets de pointe? Comment en est-on arrivé à une situation où la gestion de la qualité et des risques n'était qu'une «activité accessoire» de certains employés? La Confédération souhaite actuellement faire des économies, avec cette décision le DDPS n'aide pas à la tâche.
Le département se défend contre les critiques. L'augmentation des dépenses de personnel par ces mandats externalisés n'alourdiraient pas les coûts. Ces spécialistes externes sont engagés de manière ciblée et limitée dans le temps, lorsque certaines capacités supplémentaires sont requises. «Les objectifs en matière de budget et de frais de personnel sont respectés.» Le DDPS refuse toutefois de donner des chiffres concrets...