On l'apprend enfin
C'est ça que Poutine et Trump se sont vraiment dit en Alaska

Il a fallu plusieurs heures pour y voir clair. On sait maintenant que les deux présidents sont tombés d'accords sur des négociations de paix en Ukraine sans cessez-le-feu. Volodymyr Zelensky est attendu à Washington lundi, sans doute avec des dirigeants européens.
Publié: 16:56 heures
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Dernière mise à jour: 19:08 heures
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Donald Trump et Vladimir Poutine se sont séparés après une très courte conférence de presse, sans prendre les questions des journalistes.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

Plusieurs heures d’attente pour y voir plus clair. Un entretien accordé par Donald Trump à la chaîne de TV conservatrice Fox News. Et des fuites dans la presse américaine en provenance de la Maison-Blanche. Il est désormais possible de reconstituer ce qui s’est vraiment passé vendredi 15 août durant les trois heures et demie d’échanges entre le président des Etats-Unis et Vladimir Poutine. Et cela contraste avec les impressions de départ, à l’issue de leur conférence de presse commune, sans aucune questions de journalistes.

Il est maintenant clair que les deux hommes ont décidé d’écourter leur rencontre à Anchorage, initialement prévue pour six ou sept heures avec un déjeuner de travail, parce que leur échange a bloqué sur l’Ukraine. Mais attention: le blocage n’est pas dû à leur désaccord.

Pas de cessez-le-feu

Donald Trump vient au contraire d’affirmer sur son réseau Truth Social qu’il défend maintenant, comme les Russes, l’ouverture de négociations de paix directes, sans cessez-le-feu préalable! C’est un changement majeur de position, qui sera au cœur de l’échange entre dirigeants européens en visioconférence de ce dimanche, puis de la visite de Volodymyr Zelensky à Washington lundi. Cela veut dire que Donald Trump a renoncé à forcer Moscou à arrêter les combats, alors que l’armée russe progresse sur le terrain.

Il est aussi clair que deux négociations parallèles se sont en fait tenues sur la base militaire Elmendorf Richardson. La première a réuni les deux présidents, entourés chacun de trois conseillers, dont leur ministre des Affaires étrangères et leurs conseillers spéciaux (il s’agissait de l’émissaire Steve Witkoff pour Trump). La seconde, avec une dizaine de participants de chaque côté, a réuni les ministres des Finances des deux pays, la gouverneure de la banque centrale russe, et le secrétaire au Commerce américain.

La question des sanctions

Rien n’a filtré de ce deuxième échange. Mais il est probable qu’il a porté sur la question des sanctions économiques et financières contre la Russie, et sur les futurs domaines de coopération possibles entre les deux pays cités par Poutine: l’exploitation du grand nord Arctique, le spatial, les hydrocarbures. Les Etats-Unis et la Russie auraient donc un «paquet» de mesures «business» prêtes à entrer en vigueur, une fois surmonté l’obstacle ukrainien. Ce qui coïncide avec la liste dressée par Vladimir Poutine lors de son intervention devant la presse.

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Troisième élément de l’échange qu’il n’était pas possible de connaître lorsque le sommet s’est achevé, puisque les deux dirigeants n’ont pas répondu aux questions des journalistes: Trump aurait obtenu le feu vert de Poutine pour une rencontre à trois avec Volodymyr Zelensky. Sauf que le président russe y a mis des conditions qui sont probablement inacceptables en l’état pour l’Ukraine et pour ses alliés européens, comme la discussion d’abandons de territoires par Kiev, en échange de «garanties de sécurité» dont les contours, en revanche, n’ont pas été précisés. D'autres fuites américaines affirment que la Russie serait prête à retirer certaines zones occupées par ses troupes en échange de l'intégralité de la région du Donbass.

Garanties de sécurité

Le «New York Times» parle d’une future clause qui lierait les alliés de l’OTAN à l’Ukraine, les engageant à défendre le pays en cas d’attaque, sans qu’il entre dans l’Alliance. Poutine aurait aussi confirmé son feu vert à l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne (UE). Le trouble vient du fait que Trump a, dans son entretien à Fox News, laissé entendre que c’est aux Européens de monter cette rencontre tripartite, puis de prendre la responsabilité de ces garanties, en particulier sur le plan militaire, même si les Etats-Unis s’y associeront. Cela revient à dire que les Européens devront payer et peut-être déployer des troupes. Trump ne fera rien pour l’Ukraine sans envoyer de factures à ses alliés de l’OTAN. Ce sujet sera au cœur de la visite de Volodymyr Zelensky à Washington lundi où il devrait être finalement accompagné de plusieurs dirigeants européens.

Dernière confirmation post-sommet: Donald Trump n’a pas été surpris, comme il a feint de le faire devant les journalistes à Anchorage, par la proposition de Vladimir Poutine de le recevoir en Russie. Il aurait même donné son accord (alors qu’il a mentionné cette visite au conditionnel devant la presse). Le voyage à Moscou interviendrait après le lancement d’un processus de paix en Ukraine, et il serait d’abord consacré aux échanges économiques pour signer le grand retour des Etats-Unis en Russie.

Seuls dans «The Beast»

Et enfin, une anecdote: le président russe n’aurait pas dû monter dans la limousine «The Beast» du président des Etats-Unis, après avoir été accueilli par Trump sur le tapis rouge déployé entre quatre avions américains F22. C’est Trump qui a pris cette initiative pour avoir un moment privé, juste aidé d’interprètes, avec Poutine, même si celui-ci comprend assez bien l’anglais. Problème: ce moment voulu par le locataire de la Maison Blanche a été «pollué» par l’énervement du président russe, après une question sur les combats et les bombardements de civils, alors que les deux hommes posaient pour les photographes sur l’estrade Alaska 2025. Poutine a fait semblant de ne pas avoir entendu.

C’est à la suite de cette question dérangeante que la décision de ne pas répondre aux journalistes aurait été prise par les deux chefs d’Etat.

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