Comment se présentent réellement les plans de l’OTAN selon le chef du Kremlin, Vladimir Poutine? La question agite actuellement plusieurs cercles en Occident. Il y a quelques jours, un rapport de l’influent Institute for the Study of War (ISW) a fait sensation. Les analystes y affirment que le Kremlin procède à des préparatifs ciblés au sein de son appareil militaire, laissant entrevoir la possibilité d’une guerre contre l’OTAN. Ces préparatifs incluent des attaques dissimulées, des provocations délibérées et une guerre hybride. Cette stratégie serait la «phase 0».
Le Kremlin envisage-t-il réellement un affrontement avec l’OTAN? «Une phrase sur la phase 0 de Poutine est tout à fait décisive», déclare l'expert en géopolitique Klemens Fischer. Selon lui, les explications sur la phase 0 sont pertinentes, mais un détail essentiel passe inaperçu. «Il n’est mentionné qu’en marge», précise-t-il.
Une phrase décisive
«L’ISW n’a constaté aucun signe indiquant que la Russie se prépare actuellement activement à un conflit imminent avec l’OTAN», précise Klemens Fischer. Autrement dit, il n’existe aucune preuve tangible que Poutine projette d’engager une guerre, selon l’expert.
La situation doit néanmoins être prise au sérieux. «L’objectif de ces exercices de planification militaire est surtout de produire un effet dissuasif sur l’adversaire.» Et sur ce point, la Russie semble en partie avoir atteint son but: dans de nombreux pays occidentaux, l’insécurité grandit.
Les problèmes de Moscou
Mais Klemens Fischer souligne qu'«en plus de trois ans, la Russie n’a pas réussi à forcer l’Ukraine à se rendre sur le champ de bataille». Une confrontation directe avec l’OTAN serait donc vouée à l’échec pour Moscou et se solderait, selon lui, par une «défaite prévisible pour la Russie».
Les revers militaires se multiplient: les Ukrainiens ont mené de vastes attaques contre des pipelines stratégiques, et des cibles situées profondément dans l’arrière-pays russe auraient également été frappées. «Une résistance sensible à la guerre en Ukraine ne s’est toutefois pas répandue en Russie, ce qui est sans doute dû au 'contrôle des messages' du Kremlin, toujours efficace sur l’ensemble du territoire», note encore Klemens Fischer.
«L'OTAN doit être contrainte»
Selon lui, «la Russie tentera de plus en plus de mettre en lumière les faiblesses des capacités de défense de l’OTAN. Cela devrait pousser l’Alliance à mobiliser ses ressources pour son propre réarmement plutôt que de les consacrer à l’Ukraine». Et d’ajouter: «La Russie pourrait ainsi imposer à l’OTAN et à l’Ukraine une lutte de répartition des moyens, très dangereuse pour Kiev si elle ne reçoit plus que l’armement dont l’OTAN n’a pas besoin pour son propre renforcement.»
Selon Klemens Fischer, les projets de réarmement actuels de l’Occident seront déterminants. «En fin de compte, il dépendra de l’OTAN elle-même si cette phase 0, qui n’est aujourd’hui qu’une description d’état, débouche sur une véritable préparation à la guerre – c’est-à-dire si l’OTAN reste passive ou renforce à temps ses propres capacités de défense et de dissuasion.»