Une «erreur fondamentale»
Le secteur viticole américain est en colère contre Donald Trump

La hausse des droits de douane menace la viabilité des vignobles américains. Le secteur viticole dénonce une «erreur fondamentale», craignant une baisse des ventes plutôt qu'un report vers les vins locaux.
Publié: 01.09.2025 à 18:41 heures
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Le mécontentement se répand. Avec ses droits de douane, le président américain nuit au business du vin de son pays.
Photo: IMAGO/Molly Riley/White House

Le fournisseur de liège a été le premier à prévenir: ses bouchons coûteront désormais 13% de plus à cause des droits de douane, dont il assumera seulement 2%. Puis ce fut le tour du négociant en barriques: entre 100 et 150 dollars supplémentaires par tonneau de chêne français. A cela s’ajoutent les investissements de long terme, comme l’achat de matériel de pressurage, qui creusent encore davantage le budget des producteurs.

Kory Burke, petit viticulteur de Paso Robles, en Californie, décrit ainsi ses difficultés dans les colonnes de «The Guardian»: «Tout le matériel que nous utilisons ici – des pompes à l’érafloir – est importé et livré avec des instructions en six langues. Pourrait-on produire ce type d’équipement aux Etats-Unis? Bien sûr, mais il faudrait au moins trois ans pour lancer une fabrication locale, et celle-ci n’atteindrait pas le niveau de qualité exigé aujourd’hui.»

Le régime douanier menace son entreprise

A la tête de Dresser Winery, une exploitation familiale, Kory Burke produit des vins haut de gamme. Le pinot gris et le rosé sont vendus 40 dollars, tandis que les cuvées rouges les plus chères atteignent 66 dollars. Les membres du Dresser Winery Wine Club bénéficient, eux, de promotions et de réductions exclusives.

Deux fois par an, Kory Burke ajuste ses prix. Pour l’automne, il a choisi de les maintenir, par fidélité à ses clients, malgré l’augmentation des droits de douane. Mais il fulmine lorsqu’il entend certains visiteurs le féliciter d’avoir «enfin l’occasion de décoller et de vendre encore plus de vin». Car en réalité, le régime douanier menace directement la viabilité de son entreprise.

Le lobby du vin dénonce une «erreur fondamentale»

Les droits de douane suscitent également de vives critiques dans le commerce du vin aux Etats-Unis. Selon la National Association of Wine Retailers (NAWR), croire qu’ils soutiendront la production nationale en renchérissant les vins étrangers est une illusion. Dans un communiqué virulent, l’organisation a dénoncé une «erreur fondamentale de jugement des consommateurs de vin et du marché du vin».

«Si un consommateur souhaite acheter un bourgogne rouge et qu’il ne peut plus se le permettre, ou que le vin n’est pas disponible, il ne se tournera pas vers un pinot noir de l’Oregon, mais n’achètera tout simplement pas de vin», poursuit le texte.

Des importations européennes à forte valeur ajoutée

Malgré leur rang de sixième producteur mondial, les Etats-Unis consomment davantage de vin qu’ils n’en produisent. Selon les chiffres de l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), ils ont importé 12,264 millions d’hectolitres en 2024, une partie importante arrivant sous forme de vin en vrac du Canada, de Nouvelle-Zélande ou d’Afrique du Sud, puis mise en bouteille localement.

En 2018, les pays de l’Union européenne ont exporté 6,3 millions d’hectolitres de vin vers les Etats-Unis pour une valeur de 3,8 milliards d’euros. En 2024, cette valeur a grimpé à 4,88 milliards d’euros. Le Comité Européen des Entreprises Vins (CEEV) souligne d’ailleurs l’importance de ces échanges: «Pour chaque dollar généré par les exportations européennes de vin aux États-Unis, le secteur américain de la distribution et de la restauration en gagne 4,50.» Une dynamique favorisée par le système de distribution en trois niveaux en vigueur outre-Atlantique (producteurs, distributeurs et détaillants).

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