Les électeurs n'ont pas encore voté sur l'initiative «Pas de Suisse à 10 millions» de l'Union démocratique du centre (UDC) que le parti de droite présente déjà son prochain projet: l'initiative sur la protection des frontières.
Blick a rencontré le chef de l'UDC Marcel Dettling dans le canton de Schaffhouse, au poste frontière avec l'Allemagne. Le conseiller national schwytzois nous explique pourquoi il souhaite des contrôles renforcés aux frontières et un droit d'asile limité.
Blick: Monsieur Dettling, nous sommes à la frontière avec l'Allemagne. Si cela ne tenait qu'à vous, elle serait de nouveau bouclée.
Marcel Dettling: Nous voulons revenir à des frontières contrôlées, comme nous le faisions avant l'introduction de Schengen/Dublin. De nombreux pays de l'Union européenne (UE), et même l'Allemagne, procèdent à nouveau à des contrôles renforcés aux frontières. Et avec succès! Les demandes d'asile ont baissé de 60%. Cela doit aussi être notre objectif.
Cela concerne aussi les frontaliers, 66'000 rien qu'en provenance d'Allemagne, qui seront à l'avenir plus longtemps bloqués à la douane?
Nous n'avons aucun problème avec les frontaliers, pour lesquels notre initiative prévoit une procédure numérique simplifiée. Nous nous concentrons sur ceux qui traversent la frontière illégalement.
Vous avez donc réuni les signatures?
Nous avons récolté plus de 120'000 signatures et en avons déjà authentifié plus de 100'000. Nous déposerons l'initiative le 24 septembre.
Pourquoi avoir choisi de lancer cette initiative plutôt que de compter sur l’action du ministre de la Justice Beat Jans?
Si nous faisons cette initiative, c'est précisément à cause de Beat Jans. Plus de 20 interventions au Parlement ont été transmises pour qu'il serre enfin la vis. Mais rien n'a été fait.
Pourtant, avec Beat Jans en poste, les demandes d'asile ont baissé de 14% cette année. La migration illégale a également diminué de près de moitié.
Actuellement, plus de 220'000 personnes sont concernées par l'asile en Suisse, c'est un record. La criminalité liée à l'asile a également augmenté massivement. Si le nombre de demandes est actuellement un peu plus bas, nous le devons en premier lieu aux pays voisins qui contrôlent à nouveau leurs frontières. Mais nous ne pouvons pas faire dépendre notre sécurité d'autres pays. Nous devons agir à long terme, c'est pourquoi notre initiative est nécessaire.
Quiconque arrive d'un pays tiers sûr doit être renvoyé, demande votre initiative. Avec tous les pays de l'UE autour de nous, cela signifie de facto la suppression du droit d'asile.
C’est ce qui nous avait été promis lors de la votation sur Schengen/Dublin: une personne venant d’un pays tiers ne pourrait plus déposer de demande d’asile en Suisse. Or, c’est l’inverse qui se produit. L’Italie et la Grèce ne reprennent plus les personnes concernées. Une fois la frontière suisse franchie, il est presque impossible de les renvoyer. Le système ne fonctionne pas et nous nous retrouvons avec des centaines de milliers de migrants demandant l’asile.
L'initiative fixe une limite supérieure selon laquelle l'asile peut être accordé à 5000 personnes par an au maximum. Qu'arrivera-t-il à la 5001ème personne?
Ces dernières années, 4000 à 6000 personnes ont obtenu l'asile chaque année en tant que véritables réfugiés. Notre limite s'oriente vers ces chiffres. Le problème, ce sont tous les autres dont la demande d'asile a été rejetée et qui restent malgré tout en Suisse. Au cours des 20 dernières années, plus de 100'000 personnes ont été admises provisoirement sans avoir obtenu l'asile. Elles sont encore là parce que le Beat Jans trouve toujours de nouveaux prétextes pour ne pas les renvoyer. En plus, il a autorisé des centaines de voyages dans les pays d'origine de ces personnes. Cette situation doit changer.
Peut-être que ces personnes que vous renverriez sont menacées de mort dans leur pays d'origine. Operation Libero veut faire invalider votre initiative parce qu'elle viole le droit international impératif.
Les migrants en quête d'asile traversent des dizaines de pays avant même d'arriver à la frontière suisse. Le fait que ces personnes aient la liberté de choisir leur pays de destination est inacceptable et doit être stoppé. En outre, le droit international s'applique également à la population suisse. Nous avons le droit de vivre en sécurité. L'année dernière, la Suisse a enregistré plus de 560'000 délits, dont un quart étaient le fait de migrants d'asile et de clandestins! Les viols ont augmenté de 30% en un an. Nous devons y mettre fin.
En 2026, le pacte de l'UE sur l'asile entrera en vigueur, avec des procédures aux frontières extérieures et une clé de répartition équitable. La Suisse pourrait y participer.
La politique d'asile de l'UE est un véritable désastre. Les Etats ont été submergés par les demandes d'asile et la sécurité a été massivement affaiblie. Le pacte migratoire de l'UE ne fait que nous obliger à accueillir encore plus de demandeurs d'asile en raison du soi-disant mécanisme de solidarité. Pourtant, nos communes sont déjà à bout de souffle. D'une part, en ce qui concerne l'hébergement et les coûts faramineux. D'autre part, au niveau des écoles, qui sont dépassées par un tel nombre d'enfants issus de cultures étrangères.
Votre ancien conseiller fédéral Ueli Maurer courtise les autocrates et les criminels de guerre. Votre collègue de parti ne commence-t-il pas à vous gêner?
Ueli Maurer peut faire ce qu'il veut en privé. Il a reçu une invitation de la Chine et l'a acceptée. Ce qui m'inquiète davantage, c'est que la Suisse n'ait pas reçu d'invitation ou l'ait refusée. En revanche, avec Bruxelles, c'est une toute autre histoire. Nos diplomates devraient entretenir des contacts avec tous les pays du monde. La Chine est un partenaire important avec lequel nous devrions développer nos relations commerciales.
Vous auriez accepté l'invitation?
En tant que petit pays, nous devons entretenir de bonnes relations avec tout le monde.
C'est ce que nous avons fait avec le président américain Donald Trump. Malgré cela, il nous a imposé des droits de douane punitifs de 39%. Même l'UDC, qui a salué la victoire électorale de Trump, a été prise de court.
Apparemment, un accord à 10% était prêt. Quelque chose s'est manifestement mal passé. C'est désastreux pour notre économie. Il est important que les négociations se poursuivent afin que nous puissions rapidement clarifier la situation avec un nouvel accord. D'ici là, il est urgent de soulager l'économie en réduisant les réglementations et la bureaucratie. Se lier maintenant à la bureaucratie européenne fortement endettée serait fatal et, de surcroît, ne changerait rien aux droits de douane américains.
Lors de la session d'automne, l'initiative de l'UDC «pas de Suisse à 10 millions» sera mise sur la table. On assistera de nouveau au classique affrontement: l’UDC face à tous les autres partis.
Pas du tout ! Nous avons tendu la main à un contre-projet pour que les chiffres de l'immigration baissent enfin. Notre offre a été rejetée.
Le Parti libéral-radical (PLR) s'est montré particulièrement virulent lors d'une conférence de presse. C'est la faute de l'UDC si, en raison du manque de main-d'œuvre qualifiée, les seniors ne sont plus pris en charge dans les maisons de retraite et si aucun sanitaire ne répare les WC bouchés.
C'était une mise en scène ridicule de Thierry Burkart. Nous n'avons jamais contesté la nécessité d'une certaine immigration de main-d'œuvre. Lors de la votation sur la libre circulation des personnes, le Conseil fédéral nous avait promis que seuls 8000 à 10'000 immigrants viendraient chaque année, alors qu'en réalité, ils sont entre 80'000 et 100'000. Notre pays ne peut pas supporter une immigration aussi importante. D'autant plus qu'une grande partie d'entre eux ne viennent pas pour travailler.
Avec Susanne Vincenz-Stauffacher et Benjamin Mühlemann, le PLR a un nouveau duo. Qu'attendez-vous d'eux?
Pas grand-chose! Le problème du PLR est qu'il n'a pas d'opinion propre sur toutes les questions importantes, mais qu'il répète tout ce que dit son sponsor Economiesuisse. Cela ne changera pas avec ce nouveau duo. C'est dommage! Le PLR ne devra donc pas s'étonner s'il se fait à nouveau laminer lors des prochaines élections et s'il perd son deuxième siège au Conseil fédéral.