Devant le Tribunal criminel de Neuchâtel, il nie toute implication dans l'acte de brûler vive son ex-compagne. Le commanditaire présumé d'une tentative de féminicide estime être victime d'une vengeance. «Je trouve choquant ce qui est arrivé à la victime mais je suis innocent», a déclaré l'accusé principal. «J'ai subi la vengeance» des auteurs de l'infraction que «j'hébergeais chez moi et que j'ai mis dehors de mon appartement à cause de la drogue».
Les messages retrouvés, qui parlent d'un «service» à faire, sont liés à des travaux de carrelage, a ajouté le commanditaire présumé. En parlant du co-accusé, «je lui ai donné de l'argent pour qu'il aille au Portugal voir son fils».
Un des co-auteurs charge le commanditaire
Un des co-auteurs de cette tentative de féminicide a chargé le présumé commanditaire. Il dit avoir participé à mettre le feu à la victime car il était «sous emprise» de ce dernier et qu'il avait besoin d'argent.
Il a déclaré avoir agi par besoin d'argent car le commanditaire lui aurait promis 5000 francs, plus une pension de 500 francs par mois. Il était dépendant de lui et de stupéfiants et s'estimait sous emprise car il vivait chez lui. Comme le commanditaire est revenu de nombreuses fois à la charge, il a fini par accepter quand une troisième personne est entrée dans le projet consistant à brûler la victime, et notamment ses yeux.
Une troisième personne impliquée
Cet troisième personne a été jugé au Portugal. Les deux co-auteurs se renvoient donc la balle. Le co-accusé, jugé à Neuchâtel, a déclaré que ce n'est pas lui qui a mis l'essence et qui a allumé, mais qu'il est allé chercher la victime et qu'il lui a tenu les mains. Une fois la victime à terre, il aurait demandé à l'autre co-auteur d'arrêter, en partant en courant à la voiture.
La victime, qui a eu le courage d'être entendue malgré ses lourdes séquelles psychiques et physiques, a confirmé cette déclaration sans être sûre à 100%. Selon elle, c'est le prévenu qui était derrière lui, soit l'agresseur jugé au Portugal, qui a mis le chiffon dans sa bouche, qui a versé de l'essence sur elle et qui lui a mis le feu.
«Avez-vous conscience que vos déclarations sont insensées?»
Le présumé commanditaire a refusé de discuter avec l'expert psychiatrique, qui a relevé des signes de trouble de la personnalité de type narcissique. «Je n'ai jamais été agressif.» Le juge a toutefois relevé que son ex-épouse au Portugal a relaté des violences, de l'agressivité et qu'elle a peur de lui.
«Avez-vous conscience que vos déclarations sont insensées, voire absurdes ?», a lancé le président du tribunal, Bastien Sandoz, après que le prévenu a donné des explications très embrouillées, notamment pour justifier son passage à deux reprises durant la nuit du 20-21 octobre à la frontière franco-suisse. Selon l'acte d'accusation, il l'a fait pour remettre de l'argent et du carburant aux co-accusés.
L'enregistrement de l'appel d'urgence du fils de la victime passé au tribunal
Le Ministère public neuchâtelois a requis des peines de 16 ans et demi et de 14 ans de prison pour tentative d'assassinat. La procureure a expliqué que cette tentative de féminicide était l'un des «crimes les plus odieux du canton de ces dernières années». Le réquisitoire du Ministère public devant le Tribunal criminel de Neuchâtel a commencé de façon très émouvante par l'enregistrement de l'appel à la centrale d'urgence, du jeune fils de la victime, dont on entend les cris de douleur en arrière-fond.
«C'est une attaque lâche et barbare», a déclaré la procureure Manon Simeoni. Selon elle, le commanditaire a conçu, participé à la tentative d'assassinat qu'il avait planifié depuis plus d'un an. Jaloux, il ne supportait pas que la victime ait mis fin à leur relation et voulait maintenir un contrôle sur sa vie par une surveillance incessante.
Selon la procureure, le commanditaire voulait anéantir la mère de famille pour qu'elle ne puisse plus continuer sa vie sans lui. «Il a fait preuve d'une immense volonté destructrice (...). Il a agi de façon lâche et odieuse, en faisant faire le sale boulot à d'autres. Avec une grande cruauté, il a choisi de concentrer l'essence sur son visage pour la défigurer et la faire souffrir.»
Expulsion du territoire
L'accusé a fait preuve «d'un acharnement hors du commun», a ajouté le Ministère public, qui a requis dix ans d'expulsion du territoire. En plus des 16 ans et demi de prison pour tentative d'assassinat, s'ajoutent huit mois de prison pour des affaires d'escroquerie, de faux dans les titres, et de violation de l'obligation de tenir une comptabilité, soit une peine globale de 17 ans et trois mois.
Concernant le 2e prévenu portugais, le Ministère public a ajouté qu'il est co-auteur de l'infraction, peu importe qu'il ait mis lui-même le feu ou pas. «Son intervention a contribué au résultat. Il a contribué de manière déterminante à l'infraction avec des actes préparatoires (...). Il a fui quand la victime était en feu». La procureure a requis également une expulsion de dix ans du territoire.
Pour la partie plaignante, l'avocat Alexandre Zen-Ruffinen, le commanditaire a agi de manière particulièrement odieuse et égoïste. «Il savait que les enfants de la victime souffrent d'une maladie incurable. Cela ne l'a pas empêché de vouloir» que leur mère meure et qu'ils deviennent orphelins.