Le Conseil fédéral est contre
Les terroristes doivent-ils être expulsés s'ils sont menacés dans leur pays?

La Commission des institutions politiques du Conseil national s'oppose à une motion demandant que les terroristes soient expulsés s'ils risquent la torture ou la mort dans leur pays. À Berne, cette question fait l'objet d'un vif débat qui polarise le Parlement.
Publié: 05.09.2022 à 14:22 heures
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Dernière mise à jour: 05.09.2022 à 14:24 heures
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Les terroristes qui menacent la sécurité intérieure de la Suisse doivent être expulsés vers leur pays d'origine, même s'ils y risquent la torture ou la mort, demande une motion du Centre.
Photo: zVg
Daniel Ballmer

Un État de droit peut-il expulser un terroriste dans un pays où il risque la mort ou la torture? Cette question polarise beaucoup au sein de la Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil national.

Une majorité est convaincue du contraire, arguant qu'un pays démocratique doit aussi traiter ses ennemis conformément au droit et à ses valeurs. Par 14 voix contre 9 et une abstention, la CIP a rejeté une motion du conseiller national du Centre Fabio Regazzi. Le texte demandait que les terroristes soient toujours expulsés vers leur pays d'origine, indépendamment du statut sécuritaire de celui-ci.

Le sujet est controversé sous la Coupole, puisque le Parlement s'était prononcé en faveur mais que le Conseil fédéral s'y oppose. Selon le gouvernement, la mise en œuvre d'une telle motion serait contraire au droit international. Dès le début des débats, Karin Keller-Sutter avait recommandé son rejet.

Contraire aux valeurs suisses

«Certes, la sécurité de la population est prioritaire, mais nous devons la défendre dans le périmètre de l'État de droit», avait expliqué la ministre de la Justice. Le Conseil fédéral a aussi proposé que la police puisse assigner à résidence de telles personnes sans procédure pénale, ou des interdictions d'accès à des zones déterminées.

La majorité de la CIP du Conseil national arrive aux mêmes conclusions: il n'est pas possible d'avoir deux poids, deux mesures en matière de respect des droits fondamentaux. Au lieu d'expulser des terroristes vers des pays où ils risquent la torture ou la peine de mort, il faut prendre des mesures en Suisse pour qu'ils ne causent pas d'autres dommages.

«Exposer des personnes à la torture ou à la peine de mort dans d'autres pays n'est pas acceptable et serait contraire à toutes les valeurs auxquelles la Suisse est attachée», écrit le président de la commission, Marco Romano, lui aussi du Centre, dans son rapport publié vendredi.

Sécurité intérieure avant tout?

Mais tous les membres de la commission ne sont pas de cet avis. Une importante minorité (9 voix sur 24) défend la motion pour des raisons de sécurité intérieure. Elle demande que le Conseil fédéral propose des mesures permettant d'éviter que la Suisse n'offre un refuge à des personnes qui ne respectent ni l'État de droit ni la vie humaine.

Aux yeux de cette minorité, il y a lieu d'adapter le droit en vigueur: il faut s'assurer que toutes les personnes condamnées en Suisse pour terrorisme puissent effectivement être expulsées. Cette lutte entre la sécurité et le droit international va continuer à occuper les discussions, puisque la motion doit passer en plenum lors de la session d'automne.


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