Donald Trump sort une nouvelle fois son marteau. Mais cette fois-ci, il ne s’agit pas de droits de douane, mais de l’indépendance de la Réserve fédérale américaine (Fed). Et donc de la confiance dans le marché financier américain, où une grande partie de nos retraites est investie. Mais que s’est-il passé exactement?
Le président américain a révoqué avec effet immédiat la gouverneure de la Fed Lisa Cook, comme annoncé dans une lettre publiée sur son réseau Truth Social. Il y affirme que Lisa Cook aurait fait de fausses déclarations dans un ou plusieurs contrats hypothécaires. Ces accusations n’ont toutefois pas encore été prouvées.
Cette décision place désormais la Cour suprême au centre de l’affaire. Car Lisa Cook, sous pression depuis plusieurs jours, refuse de se laisser faire. La plus haute juridiction des Etats-Unis devra donc trancher et donner un signal fort.
Le président de la Fed visé
Le président américain invoque le Federal Reserve Act de 1913, la loi fondatrice qui garantit l’indépendance politique de la Fed. Elle n’autorise une révocation qu’en cas de «raisons importantes». Et c’est précisément cet argument que Donald Trump brandit aujourd’hui. Comme Lisa Cook refuse de démissionner, ce seront les tribunaux qui devront décider, et finalement la Cour suprême.
Cette affaire illustre la volonté de Donald Trump de forcer par tous les moyens une baisse des taux d’intérêt aux Etats-Unis, afin de stimuler l’économie et de réduire la charge de la dette publique. Depuis son arrivée à la Maison Blanche en janvier, il ne cesse de réclamer des baisses de taux, ce qui a donné lieu à un bras de fer virulent agrémenté d’insultes avec le président de la Fed, Jerome Powell. Ce dernier s'est jusqu’ici opposé à toute baisse. C’est aussi pour cette raison que Donald Trump menace régulièrement de destituer le plus haut responsable de la politique monétaire américaine.
Le fonds de placement AVS investi aux Etats-Unis
Lorsque Donald Trump a évoqué en avril l’idée de limoger Jerome Powell, les investisseurs ont réagi aussitôt en se retirant du marché américain, provoquant un plongeon de la Bourse. La volonté du président américain d'influencer la politique monétaire est très mal perçue: l’indépendance d’une banque centrale est essentielle pour qu’elle échappe aux intérêts politiques à court terme.
Les tentatives de Donald Trump de la fragiliser inquiètent donc les marchés. La preuve: le dollar a légèrement reculé face à plusieurs devises, et les obligations d’Etat américaines à court terme ont suivi le mouvement, selon Reuters.
Et cette instabilité nous concerne directement. Les épargnants suisses investissent, eux aussi, massivement à Wall Street. D’une part, les rendements y ont été plus attractifs ces dernières années. D’autre part, investir aux Etats-Unis permet de diversifier ses avoirs et de se protéger contre les risques de change. Cela vaut aussi pour le fonds AVS, qui, selon la «Handelszeitung», a placé quelque 10 milliards de francs de rentes sur le marché américain.
La baisse du dollar plombe le rendement
Les caisses de pension suisses détiennent, elles aussi, d’importantes sommes outre-Atlantique. Aucun chiffre précis n’existe, mais selon l’Office fédéral de la statistique (OFSP), elles géraient en 2023 un total de 1129 milliards de francs, dont environ 60% en titres.
Or, si Wall Street et le dollar fléchissent, la performance de ces placements en souffre directement. La chute des bourses américaines pèse sur les rendements, et l’affaiblissement de la monnaie américaine, devise de référence mondiale, rend encore moins attractifs les investissements en dollars.
Si Donald Trump continue d’éroder l’indépendance de la Fed, ce serait un nouveau coup de massue pour la Suisse. Un coup que nous sentirions directement dans notre portefeuille.