Une dispute qui finira en procès?
Ni Berne ni le Jura ne veut payer pour les seniors de Moutier

Avec le changement de canton de Moutier, la question jurassienne devait enfin être résolue. Mais en coulisses, on se dispute encore, cette fois à propos des aînés de Moutier. La Confédération a déjà tenté de jouer les médiateurs.
Publié: 10:25 heures
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La commune de Moutier se trouve encore aujourd'hui dans le canton de Berne. Le 1er janvier 2026, elle sera transférée dans le canton du Jura.
Photo: keystone-sda.ch
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Céline Zahno

Un litige qui dure depuis des décennies devrait prendre fin: le 1er janvier 2026, la petite ville de Moutier pourra passer du canton de Berne au canton du Jura. Il s'agit d'une étape historique. Le changement de canton doit en effet tirer un trait sur le long conflit jurassien, émotionnel et parfois violent.

Après la décision populaire de 2021, les deux cantons ont tout préparé dans le cadre d'une procédure épique. Le Parlement fédéral a également donné son feu vert. Plus rien ne semble donc s'opposer à un changement de canton en douceur.

Mais à quelques mois du jour fatidique, on continue toutefois à se chamailler en coulisses. La raison: les seniors de Moutier. Personne ne veut payer les frais de leur maison de retraite! Ni Berne ni le Jura ne se sentent compétents – ils se renvoient donc mutuellement la responsabilité. Blick vous raconte les dessous de l'affaire.

Échec de la médiation de la Confédération

Dans les soins de longue durée, les résidents et les caisses maladie ne prennent en charge qu'une partie des coûts, le reste étant assumé par les cantons de résidence. C'est ce qu'on appelle le financement résiduel. Le litige porte sur les personnes de Moutier qui vivaient déjà dans des établissements médico-sociaux bernois avant 2026. Le canton de Berne veut arrêter de continuer à payer pour elles après le transfert de canton. Mais le canton du Jura rechigne à prendre en charge les coûts à partir de 2026.

Les fronts se sont durcis. Même la Confédération a dû jouer les médiateurs entre les deux parties, comme l'indique la Direction de la santé du canton de Berne, interrogée par Blick. Une rencontre de médiation a eu lieu en juin entre les délégations des deux cantons, et des représentants de l'Office fédéral de la justice et de l'Office fédéral des assurances sociales. Celle-ci n'ayant pas abouti à un accord, les cantons doivent désormais trouver une solution de manière bilatérale.

70 personnes concernées

Selon les données d'avril 2025, environ 70 personnes sont concernées, comme l'explique le canton. Les autorités bernoises estiment qu'en vertu du principe de territorialité, le financement résiduel incombera aux autorités jurassiennes à partir du 1er janvier 2026, date à laquelle Moutier deviendra une commune jurassienne. «Les résidents des homes domiciliés à Moutier seront dès cette date soumis au droit jurassien, y paieront leurs impôts, y percevront des prestations sociales et y exerceront leurs droits politiques selon le droit jurassien.»

Le canton du Jura défend le point de vue suivant: les seniors concernés étaient domiciliés dans le canton de Berne au moment de leur entrée en institution. C'est pourquoi le canton de Berne devrait continuer à les prendre en charge. Le Jura se réfère à une modification de la loi entrée en vigueur en 2019: selon celle-ci, il incombe au canton d'origine des résidents du home d'assurer le financement de leur séjour pour une durée indéterminée.

Une affaire qui se terminera au tribunal?

Si les deux parties ne parviennent pas à se mettre d'accord, il leur reste encore la possibilité d'aller au tribunal. Le canton de Berne veut éviter cette option autant que possible, car attendre une décision de justice pourrait durer de nombreux mois, voire des années. Cela ne serait dans l'intérêt ni des personnes concernées ni des deux cantons. Et les foyers pourraient se retrouver dans une situation difficile dans l'intervalle.

Une telle fin aurait en outre un arrière-goût amer. Après des années de conflit, on ne pourrait toujours pas tirer un trait sur la question jurassienne – et les dernières querelles se régleraient sur le dos de 70 seniors.

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