Les seniors souffrent de la pénurie de logements
«Tout le monde n'a pas ma chance, parfois je culpabilise»

Les seniors célibataires ont de plus en plus de mal à payer les loyers du marché suisse. Christina Petermann a vécu la pénurie de logements et a dû quitter son appartement. Ce n'est que grâce à une fondation qu'elle a pu retrouver un logement abordable.
Publié: 24.10.2025 à 16:56 heures
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Christina Petermann devant son ancien appartement à Zurich-Witikon.
Photo: Sammuel Walder
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Dorothea Vollenweider

Christina Petermann possède ce que beaucoup de seniors s'arracheraient: un appartement de retraite abordable à Zurich. Elle vit depuis trois ans dans un deux pièces et demie grâce à la Fondation Rohn-Salvisberg – le loyer est adapté à son revenu. Puisque sa rente est modeste, son loyer est nettement inférieur à la moyenne locale.

«J'ai eu beaucoup de chance», reconnait Christina. Elle sait combien il est difficile pour beaucoup de seniors de trouver un logement abordable. «Tout le monde n'a pas ma chance.»

Des échecs en rafale

Pour Christina aussi, le chemin a été semé d'embûches. Il y a trois ans, elle a dû quitter son appartement en location à Zurich-Witikon. La résidence a été rénovée, forçant tous les résidents à quitter les lieux. Un déménagement aux conséquences dramatiques pour Christina: elle a cherché un nouveau logement dans le quartier pendant plus d'un an et demi, mais sans succès. Quitter son environnement et son cercle social aurait été impensable pour elle. «Je me serais isolée», confie-t-elle. Mais aucun appartement en location à Zurich-Witikon n'était à sa portée.

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Une nouvelle étude de Wüest Partner montre combien les seniors sont précaires en Suisse. Les retraités célibataires contraints de déménager ont peu de chances de trouver un logement abordable, c'est-à-dire un logement dont le loyer est inférieur au tiers de leur revenu. La situation est particulièrement alarmante dans les cantons de Zurich et de Zoug, dans l'arc lémanique et les Grisons.

Pénurie de logements adaptés

Le pire, c'est que les chiffres de cette étude reflètent l'offre générale de logements. Or, les seniors ont besoin de logements accessibles adaptés aux personnes à mobilité réduite, donc sans marches, avec un ascenseur et une salle de bain fonctionnelle. «Dès 75 ans, les gens cherchent des appartements locatifs adaptés à leur âge et situés dans des quartiers bien desservis», explique Robert Weinert, directeur de recherche chez Wüest Partner. 

«Dès 75 ans, les gens recherchent des logements locatifs adaptés à leur âge», explique Robert Weinert.
Photo: DR

Or, c'est précisément pour ces personnes que l'offre est particulièrement rare. Les seniors devant déménager après un licenciement ou à cause de problèmes de santé se retrouvent souvent dans une situation désespérée. «Dans une telle situation, on craint pour sa survie. C'est terrible», explique Christina.

Elle n'a ménagé aucun effort dans sa recherche d'appartement. La ville tient une liste d'attente pour les logements sociaux pour personnes âgées. Christina est restée environ cinq ans sur cette liste. «Mais pendant tout ce temps, je n'ai pu visiter aucun logement.»

La fondation est débordée

La liste d'attente de la fondation Rohn-Salvisberg, où Christina a trouvé un logement, est aussi très longue. «Rien qu'à Witikon, on compte actuellement au moins 160 personnes en attente», déclare la directrice Sylvia Keller. Elle loue environ 140 appartements de retraite à but non lucratif de différentes tailles à Bülach (ZH), Küsnacht (ZH) et Zurich-Witikon. «A Witikon, nous avons en moyenne deux à quatre changements par an», explique Sylvia Keller. En d'autres termes, une place sur la liste d'attente n'est qu'une petite lueur d'espoir dans une situation déjà désespérée.

«Il arrive que les gens se présentent à mon bureau les larmes aux yeux», déclare la directrice de la Fondation Rohn-Salvisberg.
Photo: DR

Sylvia constate tous les jours combien cette pénurie de logements impacte les personnes âgées. «Il arrive que des personnes se présentent à mon bureau avec les larmes aux yeux», dit-elle. Des situations douloureuses, car Sylvia n'a pas de solution immédiate pour les seniors en situation de détresse. «Tout ce que je peux faire, c'est écouter.»

La situation s'aggrave

La situation ne semble pas prête de s'améliorer: la demande de logements adaptés aux seniors va croître rapidement dans les années à venir. Selon Wüest Partner, 393'000 logements supplémentaires seront nécessaires d'ici 2040.

Le nombre de logements disponibles varie considérablement d'une région à l'autre. Le canton de Genève en a le plus grand besoin, avec plus de 20'000 appartements nécessaires, suivi de la région d'Aarau avec environ 16'000 appartements et de la ville de Zurich avec environ 11'000. 

Toutefois, Robert Weinert souligne que «tous ces logements ne doivent pas forcément être neufs.» Une grande partie pourrait être occupée par des appartements standards, rénovés avec soin pour les rendre accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Les maisons de retraite pleines à craquer

Les maisons de retraite et de soins ont aussi besoin d'être développées de toute urgence. Plus de 25 000 places supplémentaires sont nécessaires à l'échelle nationale d'ici 2040. De nouveau, les besoins les plus importants se trouvent dans le canton de Genève, suivi de la région d'Aarau et de l'Oberland zurichois. A l'inverse, l'offre est déjà suffisante dans la ville de Zurich et le canton de Bâle-Ville.

Pour Christina, emménager dans l’appartement de la fondation, c’était comme fêter Noël et son anniversaire en même temps. «Parfois je culpabilise», confie-t-elle, car elle sait combien il est difficile de trouver un logement pour un senior.

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