Une «guerre contre l'Occident»
Vladimir Poutine dévoile un prétendu projet de paix avec Kiev datant de 2022

Vladimir Poutine affirme que Kiev a signé un accord de sécurité avec Moscou en mars 2022. Puis, l'Ukraine aurait brusquement rejeté ce document. Moscou ne veut désormais plus parler d'opération spéciale en Ukraine, mais de «guerre contre l'Occident».
Publié: 19.06.2023 à 06:01 heures
1/7
Le président russe Vladimir Poutine, samedi, lors d'une réunion à Saint-Pétersbourg avec des chefs d'Etat d'Afrique.
Photo: Getty Images
new.jpg
Daniel Kestenholz

Il n'est pas clair si les documents sont authentiques. Kiev reste pour l'instant silencieuse. Selon les médias russes, le président Vladimir Poutine a présenté pour la première fois samedi à Saint-Pétersbourg le projet d'un prétendu accord de sécurité avec l'Ukraine, qui aurait été élaboré en mars 2022 à Istanbul.

Le chef du Kremlin a présenté le projet d'accord aux chefs d'Etat et de gouvernement de plusieurs pays africains qui s'étaient rendus sur les bords de la mer Baltique russe pour un sommet économique.

Vladimir Poutine a souligné à cette occasion que le président turc Recep Tayyip Erdogan avait soutenu les négociations. Le dirigeant turc aurait alors aidé à «élaborer des mesures de confiance et à rédiger le texte de l'accord», selon l'agence de presse russe Tass, qui cite le président russe.

«Nous n'avons pas discuté avec la partie ukrainienne du fait que cet accord serait classé secret, mais nous ne l'avons jamais non plus présenté ou commenté», a déclaré Vladimir Poutine à propos de ce document jusqu'ici inconnu.

Alors qu'il montrait le projet d'accord aux délégations venues d'Afrique, le chef du Kremlin a déclaré que le document avait été signé par le négociateur en chef de Kiev: «Il a apposé sa signature dessus, a déclaré Vladimir Poutine en pointant du doigt. Voilà!» Le document qu'il brandit dans la retransmission en direct est très illisible et à peine reconnaissable.

La date du «contrat» laisse perplexe

Selon le chef d'Etat russe, le document s'intitulait «Traité sur la neutralité permanente et les garanties de sécurité pour l'Ukraine». Le projet prévoirait que l'Ukraine doit ancrer la «neutralité permanente» dans sa constitution.

La Russie, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Chine et la France seraient mentionnés comme garants. La chaîne Telegram «Strana» a toutefois fait remarquer que la première page indiquait clairement que le projet avait été élaboré le 13 avril – donc après le massacre de Boutcha. A la suite de cet événement, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé la Russie de crimes de guerre et les négociations entre Kiev et Moscou ont été interrompues.

Un prétendu projet complémentaire, également mis en avant par Vladimir Poutine, contiendrait les propositions russes et ukrainiennes sur la taille de l'armée permanente de Kiev en temps de paix ainsi que sur son équipement.

Moscou aurait proposé de limiter le nombre de militaires à 85'000 et le nombre de membres de la garde nationale à 15'000. Kiev aurait en revanche souhaité avoir jusqu'à un quart de million de soldats.

Moscou voulait donc accorder à l'Ukraine 342 chars, 1029 véhicules blindés, 96 lance-roquettes multiples, 50 avions de combat et 52 «avions auxiliaires». Kiev aurait insisté pour obtenir 800 chars, 2400 véhicules blindés, 600 lance-roquettes multiples, 74 avions de combat et 86 «avions auxiliaires».

Double jeu de Moscou

Des propositions visant à limiter le nombre de mortiers, d'armes antichars et de systèmes de missiles antiaériens ukrainiens ainsi que d'autres équipements auraient également été échangées. Les négociations auraient échoué peu après, l'invasion russe était déjà en cours.

Vladimir Poutine n'a pas dit un mot sur les provocations ou les ruptures d'engagement russes qui ont dû contribuer à l'arrêt des négociations. Depuis le début de la guerre, Moscou ne fait aucun effort pour s'intéresser sérieusement aux discussions. La vague d'invasion avait déjà déferlé pendant les entretiens d'Istanbul, un accord de Kiev sur le papier aurait sans doute signifié une capitulation.

Mais le dirigeant russe a assuré samedi qu'il était de bonne volonté: «Nous avions retiré nos troupes de Kiev, comme nous l'avions promis». Kiev aurait alors «jeté le projet d'accord dans les poubelles de l'histoire». Pas un mot indiquant que les troupes russes ont échoué dans leur tentative de s'emparer de la capitale ukrainienne.

Une «guerre contre l'Occident»

Ce que le Kremlin appelle une opération militaire spéciale depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février 2022 doit désormais être appelé «guerre contre l'Occident», estime le pouvoir russe. C'est ce qu'a déclaré samedi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, cité par Tass.

L'objectif de l'opération spéciale aurait été atteint et l'Ukraine aurait été démilitarisée avec succès. Les armes actuelles de l'Ukraine proviendraient principalement de l'Occident: «Une opération militaire spéciale a été lancée contre l'Ukraine, contre le régime de Kiev, a déclaré Dmitri Peskov. Aujourd'hui, c'est pratiquement une guerre entre Moscou et l'Occident.» Il a ajouté que l'Ukraine n'avait «aucune souveraineté».


Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la