En poste depuis 2016, Hartwig Fischer, 60 ans, avait déjà fait part de son intention de céder sa place l'année prochaine. Mais la pression sur cet historien de l'art allemand - premier non-Britannique à la tête du British Museum - ne cessait de monter depuis l'annonce le 16 août de la disparition d'une série de pièces des collections, certaines remontant au XVe siècle avant J.C.
«Il est évident que le British Museum n'a pas réagi comme il aurait dû aux avertissements de 2021 et au problème désormais totalement visible, a déclaré Hartwig Fischer, cité dans un communiqué. La responsabilité de cet échec incombe en dernier ressort au directeur.»
«La situation dans laquelle se trouve le musée est extrêmement grave. Je crois sincèrement qu'il surmontera cet épisode et qu'il en sortira plus fort mais j'en suis malheureusement arrivé à la conclusion que ma présence constitue une source de confusion», a-t-il ajouté.
Le président du musée, George Osborne, a précisé que la démission - à effet immédiat - avait été acceptée et qu'une direction par intérim serait mise en place en attendant la sélection d'un nouveau patron pour l'institution.
Hartwig Fischer «a agi honorablement en faisant face aux erreurs qui ont été commises. Personne n'a jamais douté de l'intégrité d'Hartwig, de son dévouement à son travail ou de son amour pour le musée», a déclaré George Osborne.
Pièces vendues en ligne
L'annonce d'une série de vols, des petites pièces non exposées conservées dans les réserves, a constitué une déflagration pour le musée. Fondé en 1753, ce dernier compte notamment dans ses collections de huit millions de pièces la célèbre pierre de Rosette, stèle ayant permis de déchiffrer les hiéroglyphes, et figure parmi les attractions les plus visitées du Royaume-Uni. Parmi les pièces disparues ou endommagées figurent notamment des bijoux en or, des pierres semi-précieuses ou de la verrerie datant du XVe siècle avant J.C. au XIXe siècle après J.C..
L'institution avait indiqué mi-août avoir renvoyé un employé, saisi la police et lancé une enquête indépendante afin de faire la lumière sur ces vols et en tirer les leçons. Elle avait assuré déployer tous les efforts possibles pour retrouver les pièces volées. Depuis, les révélations se multiplient au compte-gouttes dans la presse qui évoque jusqu'à 2000 objets disparus sur plusieurs années, certains se retrouvant en vente sur eBay pour des sommes modiques.
La presse a par ailleurs identifié l'employé comme étant Peter Higgs, un conservateur reconnu dans les milieux de l'art qui rejette toute responsabilité. La police de Londres a précisé avoir interrogé un homme, sans le nommer, mais n'avoir lancé aucune poursuite en l'état. La BBC a révélé l'existence d'emails d'un vendeur d'art, Ittai Gradel, alertant le musée de vols dès 2021. Selon certains médias, non seulement Peter Higgs aurait été laissé en poste malgré ces soupçons, mais il aurait été en plus récemment promu pour superviser les collections grecques comprenant les marbres du Parthénon, pièces au coeur d'une dispute ultrasensible car réclamées par la Grèce.
Malgré la volonté affichée par la direction du musée d'arriver à un accord avec Athènes, le gouvernement britannique est fermement opposé à tout retour de la frise de 75 mètres détachée du Parthénon, acquises selon lui légalement par le diplomate Lord Elgin. La loi encadre très strictement toute cession des pièces du British Museum.
L'annonce du vol d'objets de la collection a aussitôt relancé l'affaire. La presse britannique a cité des archéologues grecs y voyant un signe que les pièces venant de Grèce ne sont pas en sécurité à Londres, tandis que des élus britanniques ont répliqué en criant à l'opportunisme.
(AFP)