Artisans, locataires et montagnards
Qui seraient les perdants de la suppression de la valeur locative?

Le 28 septembre, les électeurs suisses se prononceront sur la suppression de la valeur locative. Blick montre qui profiterait et qui perdrait si ce système venait à changer.
Publié: 13:09 heures
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L'abolition de la valeur locative sera soumise au vote le 28 septembre.
Photo: Sven Thomann
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Lucien Fluri et Céline Zahno

La suppression de la valeur locative imputée est un sujet hautement sensible. Après des années de négociations au Parlement, une majorité conservatrice s'est dégagée en faveur du changement de système. Le peuple suisse se prononcera sur ce sujet le 28 septembre, et le résultat risque bien d'être serré.

Quelles seraient les conséquences d'un «oui» sur le portefeuille des locataires, des propriétaires, des jeunes et des cantons? Blick fait le point.

Qui sont les bénéficiaires ?

La plupart des propriétaires

Tout propriétaire vivant dans une maison ou un appartement en copropriété ne serait plus soumis à l'impôt sur les revenus locatifs. En contrepartie, il ne pourrait plus déduire les intérêts hypothécaires et les frais d'entretien de ses impôts.

En règle générale, toute personne qui paie actuellement plus d'impôt sur sa valeur locative imputée qu'elle ne peut économiser grâce aux déductions bénéficierait de cette suppression.

Les propriétaires âgés

Les propriétaires âgés, en particulier, profiteraient de la suppression de la valeur locative. Selon les données de l'administration fédérale, 88% des propriétaires paient moins d'impôts à la retraite, a souligné l'économiste Marius Brülhart dans une interview accordée à Cash. Beaucoup ont déjà largement remboursé leur hypothèque et ne peuvent donc plus bénéficier des déductions. Pour eux, la valeur locative est devenue une simple charge fiscale. Avec sa suppression, celle-ci disparaitrait.

Les jeunes et primo-accédants

Les primo-accédants bénéficieraient d'un avantage financier: ils obtiendraient une déduction des intérêts passifs, pendant les dix premières années. Les nouvelles constructions génèrent aussi généralement peu de frais d'entretien. Toutefois, les prix de l'immobilier pourraient globalement augmenter, car il deviendrait plus intéressant d'investir dans ce domaine.


Qui sont les perdants ?

Les propriétaires d'immeubles anciens

La réforme risque de pénaliser les propriétaires de biens immobiliers nécessitant d'importants travaux de rénovation. En effet, la possibilité de déduire les frais d'entretien et de rénovation dans le cadre de l'impôt fédéral direct serait supprimée. Les investissements dans l'efficacité énergétique, par exemple pour de nouveaux systèmes de chauffage ou une meilleure isolation, seraient également concernés.

Les artisans et le secteur du bâtiment

Les peintres, plombiers et couvreurs profitent du système actuel qui leur offrent des déductions fiscales. Certains craignent de voir leurs demandes diminuer sans valeur locative, les rénovations n'étant plus fiscalement avantageuses. Ils s'attendent par ailleurs à ce que la part de travail au noir augmente lors des travaux de rénovation, si les déductions ne peuvent plus être octroyées. L'Union suisse des arts et métiers (USAM) est pourtant favorable à la suppression de la valeur locative au niveau national, mais certaines sections cantonales ne sont pas de cet avis.

Les locataires

Bien que les locataires ne soient pas directement concernés par l'abolition de la valeur locative, une question se pose: comment la Confédération et les cantons vont-ils gérer le manque à gagner? Si des économies sont réalisées, les citoyens pourraient recevoir moins de prestations. Si les impôts augmentent, tout le monde paiera, y compris les locataires.

Les cantons de montagne

Les cantons de montagne comptent davantage de propriétaires que les villes. On y compte également de nombreuses résidences secondaires. Avec l'abolition de la valeur locative, ces cantons craignent une perte des recettes fiscales des propriétaires de résidences secondaires. Les huit cantons de montagne s'attendent à des déficits d'environ 125 millions de francs pour les résidences principales et de 153 millions pour les résidences secondaires. La situation financière sera donc de toute façon tendue.

Toutefois, les cantons pourraient introduire un nouvel impôt sur les biens immobiliers afin de compenser ces pertes. Les cantons de montagne, quant à eux, s'opposent à cette idée, estimant que cet impôt serait trop complexe et créerait de nouvelles possibilités de contournement.

Les caisses de l'Etat

Près de 2 milliards de francs: c'est le montant estimé du trou dans les caisses de la Confédération, des cantons et des communes si la suppression de la valeur locative est acceptée. Ce calcul se base sur le taux d’intérêt hypothécaire actuel de 1,4%. Neuf des 26 cantons s'opposent à l'abolition de la valeur locative, invoquant une situation financière déjà précaire.

Cependant, avec des taux d'intérêt avoisinant les 3%, les caisses de l'Etat devraient faire partie des gagnants. En effet, avec l'abolition de la valeur locative, les intérêts passifs ne pourraient plus être déduits comme c'est le cas aujourd'hui. Or, à l'heure actuelle, ce niveau de taux d'intérêt est imprévisible. 

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