Le tout petit «oui» au projet d'identité numérique, dimanche 28 septembre en votation, montre qu'une partie de la population s'inquiète des évolutions de la technologie. Il faudra en tenir compte, estime la presse après les votations de ce dimanche.
Le Conseil fédéral, tous les grands partis et les milieux économiques soutenaient sans réserve ce projet. Ces élites n’ont pas perçu les craintes et les interrogations qui touchaient toutes les générations et dépassaient les clivages politiques, écrit «Le Temps» sur son site internet.
Malgré un large soutien politique, ce résultat révèle les craintes des citoyens face à l’évolution technologique, renchérissent «24 heures» et la «Tribune de Genève». Leur confiance est limitée – y compris envers les autorités.
Souvenir du pass Covid
Les souvenirs du pass Covid, qui a compliqué la vie à ceux qui le refusaient, ont probablement pesé, eux aussi, dans l'issue du vote. Il ne faudra pas l'oublier après ce «oui de raison», ajoutent les deux journaux lémaniques. Le portail Watson appelle lui aussi à «ne pas oublier» les arguments des opposants.
Tout comme l'arrivée des voitures a mené à de nombreux morts sur la route, l'introduction d'une identité numérique mènera forcément à quelques fuites et abus, écrit-il. Il s'agira de les empêcher, de renforcer à chaque moment les outils de protection de nos données et de chasser et juger les criminels qui voudront en faire leur gagne-pain.
Et le portail d'appeler à continuer à lutter contre les dérives d'une surveillance de masse. «Une e-ID sans un cadre légal et pratique sécurisé serait en effet dangereuse», souligne-t-il.
Vivre sans e-ID
Le vote serré de dimanche «montre qu’il faut prendre très au sérieux les préoccupations» de nombreux Suisses, ajoute «Le Temps». L’explosion du numérique inquiète certains, alors que d’autres ne veulent simplement pas se voir imposer un système. Le Conseil fédéral doit démontrer qu'il sera bien possible de vivre sans e-ID.
Un avis partagé par les journaux du groupe ESH. Même si la future e-ID constitue «un gain indéniable de sécurité», elle doit rester une option et non devenir, à terme, une obligation de fait. Cette promesse faite par nos autorités doit absolument être tenue.
«Tout comme le maintien de l’argent liquide garantit une liberté de choix, il faut s’assurer que chacune et chacun puisse continuer à recourir, pour tous les services importants (...), à des alternatives non numériques, sans contrainte ni surcoût», écrivent «le Nouvelliste», Arcinfo et «La Côte».
«Le Temps» appelle également de ses voeux un grand débat autour de la digitalisation en Suisse. Dans de nombreux domaines, comme le dossier électronique du patient, le pays est très en retard, mais ce vote prouve qu’un passage en force ne marchera pas.
Une «gifle» pour Beat Jans
La presse alémanique souligne également à quel point la confiance dans un Etat numérisé est faible. L'administration a déjà trop souvent fait les gros titres avec des projets informatiques qui ont échoué, écrit la «Neue Zürcher Zeitung». Si la Confédération commet des erreurs avec l'e-ID, le peu de confiance accordé sera rapidement perdu.
Les titres alémaniques du groupe Tamedia parlent eux d'une «gifle» pour le conseiller fédéral Beat Jans, l'ensemble du gouvernement et le Parlement. Le très petit oui montre que près de la moitié de la population n'a pas confiance en leurs compétences sur les projets informatiques.
Traité comme un objet de «catégorie C»
Les opposants à l’e-ID, dont certains provenaient du camp des critiques des mesures anti-Covid, ont réussi à semer le doute, commentent les titres «CH Media», lundi. Les partisans, eux, n’ont pas été assez actifs pour dissiper les craintes liées à un État surveillant et collecteur de données.
Contrairement à leurs adversaires, ils n’ont pas donné l’impression de se battre avec passion pour leur cause. «Une large alliance transpartisane ne garantit pas une victoire acquise d’avance», peut-on lire. En coulisses, l’e-ID a été traitée comme un objet «de catégorie C», ce qui a failli se retourner contre ses promoteurs.