Les prix vont-ils baisser ou augmenter?
Voici l'impact de la réforme de la valeur locative sur l'immobilier

Fin septembre, la Suisse votera sur l'abolition de la valeur locative. Des experts s'expriment sur les conséquences possibles pour le marché immobilier.
Publié: 31.08.2025 à 11:52 heures
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Un immeuble d'habitation à Baden (AG).
Photo: imago images/Geisser
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Reto Zanettin
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La réforme de la valeur locative fera-t-elle augmenter ou baisser les prix de l'immobilier? Les documents officiels de la votation prévue fin septembre répondent vaguement à cette question. Avant une éventuelle entrée en vigueur, les déductions fiscales des frais d'entretien pourraient augmenter les commandes du secteur de la construction et ensuite les faire chuter. D'après le communiqué, des investissements dans les maisons individuelles sont aussi prévus au long terme.

Pourtant, le marché de l'immobilier évolue depuis des années. Les prix des maisons ne cessent d'augmenter, indépendamment de l'impôt sur la valeur locative ou de sa suppression. «L'immigration et la faiblesse persistante des taux d'intérêt entraînent un excédent constant de la demande: de plus en plus de locataires souhaitent devenir propriétaires», explique Claudio Saputelli, spécialiste immobilier chez UBS.

Selon lui, la réforme de la valeur locative donne une dynamique supplémentaire au marché immobilier, surtout si les taux d'intérêt restent bas. «Les nouvelles constructions ont tendance à devenir plus chères, car le capital libéré par l'allègement fiscal est en partie investi dans des biens plus chers», explique Claudio Saputelli.

Les conséquences de la réforme

Même si ce changement de système est approuvé en votation, l'allègement fiscal variera quand même d'un ménage à l'autre. Le tableau ci-dessous résume l'effet global de la réforme pour différents types de ménages. Ce calcul, établi par la société de conseil immobilier Wüest Partner, tient compte de la valeur locative, de la déduction pour l'entretien et des intérêts débiteurs ou hypothécaires – en moyenne à 1,5 %. Les données du tableau sont exprimées en francs.

Type de ménageRevenu brut du ménageFacture fiscale de la Confédération avant la réformeChangement dû à la réforme
Ménage monoparental104'0004000moins 500
Ménage familial161'0005000moins 700
Ménage senior81'0002000moins 500
Autres ménages115'0003000moins 400
Total113'0004000moins 500

Actuellement, tous les types de ménages économiseraient des impôts grâce au changement de système. Pour de nombreux ménages, la valeur locative est plus élevée que les intérêts débiteurs et la déduction forfaitaire pour l'entretien, selon les spécialistes de Wüest Partner. «Du moment qu'il n'y a pas de gros travaux d'entretien à faire, les propriétaires sont, en moyenne, gagnants avec une telle réforme.»

Cependant, tout le capital libéré ne sera probablement pas investi dans de nouveaux biens immobiliers, mais aussi dans d'autres dépenses ou investissements. C'est pourquoi Claudio Saputelli parle d'un afflux partiel vers des biens plus chers.

Selon l'expert d'UBS, la situation des nouvelles constructions sera bien différente pour les bâtiments anciens. Leur hausse de prix devrait ralentir, voir devenir négative au niveau régional. En effet, «ces biens immobiliers deviennent relativement moins intéressants, car les déductions fiscales pour leurs rénovations sont supprimées et leurs travaux d'entretien sont en partie reportés».

Le marché de l'immobilier enregistrera donc une évolution à deux vitesses: les prix des nouveaux bâtiments augmenteront, tandis que ceux des logements plus anciens ralentiront. C'est justement cet écart qui permettrait d'inverser la tendance, car au bout d'un certain temps, «les bâtiments anciens pourraient redevenir attrayants par rapport aux bâtiments neufs, au point que les locataires s'y intéresseront à nouveau et les achèteront davantage», estime Claudio Saputelli. Les locataires qui souhaitent acheter, mais qui ne peuvent pas financer une maison individuelle flambant neuve à deux millions de francs, opteront plutôt pour un bâtiment ancien bon marché.

Un coup de boost léger

Toutefois, cette évolution des prix de l'immobilier à deux vitesses dépend de la capacité financière et des exigences en matière de fonds propres. L'adaptation du régime fiscal pèsera-t-elle alors encore dans la balance? Probablement pas, selon Donato Scognamiglio, expert immobilier et président du prestataire de services immobiliers IAZI. Selon lui, l'effet de la réforme sur le marché immobilier est surestimé. «Les prix des logements recevront tout juste un coup de boost léger.»

Donato Scognamiglio estime que les vieilles maisons seront pénalisées, car elles deviendront moins attirantes à cause de la suppression des déductions pour l'entretien. De plus, les ménages tirant profit de la réforme sont composés de personnes âgées qui ne veulent plus être propriétaires. «De plus, les plus jeunes échouent dans le financement, surtout qu'un bien immobilier – modeste en comparaison – d'un million de francs suppose un revenu de 150'000 francs du ménage.»

L'immigration et les taux d'intérêt

Selon Claudio Saputelli, il est impossible de modéliser précisément l'ampleur de la hausse ou de la baisse des prix causée par la réforme de la valeur locative. Selon les experts, l'immigration et les taux d'intérêt restent des facteurs déterminants pour le marché immobilier. 

En effet, des taux d'intérêt en nette hausse limitent la demande, notamment celle des locataires. Si les taux d'intérêt augmentent, les locataires auront tendance à rester dans leur logement habituel et ne souhaiteront pas devenir propriétaires. De même, si les conditions se durcissent, les personnes pouvant tout juste accéder à la propriété ne pourront – ou ne voudront – plus suivre et n'auront plus envie d'acheter un bien immobilier.

«Au long terme, l'immigration et la rareté des terrains à bâtir détermineront l'évolution des prix de l'immobilier et prendront le pas sur l'effet de la valeur locative, qu'elle soit abolie ou qu'elle continue d'exister», explique Donato Scognamiglio.

Au cours des deux dernières décennies, la population Suisse a augmenté d'environ 70'000 personnes par an et nul ne sait encore si cette tendance changera à l'avenir. Une initiative populaire veut limiter la population résidente suisse à moins de dix millions de personnes.

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