Un secteur pas toujours transparent
Cadavres, rats morts, vitres… Des nettoyeurs pro se confient sur leur quotidien extrême

Des godes sous le lit, des sous-vêtements derrière le radiateur ou des rats morts dans l'armoire: les nettoyeurs d'appartements et de bureaux sont confrontés à toutes sortes de bizarreries. Deux professionnels du nettoyage se sont confiés à Blick.
Publié: 23.04.2023 à 21:32 heures
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Santina Bollhalder et son mari Mario en ont vu de toutes les couleurs dans leur travail de nettoyeurs
Photo: Siggi Bucher
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Sandro Zulian

«Dois-je ramasser le sextoy sous le lit et le poser sur le duvet?» Voilà le genre de questions incongrues qu'est amenée à se poser quotidiennement Santina Bollhalder. La trentenaire dirige l'entreprise de nettoyage Bollhalder Reinigung GmbH à Saint-Gall avec son mari, Mario.

Depuis sept ans qu'ils gèrent leur activité, ils n'ont toujours pas trouvé de solution définitive au dilemme du gode trouvé par terre.

Rat mort dans une armoire

Dans les deux cas Santina Bollhalder se retrouve embêtée: si elle déplace l'appareil, les clients sauront que le personnel de nettoyage l'a vu. Si elle laisse le vibromasseur par terre, les clients penseront que le nettoyage n'a pas été effectué sous le lit. Un dilemme, en somme.

Une fois, Santina Bollhalder a trouvé un slip derrière le radiateur dans un bureau qu'elle devait nettoyer. «Je ne sais pas ce qu'ils font là après le travail», sourit-elle en coin.

Mais Mario Bollhalder raconte que cela peut être encore pire: «Les appartements de personne souffrant d'accumulation compulsive, et où l'on ne voit plus le sol, sont les pires.» Les spécialistes du nettoyage y font d'abord éclater une «cartouche» dont la fumée tue la vermine.

«Ensuite il faut sortir de la zone dangereuse. Une fois que la fumée a fait effet, le sol est plein de cafards qu'il faut ensuite évacuer avec les déchets», continue d'expliquer Mario Bollhalder. Le pire qu'il ait retrouvé dans un cas pareil? Un rat mort dans une armoire.

Dernières traces d'une personne effacées

Dans un registre bien plus sombre, le nettoyage de scènes de crime est bien plus lourd émotionnellement. Bien qu'il existe des professionnels spécialisés dans ces situations, le couple Bollhalder s'acquitte aussi ponctuellement de ce travail. «Tu nettoies le sang et les cheveux et tu te dis: 'Ce sont les derniers restes d'un être humain que je nettoie.'», explique Santina Bollhalder.

Son mari ajoute: «On se demande pourquoi ces personnes restent parfois aussi longtemps mortes chez elles sans que personne ne s'en soucie.» Parfois, c'est le voisin qui donne l'alerte, parce que le sang du corps en décomposition dégouline du plafond ou que la puanteur se répand dans la cage d'escalier.

«Après le nettoyage, j'ai vomi», raconte Santina Bollhalder. Malgré ses quatre passages sous la douche, elle «[sentait] toujours la mort». Son mari Mario Bollhalder a dû une fois se débarrasser d'un canapé sur lequel quelqu'un était mort. «Nous étions alors en été, il faisait 33 degrés et nous avions toutes les vitres de la voiture baissées. Mais l'odeur, elle, reste même des jours après.»

Des gens nus et du travail au noir

Les nettoyages de façades et de fenêtres sont les plus amusants. Les employés sont alors suspendus à l'aide d'une plate-forme élévatrice et nettoient en hauteur. Seulement, «de nombreux bâtiments neufs n'ont pas de rideaux», souligne Mario Bollhalder en souriant.

«Depuis deux semaines, la date de nettoyage était annoncée dans la cage d'escalier», ajoute sa femme. «Mais ça n'empêche pas les habitants de sortir quand même nus de la douche et de te faire face», conclut Mario Bollhalder. À chaque fois, les nettoyeurs font signe aux habitants dans leur plus simple apparat à travers la vitre. Certains, l'air étonnamment décontracté, les auraient salués en retour. D'autres se sont mis à crier.

La transparence n'est pas toujours de mise dans le secteur du nettoyage. Le travail au noir est très répandu tout comme les bas salaires. Santina Bollhalder travaillait auparavant dans une autre entreprise dont le patron n'était pas très regardant sur les salaires. Il laissait son personnel faire le ménage sans convention collective de travail et ne considérait pas non plus le paiement des salaires comme une obligation.

Un jour, un employé de l'entreprise a demandé au patron s'il pouvait emprunter sa voiture pour aller voir sa sœur dans la vallée du Rhin. Le lendemain, le patron aurait fait irruption dans le bureau, en colère, et aurait demandé au collaborateur au téléphone où se trouvait sa voiture. La réponse: «Payez-moi mon salaire et je vous dirai où se trouve votre voiture.»

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