«On respire, mais pas de répit»
Que pensent les patrons suisses du nouvel accord douanier?

Les Etats-Unis réduisent les droits de douane sur les produits suisses à 15%. Mais qu'en pense l'économie suisse? Blick a interrogé des associations et des entreprises.
Publié: 18:05 heures
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Adrian Steiner, PDG de Thermoplan, se réjouit de ce nouvel accord douanier.
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Milena Kälin et Michael Hotz

Ça y est, c'est enfin arrivé: la Suisse et les Etats-Unis ont conclu un nouvel accord tarifaire. Les droits de douane seront réduits de 39 à 15%. A la suite d'une gaffe de l'Union démocratique du centre (UDC), les Etats-Unis, puis le Conseil fédéral, ont entériné l'accord. Il s'agit d'une déclaration d'intention non contraignante. La date précise de la réduction des droits de douane n'est pas encore connue, mais elle devrait intervenir dans les prochaines semaines, Guy Parmelin ayant parlé de 10 à 12 jours

Le patron de Thermoplan, Adrian Steiner, se réjouit de l'accord conclu avec les Etats-Unis. «Nous sommes très heureux d'enfin bénéficier des mêmes conditions cadres que nos concurrents européens», a-t-il déclaré à Blick. L'entreprise suisse, basée à Weggis, près de Lucerne, est le fournisseur exclusif des machines à café utilisées par toutes les filiales Starbucks. McDonald's fait également partie de ses clients. 

Le CEO se projette déjà: «La semaine prochaine, je me rends à Seattle pour rencontrer un client. J'ai retrouvé une vision claire et une perspective, ce qui me permet de négocier en conséquence», explique Adrian Steiner. Durant son déplacement, il discutera entre autres des possibilités d'implantation aux Etats-Unis. Car même des droits de douane de 15% représentent un défi pour le fournisseur de Starbucks. «Bien sûr, je préférerais des droits de douane encore plus bas, mais ceux-ci restent gérables.»

Swissmem ne lève pas l'alerte

«On respire, mais pas de répit», réagit l'association professionnelle Swissmem. Les droits de douane ont durement frappé les industries de la mécanique et de la tech. Les exportations des entreprises technologiques suisses ont chuté de 14,2% en quelques semaines. «En réalité, cette réduction ne fait que masquer le désavantage considérable dont souffrent les producteurs suisses par rapport à ceux de l'UE ou du Japon», explique Stefan Brupbacher, directeur de Swissmem. Il appartient désormais aux décideurs politiques d'améliorer les conditions cadres pour la place industrielle suisse.

Le problème: la pression sur l'industrie suisse de la technologie demeure extrêmement forte. Les chiffres d'affaires sont en baisse depuis neuf trimestres consécutifs. «La stabilité et la prévisibilité ne sont pas à l’ordre du jour», prévient Swissmem dans un communiqué.

Economiesuisse partage ce sentiment. «La situation actuelle doit servir d’avertissement aux responsables politiques.» Si l’association salue les droits de douane de 15%, elle souligne également que la faible croissance sur d’autres marchés d’exportation clés et les tensions géopolitiques pèsent encore sur l’économie locale. «Les droits de douane américains élevés ont non seulement considérablement affaibli la compétitivité des entreprises suisses sur le marché américain, mais ont aussi mis l'emploi en Suisse sous pression», poursuit l'association patronale. Les taxes douanières américaines de 15% continuent de peser sur les entreprises exportatrices suisses.

De plus, le franc fort et les coûts de production élevés persistent. La pression sur les entreprises reste donc forte, prévient Nicola Tettamanti, président de Swissmechanic. Malgré tout, «c’est une bonne nouvelle pour l’industrie MEMS. Pour la première fois, nous bénéficions sur le marché américain des mêmes conditions que nos concurrents européens», nuance-t-il.

Un peu de stabilité

Fabio Regazzi, président de l'Union suisse des arts et métiers et conseiller aux Etats du Centre, évoque lui aussi un «bon résultat, compte tenu des circonstances». «Bien sûr, l'idéal serait l'absence totale de droits de douane. Mais le fait qu'un accord ait été conclu aussi rapidement est positif.» La situation, marquée jusqu'ici par l'incertitude, était très difficile, explique-t-il, mais «une certaine stabilité devrait maintenant revenir». «Cela nous rend plus optimistes pour l'avenir.» Mais les défis demeurent.

Le commerce suisse se félicite également de l'accord conclu dans le différend tarifaire avec les Etats-Unis. «Cette solution envoie un signal fort à la Suisse en tant que plaque tournante du commerce, et offre aux entreprises la visibilité dont elles ont tant besoin pour planifier leurs activités», déclare le directeur de l'Association suisse des commerçants, Kaspar Engeli. Le nouvel accord renforce ainsi la compétitivité internationale de la Suisse.

Ce sont surtout les industries horlogères, médicales, des machines, électriques et métallurgiques qui devraient profiter de la baisse des droits de douane, a précisé UBS en réponse à l'agence de presse AWP. Avec la baisse des droits de douane, le désavantage concurrentiel pour les branches concernées, notamment par rapport à la concurrence de l'UE, disparaît également, a-t-on appris auprès de la Banque cantonale de Lucerne.

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