L'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma) est en passe de devenir l'une des plus grandes et plus puissantes autorités de Berne. Ses effectifs et domaines d'activité ne cessent d'augmenter. Lors de sa création, l'organisation comptait 320 collaborateurs. Un chiffre qui a doublé à la fin 2024, avec 638 emplois à temps plein.
Et cela n'est pas près de s'arrêter: les ressources du chien de garde du marché financier doivent continuer à être développées «en fonction des besoins». Si le champ politique n'impose pas de limites, le nombre de postes devrait dépasser la barre des 1000 dans quelques années.
Mais est-ce que la Finma est-elle vraiment à même de remplir son exigeante mission de surveillance? Passons au crible ses plus hauts niveaux de hiérarchie.
Des poids plumes
Marlene Amstad, 57 ans, est à la tête de l'organe de direction le plus élevé depuis 2021: le conseil d'administration (CA). Malgré la débâcle de Credit Suisse, la professeure a été confirmée par le Conseil fédéral pour un nouveau mandat. Elle fait ainsi partie des derniers responsables restants du crash bancaire de 2023, qui a ébranlé la réputation internationale de la place financière suisse.
La semaine dernière, le Conseil fédéral a élu une nouvelle membre au sein de cet organe: la pénaliste genevoise Katia Villard. Spécialisée dans le blanchiment d'argent, cette quadragénaire est professeure associée de droit pénal à l'Université de Genève depuis 2022, ainsi que directrice du Centre de droit bancaire et des marchés financiers de l'université depuis 2023. Malgré son expérience, elle reste toutefois un poids plume dans le milieu.
Katia Villard sera l'une des trois femmes professeurs au sein du conseil d'administration de la Finma. Face aux femmes universitaires, il y a cinq hommes issus de la pratique. Mais après analyse des différents parcours, les praticiens bancaires expérimentés restent peu nombreux. En effet, aucun membre du CA n'a jamais siégé dans une direction de groupe d'une banque d'importance systémique.
Un manque de pratique
On peut se demander si le comité ne manquerait pas d'une compréhension approfondie des mécanismes d'une grande banque. Notamment en cas de crise, lorsque des milliards se perdent dans le négoce ou que des liquidités s'écoulent en quelques heures. Compte tenu de la «concentration unique de risques» que représente UBS pour la Suisse – ce sont les mots du directeur de la Finma, Stefan Walter – ce manque de compétences interroge.
La Finma a connu des leaders plus solides, comme entre 2006 et 2010, lorsqu'Eugen Haltiner la présidait. Cet économiste a été membre durant plusieurs années de la direction du groupe UBS, et a joué un rôle central dans la fusion de l'ancienne Bankgesellschaft avec la Bankverein. Même au niveau de la direction de la Finma, l'expérience pratique est quasi inexistante. Stefan Walter n'a jamais acquis d'expérience opérationnelle dans une banque. Il a travaillé à la Réserve fédérale américaine, puis à la Banque centrale européenne, où il a mis en place et dirigé la surveillance des banques d'importance systémique de la zone euro.
Pour couronner le tout, la direction est affaiblie depuis plusieurs mois. Trois membres n'exercent leurs fonctions qu'à titre intérimaire, dont le directeur adjoint et les responsables des deux domaines clés que sont les banques et les assurances. Formellement, c'est le CA de la Finma qui est responsable de l'attribution de ces postes.
Le Département fédéral des finances (DFF), dirigé par Karin Keller-Sutter, est responsable de la nomination des membres du conseil d'administration. Celui-ci propose au Conseil fédéral une personne à élire. Mais au préalable, le comité de nomination du conseil d'administration de la Finma peut également soumettre des propositions au DFF.
Mauvaise réputation dans la branche
Par ailleurs, la Finma ne jouit pas de la meilleure réputation dans la branche. Rien de très étonnant, au vu du type de mission confiée à l'autorité. Son directeur, Stefan Walter, est considéré comme un surveillant strict, qui adopte une ligne dure à l'égard d'UBS. Une attitude saluée dans de larges cercles, y compris dans le monde bancaire. Sauf que l'équipe de Stefan Walter ne se contente pas uniquement de sévir contre les grandes institutions. Elle est aussi dure avec les plus petites.
Cela suscite des critiques. A commencer par le président de la Swiss Fintech Alliance, Michael Brüggler. Celui-ci représente les petites start-ups fintech qui disposent – ou souhaitent obtenir – une licence bancaire dite «light». Il a récemment accusé la Finma d'être responsable du fait que cette jeune catégorie de licence n'a pas encore décollé. Selon lui, les fonctionnaires de la Finma feraient traîner les procédures d'inscription durant des années. «Entre-temps, certains ont retiré leur demande et des employés ont dû être licenciés.»
Dans une prise de position, l'autorité répond que même pour les fintech, «certains critères doivent être remplis». Avant d'ajouter que tous les demandeurs ne sont pas en mesure de les remplir facilement. Elle affirme toutefois s'efforcer d'améliorer ses processus et d'accélérer les procédures. Cela peut aussi signifier mettre fin plus rapidement à une «procédure sans issue».