Lorsque la pandémie de Covid-19 a commencé, il a fallu faire vite. Sous l'égide du ministre des Finances de l'époque, Ueli Maurer, la Confédération a accordé des milliards d'aides à l'économie. Les entrepreneurs pouvaient alors demander un crédit allant jusqu'à 500'000 francs. Les banques ont ainsi accordé près de 138'000 crédits pour un total de près de 17 milliards de francs, pour lesquels la Confédération se portait garante.
Cinq ans plus tard, de nombreuses entreprises peinent encore à rembourser les montants empruntés. C'est ce que révèle une nouvelle analyse du Contrôle fédéral des finances (CDF): à ce jour, 9,2 milliards de francs ont été remboursés. L'introduction d'un taux d'intérêt sur ces crédits en 2023 a sans doute incité certaines entreprises à accélérer leurs remboursements.
Parallèlement, la Confédération a dû honorer ses garanties à hauteur d'environ 1,3 milliard de francs. Ainsi, à la fin de l'année 2024, 65'015 crédits restaient encore en cours de remboursement, pour un total de plus de 6 milliards de francs.
Des amortissements de 1,7 milliards?
Bonne nouvelle pour les entreprises concernées: elles bénéficient, encore aujourd'hui, d'un certain délai. Depuis mars 2022, les banques ont commencé à réclamer les premiers remboursements, le montant maximal des crédits accordés ayant été progressivement revu à la baisse. La durée restante des prêts est en général de quatre ans, pouvant aller jusqu'à six ans dans les cas les plus difficiles.
Mais cette situation a déjà plongé plusieurs entreprises dans la difficulté: malgré l’obligation légale de rembourser leur crédit Covid, 68 millions de francs restent impayés, un montant appelé à augmenter dans les prochains mois. Pour éviter une hausse trop forte des défauts de paiement, les banques ont le devoir d'accorder aux entreprises en difficulté un délai supplémentaire de six à douze mois avant d’exiger le remboursement.
Si plus de 6 milliards de francs restent encore impayés, la Confédération prévoit néanmoins des pertes estimées à 1,7 milliard de francs. A l'époque, l'ancien conseiller fédéral Ueli Maurer tablait déjà sur un taux de défaut d’environ 10% des crédits. Une estimation qui demeure valable, tant qu'aucune récession majeure ne survient.
Environ 4800 plaintes pénales déposées
A cela s'ajoutent les pertes qui résulteront de cas de fraude:
- Jusqu'à fin janvier, la Confédération a enregistré 17'000 cas suspects. Parmi eux, environ 13'300 cas ont pu être clôturés pour le moment.
- Dans environ 4800 cas, une plainte pénale a été déposée. Plus de 3000 procédures sont encore en cours, 1800 cas sont clos.
- Entre-temps, des entreprises poursuivies ont obtenu illégalement des crédits pour plus de 150 millions de francs. La question de savoir combien de cet argent pourra être récupéré reste ouverte.
- La plupart des plaintes concernent l'utilisation illicite des aides financières. En effet, certains entrepreneurs les ont utilisées pour des investissements au lieu de les utiliser pour couvrir des pertes de revenus.
- Rien qu'au deuxième semestre 2024, 142 entreprises ont été enregistrées avec des garanties promises pour un total de 21,5 millions de francs, avec des distributions de dividendes pour un total de 21,2 millions. D'autres ont fait de fausses déclarations de chiffres d'affaires antérieurs et certaines ont demandé plusieurs fois des crédits.
Comme l'économie avait besoin d'un soutien immédiat, le Conseil fédéral a accepté de revoir à la baisse les critères d’examen des demandes – en assumant les pertes qui en découleraient. En contrepartie, un quart des entreprises suisses ont pu obtenir un crédit, ce qui leur a permis, dans la plupart des cas, de traverser la pandémie sans sombrer.