Notre sondage exclusif
L'accord douanier avec Trump est fortement rejeté par les Suisses

L'accord douanier entre la Suisse et les Etats-Unis est largement rejeté par la populations suisse. C'est ce que montre un sondage exclusif réalisé par Sotomo pour Blick. Le scepticisme gagne même les électeurs de l'UDC. L'enquête révèle encore d'autres surprises.
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Donald Trump nous assure une réduction des droits de douane. Mais la majorité des Suisses n'ont pas envie de ce deal.
Photo: Evan Vucci
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Joschka Schaffner et Sven Altermatt

Un abaissement de 39 à 15%! L’accord douanier négocié avec l’administration américaine du président Donald Trump semble proche d’aboutir, si l’on en croit le Conseil fédéral. Mais en coulisses, les tractations se poursuivent. Une fois les détails finalisés, le Parlement devra se prononcer, et il est probable que la population suisse soit finalement amenée à trancher la question dans les urnes.

Or un premier constat s’impose: les Suissesses et les Suisses se montrent très réservés face au projet d’accord. Selon un sondage exclusif réalisé par l’institut Sotomo pour Blick, même les électeurs de l’Union démocratique du centre (UDC) ne partagent pas l’enthousiasme affiché par leur parti. Si la votation avait lieu aujourd’hui, le camp du conseiller fédéral Guy Parmelin essuierait un sérieux revers.

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Un vote populaire à haut risque

Mi-novembre, le ministre de l’Economie Guy Parmelin et la directrice du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO), Helene Budliger Artieda, ont annoncé s’être accordés avec Washington sur une déclaration d’intention en vue d’un accord douanier. Si un abaissement des droits de douane est prévu, il devrait toutefois s’accompagner de concessions: suppression des taxes sur tous les produits industriels américains, nouveaux contingents pour la viande en provenance des Etats-Unis, davantage d’achats d’armement outre-Atlantique et abandon d’une éventuelle taxe sur le numérique.

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Seule l’UDC a salué l’accord avec emphase: «Bien joué, conseiller fédéral Parmelin!», publiait le parti conservateur sur ses réseaux sociaux. Les autres partis se sont en revanche montrés plus mitigés, évoquant au mieux un «succès d’étape» (à droite), au pire un «contrat de soumission» (à gauche). De quoi annoncer la couleur pour le débat à venir aux Chambres fédérales.

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Si un référendum devait être lancé, la situation deviendrait réellement périlleuse pour le Conseil fédéral. Et pour cause, 69% des personnes interrogées se disent plutôt ou totalement opposées à l’accord. Fait particulièrement parlant: la moitié des sympathisants UDC sont opposés à l’accord. Seuls les électeurs du Parti libéral-radical (PLR) y sont majoritairement favorables (56%).

Pour Michael Hermann, directeur de Sotomo, l’ampleur du rejet surprend. «Que la population regarde cet accord avec scepticisme, je m’y attendais», explique le politologue. «Mais la clarté de l’opposition est frappante.» La proximité idéologique supposée entre la Suisse et les Etats-Unis est souvent évoquée, dit-il. «Mais un point est régulièrement sous-estimé: les Suissesses et les Suisses n’apprécient pas qu’un rapport de force soit imposé sans ménagement.»

Selon lui, ce schéma est récurrent lorsque Washington met Berne sous pression. «Cela provoque une réaction allergique chez la population.» D’où le rejet massif de l’accord. «On entend souvent dire qu’avec Trump, il n’y a pas d’autre façon de négocier. Mais les citoyens refusent de normaliser son style de pouvoir et certaines tendances impérialistes.»

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Peu d’affection pour les produits et les géants technologiques américains

La méfiance apparaît lorsqu’on aborde d’autres détails de l’accord. Si l’électorat suisse accepte de justesse de s’aligner sur les Etats-Unis en matière de sanctions à l’encontre d’Etats tiers, il désapprouve très clairement le reste.

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La plus forte résistance concerne le transfert de données vers les Etats-Unis: plus des trois quarts des personnes interrogées rejettent clairement l’idée d’accorder davantage de liberté aux entreprises américaines dans ce domaine. Le refus est également marqué concernant l’augmentation des achats d’armement en provenance des Etats-Unis, même si cela pourrait, en théorie, améliorer les relations avec Washington.

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Les quotas d’importation de viande américaine sont en outre intolérables pour 65% des sondés. Mais lorsqu’il s’agit d’achat en magasin, le refus est encore plus massif: plus de 95% des sondés qu’ils refuseraient d’acheter de la volaille américaine proposée en rayon. L’hypothèse d’une arrivée du très controversé «poulet au chlore» semble particulièrement rebuter les consommateurs.

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La Suisse a-t-elle bien négocié?

Le Conseil fédéral et ses négociateurs se sont-ils montrés suffisamment fermes? Un résultat mérite en tout cas d’être relevé: près d’une personne sur deux estime que la Suisse s’en est moins bien sorti que les négociateurs européens.

L’autre moitié juge les compétences helvétiques comparables à celles de nos voisins ou ne se prononce pas. Mais la méfiance envers les représentants suisses reste moins forte que la crainte suscitée par les imprévisibles volte-faces de Donald Trump.

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Une majorité s’attend d’ailleurs à ce que Washington ne respecte pas pleinement l’accord. Ce pessimisme n’est toutefois pas partagé par tout le monde: les sympathisants UDC et PLR se montrent nettement plus confiants quant au maintien de la baisse des droits de douane. Les jeunes interrogés accordent, eux aussi, davantage de confiance à l’accord.

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Pour Michael Hermann, directeur de Sotomo, la différence de point de vue entre l’opinion publique et la classe politique est logique: «La population n’a aucune obligation diplomatique lorsqu’elle évalue un accord avec les Etats-Unis. Elle peut dire librement ce qu’elle pense du comportement de Trump.»

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Les responsables politiques, eux, doivent raisonner en termes d’intérêt national. «Leur priorité est le bénéfice immédiat pour le pays. Et une baisse rapide des droits de douane est objectivement intéressante, notamment pour éviter une crise économique.» Cela ne signifie pas pour autant qu’ils seront applaudis.

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Un «contrat de soumission», vraiment?

A l’UDC, l’expression «contrat de soumission» est devenue un élément de langage récurrent de la rhétorique de lutte contre l’accord avec l’Union européenne. Mais cette fois, ce sont les Vert-e-s qui s’en sont saisis, affirmant que le véritable contrat de soumission était celui conclu avec les Etats-Unis.

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Et surprise: la population leur donne raison. Pour 70% des personnes interrogées, le texte comporte effectivement une dimension de soumission. A titre de comparaison, ils ne sont que 45% à percevoir l’accord avec l’UE sous le même angle. «Les grands blocs politiques suscitent en Suisse une méfiance générale», résume Michael Hermann. L’Union européenne n’échappe pas à cette réserve. «Mais dans l’opinion publique, elle est clairement perçue comme une partenaire plus fiable que les Etats-Unis.»

Au total, 9284 personnes ont participé à cette enquête. Celle-ci a été réalisée entre les 24 et 29 novembre 2025, au moyen d’un échantillon représentatif de la population résidente suisse. La marge d’erreur est de 1,6 point de pourcentage. 

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