Marc Waldispuehl ne comprend plus ce qui se passe. Depuis plus de six décennies, le Camping-Club Région d'Yverdon gère le camping Le Pécos à Grandson (VD). Ses emplacements au bord du lac de Neuchâtel sont particulièrement prisés des Suisses-allemands. Mais fin 2025, tout s'arrêtera: la commune met l'association dehors. A partir de 2027, elle veut collaborer avec le TCS.
Les exploitants actuels refusent toutefois de partir sans se battre, contrairement à ce qu'espérait Grandson. Selon eux, l'appel d'offres s'est déroulé de manière irrégulière et le TCS a été injustement favorisé, reproche l'association à la commune. «Nous nous battrons jusqu'au bout», affirme le président Marc Waldispuehl à Blick. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que le TCS provoque des tensions en Suisse romande.
Profiter du boom du camping
Que ce soit dans le canton de Vaud, à Fribourg ou à Neuchâtel, les communes romandes entendent tirer parti de l'essor du camping. Pour offrir une expérience quatre étoiles aux touristes, de plus en plus de localités confient leurs parcelles au TCS. Avec le «glamping», soit le camping version luxe, l'association de mobilité vise à attirer davantage de visiteurs au bord du lac de Neuchâtel.
Grandson se voit clairement comme l'une de ces futures pépites. Le village de 3000 habitants veut attirer davantage de clients vers son château et sa rive pittoresque, bordée par un port de plaisance.
L'attribution au TCS est au cœur de cette «vision à long terme», explique la commune interrogée par Blick. Aujourd'hui, les trois campings de Grandson sont encore principalement orientés vers les emplacements de longue durée.
La fin des campings de longue durée?
Pour que Grandson profite davantage des campeurs de passage, l'un des trois exploitants devait être sacrifié. Et c'est le camping-club de Marc Waldispuehl qui en fait les frais. Son terrain, facile d'accès et proche du centre du village, offre selon la commune un «immense potentiel» pour le tourisme de courte durée.
Le conflit entre le camping-club et Grandson se joue désormais au niveau de la conciliation des loyers. Une solution n'est pas attendue pour l'instant, selon les deux parties. Si aucun accord n'est trouvé d'ici fin mars, le dossier pourrait finir devant la justice.
Pour le camping-club, qui gère deux autres sites dans la région en plus du Pécos, l'enjeu dépasse le simple principe. Marc Waldispuehl et ses collègues craignent que la reprise par le TCS ne mette en péril tant les collaboratrices actuelles que les clients permanents.
Le restaurant, qui emploie une vingtaine de personnes, pourrait lui aussi perdre son bail. «Le restaurateur est locataire depuis 25 ans. Il est primordial pour nous qu'il obtienne un contrat avec la commune ou le TCS après le changement», précise Marc Waldispuehl.
De nouvelles bases avec le TCS
En riposte, Marc Waldispuehl et son équipe dénoncent une configuration problématique: la nouvelle stratégie touristique de la commune repose en réalité sur une expertise… réalisée par le TCS. L'association avait mené cette analyse il y a quatre ans, à la demande de Grandson.
Pour Marc Waldispuehl, il s'agit d'un conflit d'intérêts manifeste. «Déjà à l'époque, notre avocat avait mis en garde contre le fait que la commune faisait appel à un concurrent», rappelle-t-il. Selon lui, la commune n'a jamais envisagé une alternative. Le fait que le TCS ait finalement remporté l'appel d'offres ne surprend donc pas le camping-club. «C'était la volonté de la commune dès le départ.»
Grandson n'écarte qu'à moitié ce grief. La commune reconnaît que l'analyse du TCS a servi de base à la stratégie, mais insiste: «Le TCS n'a participé ni directement ni indirectement à la préparation de l'appel d'offres public.»
Pour le Camping-Club et son avocat, l'argument ne tient pas. «Les plans de la commune comportent un vice de forme, affirme Marc Waldispuehl. Nous allons le démontrer devant la justice.»
Le restaurant pourrait rester
Il faudra encore quelques mois pour savoir si le dossier atterrira effectivement devant les tribunaux. On ignore également l'impact que le changement d'exploitant aura sur les campeurs permanents. Le TCS précise à Blick qu'il attendra la finalisation des contrats et l'obtention du permis de construire avant de trancher. Mais avec son nouveau concept, destiné à «un public large aux besoins variés», il y aura nettement moins de places pour les locations longue durée.
La commune évoque, elle aussi, une «clientèle diversifiée». Pour les emplacements saisonniers existants, elle promet une «transition respectueuse et attentionnée», sans donner plus de détails.
Une reprise par le TCS reste possible, tant pour les cinq collaborateurs actuels que pour le restaurant très apprécié. Mais rien n'est encore signé, rappelle également la commune.