Pierre-Yves Maillard dit non à l'assouplissement de la loi travail
«Les journées de travail seront encore plus longues, le temps libre plus court»

Le Conseil national se prononcera la semaine prochaine sur une libéralisation de la loi sur le travail, prévoyant plus de flexibilité pour le télétravail, des journées plus longues et du travail dominical occasionnel. Les syndicats montent se déchainent.
Publié: 15:24 heures
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Dernière mise à jour: 15:58 heures
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Le patron des syndicats Pierre-Yves Maillard met en garde contre un assouplissement de la loi sur le travail.
Photo: Thomas Meier
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Ruedi Studer

Le patron des syndicats Pierre-Yves Maillard tire la sonnette d'alarme. «Si ce projet passe, les journées de travail seront encore plus longues et le temps libre encore plus court», avertit le conseiller aux Etats socialiste. «Les week-ends et le quotidien familial de plus de deux millions de travailleurs sont menacés.»

L'élément déclencheur des craintes de Pierre-Yves Maillard? L'adaptation de la loi sur le travail, que le Conseil national traitera mardi prochain. Il s'agit de mesures visant à augmenter la flexibilité du travail à domicile. Cela concerne les employés qui fixent eux-mêmes leurs horaires de travail et qui travaillent partiellement en dehors de l'entreprise, par exemple à domicile ou dans un lieu de co-working.

Jusqu'à 17 heures par jour de travail

La Commission de l'économie du Conseil national propose plusieurs modifications pour cette modalité de travail:

  • Aujourd'hui, les employés ont droit à un maximum de 14 heures de travail par jour, pauses et heures supplémentaires comprises. Pour le télétravail, le cadre temporel doit être étendu à 17 heures.
  • Le temps de repos entre deux journées de télétravail sera limité à neuf heures, mais il devra toujours être de onze heures en moyenne. Celui qui travaille jusqu'à 22 heures peut donc reprendre le travail le lendemain à 7 heures. Aujourd'hui, il faut attendre 9 heures. Le temps de repos peut toutefois être interrompu pour des «activités urgentes».
  • Les employés pourront à l'avenir travailler jusqu'à cinq heures sans autorisation pendant six dimanches par an au maximum. En contrepartie, ils bénéficient d'une majoration de salaire de 50%.
  • Tous les employés ont désormais le droit de ne pas être joignables pendant le repos quotidien et les dimanches.

«La dérégulation détériore les conditions de travail»

Pour que ces mesures soient mises en place, il faudra d'abord un accord entre employés et employeurs. Mais pour Pierres-Yves Maillard, il est clair que «cette dérégulation détériore les conditions de travail sur un large front».

Le marché du travail, déjà flexible, sera encore plus libéralisé. «Aujourd'hui déjà, de nombreux travailleurs font des heures supplémentaires, même pendant leur temps de repos. Mais au moins, la loi les protège contre les exigences abusives de l'employeur», poursuit le conseiller aux Etats. «Avec cette réforme, les employés devront être à disposition presque 24 heures sur 24.»

En théorie, les employés auraient la possibilité de s'y opposer. «En réalité, l'employeur est en position de force, ce qui rend possible des journées de 17 heures», dénonce-t-il. «Les conséquences de cette révision? Davantage de stress, de troubles du sommeil et de burn-out.»

Une plus grande liberté pour les employés?

Le président du Parti libéral-radical (PLR) Thierry Burkart avait déjà lancé cette révision en 2016 avec une intervention. «Je souhaite renforcer le travail à domicile et permettre ainsi aux gens d'avoir plus de flexibilité dans leur vie quotidienne», avait-il expliqué. Pour lui, il ne s'agit pas d'augmenter le temps de travail, mais d'assouplir le cadre temporel pour les travailleurs.

Cela pourrait être avantageux pour les familles. Ainsi, quelqu'un pourrait par exemple répondre à ses e-mails tôt le matin avant de s'occuper de ses enfants en âge scolaire. Et également interrompre son travail quelques heures à midi ou après l'école afin d'être présent pour les enfants. La nouvelle réglementation pourrait permettre de faire aussi plus de sport. «Aujourd'hui, celui qui répond encore à des e-mails entre 21 et 22 heures est en infraction avec la loi, cela doit changer.»

La révision ne ferait que légaliser ce qui est déjà vécu dans la réalité. «La flexibilisation n'est pas une obligation, mais un droit supplémentaire pour l'employé. Il obtient ainsi une plus grande liberté d'organisation», explique Thierry Burkart. «Rien ne change en ce qui concerne la durée maximale du travail de 45 heures par semaine!»

Les syndicats au pied du mur

Pierre-Yves Maillard redoute une dérive. Le projet s'inscrit dans une série d'interventions par lesquelles les bourgeois ont tenté d'assouplir la loi sur le travail, toujours au détriment des travailleurs.

«Nous combattrons ces détériorations par tous les moyens», souligne-t-il. «Si le Parlement ne revient pas à la raison, le peuple devra décider.» Un référendum devrait donc également être à l'ordre du jour.

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