Donald Trump ne conclut aucun accord sans obtenir de concessions de la partie adverse. Il en va de même pour l'accord douanier entre la Suisse et les Etats-Unis. La Suisse a fait quelques concessions pour que le président américain abaisse ses droits de douane de 39 à 15%.
Jusqu'à présent, l'attention s'est concentrée sur les 200 milliards d'investissements aux Etats-Unis promis d'ici 2028 par les entreprises suisses, parmi lesquelles figurent des multinationales et des entreprises traditionnelles de renom. Mais finalement, les exigences de Trump semblent encore plus élevées.
La Suisse doit entre autres acheter de la viande produite aux Etats-Unis. Le ministre de l'Economie Guy Parmelin et la secrétaire d'Etat Helene Budliger Artieda ont confirmé vendredi que la Confédération accordait des quotas tarifaires aux produits carnés américains. On parle là de 500 tonnes de bœuf, 1000 tonnes de viande de bison et 1500 tonnes de volailles.
L'accord aborde également la pratique controversée du traitement des poulets au chlore. Ce procédé consiste à désinfecter les poulets après l'abattage dans une solution chlorée diluée afin de tuer les germes. Cette méthode est actuellement interdite en Suisse. Et donc l'importation de tels poulets l'est également. Il faudrait donc une modification de la loi. Selon Guy Parmelin, les discussions avec les Etats-Unis concernant le poulet chloré ne sont pas terminées.
Personne ne veut de viande américaine
Mais ce n'est pas tout. L'élément principal de cette histoire est le suivant: ce n'est pas la Confédération elle-même qui doit acheter cette viande, mais des entreprises suisses. Après tout, le libre marché est en jeu. Mais le secteur de la distribution est-il vraiment intéressé par ces produits américains? Blick s'est renseigné auprès des supermarchés suisses. Le constat est sans appel: personne ne veut de cette viande américaine.
Migros se réjouit que la Suisse se soit mise d'accord avec les Américains sur un accord douanier. Toutefois, le géant orange précise: «L'aspect concernant la viande en provenance des Etats-Unis n'a aucune influence sur l'approvisionnement de notre assortiment. Nous continuons à miser sur la viande suisse chaque fois que c'est possible.»
Même son de cloche chez Coop, son plus grand concurrent: il n'y a actuellement aucun besoin de produits carnés américains. «La viande suisse est clairement prioritaire chez nous.»
«Ce n'est pas une option pour nous»
Même les discounters, qui sont particulièrement sensibles aux prix sur le marché très concurrentiel de la viande, ne sont pas chauds pour le poulet, le bœuf ou le steak de bison d'outre-Atlantique. «L'intégration de produits de viande fraîche en provenance des Etats-Unis n'est pas une option pour nous», déclare Lidl à la demande de Blick.
De son côté, Aldi communique: «Actuellement, nous sommes très satisfaits de nos fournisseurs de viande et de leurs origines.» Et Denner annonce: «Nous suivons attentivement les développements, mais il n'est pas prévu d'importer de la viande des Etats-Unis.»
Tous les détaillants insistent sur la priorité donnée à la viande suisse. Une grande partie des clients veille à son origine, mais comme les producteurs locaux ne peuvent satisfaire la demande pour toutes les variétés, les supermarchés se tournent parfois vers l’importation.
Pour le bœuf, 80% de la viande provient de Suisse, pour le poulet, ce sont près de 65%. Les commerçants achètent de la viande de bœuf en Allemagne, les morceaux nobles proviennent en partie d'Amérique du Sud. Et la volaille importée provient souvent du Brésil, de Hongrie ou également d'Allemagne.
Trop d'hormones
Certes, la Suisse importe déjà de la viande des Etats-Unis, mais cela ne joue qu'un rôle secondaire. Cela ne devrait pas changer à l'avenir, estime Philippe Häberli de l'association interprofessionnelle Proviande.
Le spécialiste de la branche cite deux raisons à cela: «D'une part, la viande de bœuf en provenance des Etats-Unis n'est en aucun cas bon marché. Le prix d'achat élevé se répercute ensuite sur les rayons de vente ou sur le menu.» D'autre part, la viande américaine est nettement plus chargée en hormones.
La concentration d'hormones doit être indiquée en conséquence lors de la vente. «Des sondages montrent que cela a tendance à décourager les clients suisses. Lors de l'achat de viande, ils font bien plus attention à la localité et au bien-être des animaux», poursuit Philippe Häberli.