Accusation de diffamation
Le «roi de Suisse» se prend (encore) le bec avec les autorités

Le député cantonal lucernois Josef Schuler exige que les terrains sans propriétaire reviennent à la collectivité. Il est particulièrement dérangé par l'autoproclamé «roi de Suisse», qui est légalement enregistré comme propriétaire de plusieurs terrains.
Jonas Lauwiner, autoproclamé «roi de Suisse», serait propriétaire de 149 terrains et 83 routes dans neuf cantons.
Photo: Zvg
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Anna Clara Kohler

Depuis des années, Jonas Lauwiner fait la Une des journaux. Le Lucernois de 31 ans s'est fait un nom en s'appropriant des terrains qui n'appartenaient à personne. Il serait propriétaire de plus de 200 chemins, routes et bâtiments. Après s'être fait appeler «roi de Berthoud», il s'est, depuis, autoproclamé «roi de Suisse».

Sa manière de faire crée la polémique. En juin dernier, Josef Schuler, député socialiste au Grand Conseil lucernois, a interpellé le gouvernement afin de demander plus de transparence lorsque des terrains n'ont plus de propriétaires enregistrés. Au grand dam de Jonas Lauwiner. «Il veut m'exproprier» s'est plaint le «roi de Suisse» auprès du «Luzerner Zeitung». «Au Grand Conseil, il a la vie facile, il lui suffit de dire qu'il faut m'arrêter.»

114'000 mètres carrés de terrain

Les terrains et les routes peuvent se retrouver sans propriétaire lorsqu'une personne renonce à ses droits de propriété, si une entreprise est mise en faillite ou si une personne décède sans laisser d'héritiers derrière elle. Moyennant une petite somme, tout citoyen helvétique peut présenter une déclaration d'appropriation afin d'être enregistré comme propriétaire. Selon l'interpellation de l'élu socialiste, cosignée par 20 membres du Parlement, Jonas Lauwiner posséderait 149 propriétés réparties dans neuf cantons différents, représentant 114'000 mètres carrés de terrain. A cela s'ajoute 83 routes, le tout acquis «presque gratuitement».

Pour résumer le business de Jonas Lauwiner, les élus prennent l'exemple de la rue Rosenweg à Geuensee, près de Lucerne. Il demanderait jusqu'à 150'000 francs pour que la Municipalité (ou les riverains) récupère la route en question, sous peine de l'appeler Lauwinerweg (ndlr: Chemin de Lauwiner).

Une soif de pouvoir excessive

Dans son interpellation, Josef Schuler avait reproché à Jonas Lauwiner d'avoir «une soif excessive de pouvoir et un besoin exacerbé de se mettre en avant». La réponse du «roi de Suisse», citée par le «Luzerner Zeitung», est cinglante: il accuse Josef Schuler de «diffamation».

Dans sa réponse, le gouvernement lucernois indique qu'il n'existe actuellement aucun terrain sans propriétaire dans le canton. Il part du principe que les parcelles abandonnées «sans valeur économique significative» n'ont pas de propriétaire en raison des contraintes d'entretien. Les informations sur de tels cas sont de toute façon déjà publiées dans la Feuille des avis officiels du canton. Par conséquent, aucune information supplémentaire n'est nécessaire pour les personnes potentiellement concernées ou intéressées.

«Je devrais recevoir une médaille»

Le Conseil d'Etat rejette également l'idée d'un transfert automatique des parcelles sans propriétaire aux communes ou au canton. L'entretien des routes, en particulier, peut s'avérer coûteux. Le gouvernement rappelle par ailleurs que toute intervention sur le droit de propriété n'est autorisée qu'en cas d'«intérêt public supérieur» et doit donner lieu à une indemnisation.

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Je soupçonne Jonas Lauwiner de s’enrichir grâce à ses propriétés
Josef Schuler, député au Grand Conseil lucernois
»

De son côté, Jonas Lauwiner affirme ne tirer aucun profit de ces parcelles. Il facture les «tarifs habituels » pour leur entretien. «Je devrais vraiment recevoir une médaille», ajoute-t-il. Cependant, personne ne sait d'où vient son argent. L'élu socialiste a une petite idée de comment l'autoproclamé «roi de Suisse» gagne sa vie. «Je soupçonne Jonas Lauwiner de s’enrichir grâce à ses propriétés.» Josef Schuler prévoit ainsi de revenir sur cette question lors de la prochaine session et d’insister sur le fait que les municipalités devraient assumer plus activement leurs responsabilités.

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