Initiative sur les successions
Des multimillionnaires désertent déjà la Suisse avant la votation

La votation sur l'initiative relative à l'impôt sur les successions fait bouger les choses chez les plus riches du pays. Selon un président de commune, plusieurs multimillionnaires auraient déjà quitté la Suisse.
Publié: 11:58 heures
|
Dernière mise à jour: 12:10 heures
Partager
Écouter
1/7
59 multimillionnaires vivent dans la commune de Hergiswil (NW).
Photo: imago/Panthermedia
RMS_Portrait_AUTOR_586.JPG
Céline Zahno

A l'été 2024, le patron de Stadler Rail, Peter Spuhler, a voulu choquer la Suisse. Il a menacé de partir à l'étranger avant le vote sur l'initiative de succession, affirmant ne pas pouvoir payer «cet exorbitant impôt». S'en est suivi une vague de réactions de super-riches, menaçant à leur tour de partir. L'inventeur de la trottinette, Wim Ouboter, a récemment mis Blick en garde: si l'initiative passe en l'état, ses fils devront vendre l'entreprise familiale. «Cette initiative a été inspirée par Donald Trump», a-t-il déclaré.

Le 30 novembre, les électeurs se prononceront sur cette initiative, qui peine à trouver un écho dans les sondages. Concrètement, la proposition exige qu'un impôt de 50% soit prélevé sur les successions de plus de 50 millions de francs suisses. Les réactions des ultra-riches ne semblent pas être des paroles en l'air. Peu avant le vote, le maire d'une des communes la plus densément peuplée d'ultra-riches tire la sonnette d'alarme: ces derniers jours, ils quittent la Suisse!

59 multimillionnaires à Hergiswil

Hergiswil (NW) a enregistré plusieurs départs conséquents depuis septembre, selon le maire de la commune Daniel Rogenmoser. Il révèle que, suite à plusieurs conversations, il s'est aperçu que l'initiative était la cause de ces départs. Il refuse de divulguer un chiffre exact, mais il s'attend à d'autres désinscriptions de la commune. 

Il est impossible de vérifier précisément les raisons invoquées par ces personnes pour expliquer leur départ. Une chose est sûre: l’initiative est risquée pour la commune de Hergiswil. Nous avons consulté les chiffres du gouvernement de Nidwald indiquant quelles communes comptent le plus de personnes avec un patrimoine supérieur à 50 millions de francs suisses, donc concernées par l’initiative.

La commune de Hergiswil est en première position: elle accueillait pas moins de 59 multimillionnaires en 2021, pour une commune d'environ 6000 habitants. A titre de comparaison, en 2021 dans tout le canton de Nidwald, il n'y avait que 100 personnes avec un patrimoine supérieur à 50 millions de francs.

Hergiswil fait souvent les gros titres avec ses riches personnalités. Parmi les habitants célèbres de la commune figurent l'entrepreneur et milliardaire Michael Pieper, les familles d'ascenseurs Schindler et Bonnard, ainsi que Silvio Denz, CEO de Lalique. 

De sombres perspectives

«Je comprends très bien ces personnes», déclare le maire de la commune. «Ils veulent éviter le risque de la clause de rétroactivité». Il espère toutefois que les personnes fortunées en question n'ont pas déménagé définitivement. Si elles souhaitent revenir, elles bénéficieront d'une aide pour se réinscrire à la commune. 

Si l'initiative est acceptée, la commune – et donc le canton de Nidwald – serait confrontée à un problème de taille. Daniel Rogenmoser voir l'avenir en noir: «Si tout le monde partait, nous devrions théoriquement doubler les impôts pour obtenir les mêmes recettes.»

La commune de Saanen (BE), avec sa station huppée de renommée internationale de Gstaad, est aussi inquiète et refuse de se laisser faire. Jusqu'à présent, aucun désistement n'a été signalé, mais les personnes concernées suivent la votation de près. «Ce n'est pas seulement la commune de Saanen, mais toute la Suisse qui souffrirait si des citoyens fortunés et des entreprises familiales traditionnelles quittaient notre pays», nous explique la commune. Elle prévient que si l'impôt sur les successions est accepté, certains projets prévus à Saanen ne pourraient pas être réalisés et toute la structure de la commune devrait être révisée.

Des réactions plus discrètes

D'autres communes, confrontées à un «risque de défaillance» en raison de leur nombre important de résidents aisés, préfèrent garder le silence. Par exemple, Crans-Montana (VS) signale que, comme dans toutes les communes, des déménagements se produisent régulièrement, sans que les raisons ne soient connues.

De même, la commune de Herrliberg (ZH) indique ne pas avoir connaissance des motifs de départ. La situation est tout autre dans le Val de Bagnes, en Valais: aucun départ n'y a été signalé. D'autres communes aisées n'ont pas répondu à nos demandes d'interview.

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la
Articles les plus lus
    Articles les plus lus