La Municipalité de Lausanne encourage-t-elle les artistes de street art à faire fleurir leurs œuvres dans les rues de la capitale vaudoise? C’est ce que certains pourraient croire en parcourant le compte Instagram du municipal chargé des services industriels, Xavier Company.
Le 5 février, l’élu vert partage en story la photo du dernier livre de l’artiste à pseudo Léon Missile. Le peintre colle ses aquarelles, souvent des paysages de montagnes ou des monuments, sur des pancartes publicitaires des rues de la capitale olympique.
Il recouvre ainsi illégalement les réclames des annonceurs. «Foncez acheter son livre!», incite Xavier Company sur le réseau social du groupe Meta. Grâce à une lettre manuscrite qui apparaît en arrière-plan de sa photographie, on comprend également que les «likes» de l'édile sur les publications de «l’impayable Missile» ont participé à l’envoi de l’ouvrage en cadeau.
La police ordonne le retrait d’une peinture
Est-ce problématique pour un membre de l’Exécutif de saluer une activité illégale? La question se pose, notamment depuis que la police lausannoise a dû imposer le retrait d’une peinture de Léon Missile, le 18 octobre dernier.
Comme le révélait «Lausanne Cités», un dessin de la synagogue de Lausanne avait suscité des plaintes de passants. Il avait été apposé sur une publicité, en bas de l’avenue Georgette, quelques jours après l’attaque du Hamas contre Israël du 7 octobre. À l’approche d’une manifestation pro-Palestine, les forces de l’ordre avaient demandé à la Société générale d’affichage (SGA) de recouvrir l’œuvre.
Autogoal du municipal?
Par ailleurs, la SGA a, par le passé, déposé une plainte contre Léon Missile, confirme le responsable de l’antenne romande, Olivier Chabanel, contacté par Blick. «Dès lors que des annonceurs sont lésés par un affichage clandestin, notre devoir est de les soutenir en premier lieu, affirme-t-il. Nous remplaçons systématiquement les affiches clandestines par les affiches réservées et payées.»
Par-dessus le marché, enchaîne-t-il, le modèle d’affaire de la SGA «consiste à soutenir l’affichage culturel grâce aux recettes des affiches commerciales». Saluer les œuvres dégradant ces affiches constitue-t-il donc un autogoal pour le Municipal lausannois? Xavier Company ne voit pas les choses de cette façon.
Clin d'œil à la fonction d'élu municipal
L’écologiste affirme qu’il n’était pas au courant de la plainte visant l’artiste de rue. Concernant le dessin de la synagogue, l’élu rappelle que le contexte était particulier. « Ça n'est d'ailleurs pas un dessin que j'ai liké, son propos n'était pas totalement clair. Je comprends la décision de l'avoir retiré, dans un contexte très tendu où toutes les mesures d'apaisement étaient nécessaires», ajoute-t-il.
Le récent post sur Instagram était plutôt un «clin d’œil», explique le chef des services industriels, à son quotidien de conseiller municipal. Une manière de relever avec humour la diversité des courriers reçus, certains plus positifs que d’autres.
La SGA botte en touche
Il affirme qu’il ne s’agissait en aucun cas «de faire l’apologie du vandalisme». Mais admet volontiers que Léon Missile est un artiste à la sensibilité qu’il apprécie et partage. «Ses œuvres sont ponctuelles, développe Xavier Company. Il ne s'agit pas ici de saccage répété de l'espace publique.»
Impossible de savoir comment la SGA accueille le message de l'élu vert sur Instagram. Le post pourrait-il encourager d'autres artistes à recouvrir les publicités payées par ses clients? Olivier Chabanel botte en touche: «Nous avons répondu à vos questions factuellement et nous en resterons là.»