Des élus tirent la sonnette d'alarme
Avec les explosions record des bancomats, Fedpol est au bout du rouleau

Les attaques de bancomats à l’explosif se multiplient, mettant les autorités fédérales sous pression. Face à cette surcharge, des élus de tous bords politiques réclament désormais une révision législative afin de transférer la compétence de ces affaires aux cantons.
Publié: 09:43 heures
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L'année dernière, le nombre de bancomats détruits dans notre pays n'a jamais été aussi élevé. Comme ici à Kölliken (AG).
Photo: Police cantonale d'Argovie
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Sophie Reinhardt

La semaine dernière, une bande a tenté de faire exploser un bancomat dans le village bernois de Lützelflüh-Goldbach. Les malfaiteurs ont déposé une charge d'explosifs à côté du distributeur, mais sans succès. Ils sont repartis les mains vides. 

Pour des questions de sécurité, plusieurs bâtiments des alentours ont été évacués et des routes ont été bloquées pour l'enquête. L'ambulance a été appelée à titre préventif.

Des bons butins

Mais ces opérations sont parfois couronnées de succès. L'année dernière, le nombre de bancomat explosés a été le plus élevé jamais enregistré en Suisse. Selon les données de l'Office fédéral de la police (Fedpol), les criminels ont fait exploser 25 bancomat au total. Et la tendance semble se poursuivre cette année, avec huit bancomat détruits jusqu'à maintenant. 

Selon Fedpol, la plupart de ces attaques ont été commises par des bandes criminelles néerlandaises. Elles auraient des liens avec la mafia néerlandaise de la drogue, la Mocro Maffia. En Allemagne, ils font sauter au moins un distributeur par jour depuis des années.

Les cambrioleurs regorgent d'imagination pour braquer ces distributeurs automatiques de billets. Alors qu'avant 2018, il s'agissait principalement d'attaques dites «au lasso», les auteurs utilisent aujourd'hui des explosifs, comme l'indique Fedpol. Les attaques au lasso, c'est lorsque les auteurs tentent d'arracher les distributeurs automatiques de billets à l'aide d'une corde attachée à un camion par exemple.

Braquer des bancomats rapporte gros. C'est ce que montre notamment la statistique criminelle argovienne de 2022. Lors de douze explosions, les auteurs ont réussi à dérober un total de 1'600'000 francs. 

Fedpol débordée

Lorsqu'un distributeur automatique de billets est forcé, la police cantonale est chargée de l'affaire. Mais si des explosifs sont en jeu, l'enquête est transférée à Fedpol, avec le Ministère public de la Confédération qui suit la procédure pénale.

Sauf que Fedpol est débordée à cause de la multiplication des attaques à l'explosif. Par ailleurs, les procédures s'avèrent coûteuses, car elles nécessitent une entraide judiciaire internationale. A la fin de l'année 2024, le Ministère public de la Confédération a lancé une centaine de procédures pénales liées à des explosions de bancomats. «Un phénomène en constante augmentation depuis plusieurs années», précise-t-il.

Le monde politique veut agir. Pas moins de 28 parlementaires, issus tant de la gauche comme de la droite, ont signé une intervention en ce sens. Ils demandent au Conseil fédéral un changement législatif pour que les attaques de bancomats à l'explosif relèvent de la compétence des cantons. «Fedpol pourrait ainsi se concentrer sur la lutte contre la mafia ou le blanchiment d'argent», a déclaré la motionnaire vert'libérale Céline Weber. Pour la conseillère nationale vaudoise, ce recentrage est essentiel au vu des menaces actuelles.

Un manque d'effectif

L’explosion du nombre d’enquêtes liées aux attaques de bancomats place Fedpol et le Ministère public de la Confédération dans une situation difficile. Ce dernier a déjà tiré la sonnette d’alarme, signalant qu’en raison d’un manque de personnel au sein de la Police judiciaire fédérale, il lui est impossible de traiter immédiatement les affaires relevant du crime organisé ou de la cybercriminalité.

Matthias Müller, porte-parole du Ministère public de la Confédération, plaide pour un renforcement progressif des effectifs, avec une augmentation de cinq à dix postes par an au sein de la Police judiciaire fédérale afin de répondre aux besoins croissants.

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