L'affaire avait fait les gros titres. Un Argovien avait commandé deux pistolets à eau sur la plateforme web chinoise Temu pour les offrir à ses enfants. Au lieu de cela, ce sont deux faux pistolets ressemblant comme deux gouttes d'eau à de vraies armes qui ont été envoyés. Sans le savoir, l'homme s'est rendu coupable d'«importation illégale d'armes sur le territoire suisse par négligence et sans autorisation». Conséquence: une amende de 6500 francs.
Ce n'est pas un cas isolé. Le ministère public argovien infligerait chaque mois des peines similaires pour des produits achetés sur Internet. Lance-pierres, pointeurs laser, sprays au poivre ou pistolets à eau aux allures illégales – des centaines de personnes se retrouvent ainsi dans des procédures pénales sans se douter une seule seconde qu'elles enfreignent la loi. Dans toute la Suisse, il y aurait environ 2000 procédures similaires par an.
En tant qu'avocat de la défense, le conseiller aux Etats du Centre Beat Rieder a déjà lui-même représenté une personne concernée. Il vise maintenant une modification de la loi sur les armes: les plateformes en ligne comme Temu ou Amazon doivent soit indiquer clairement les produits interdits sur le territoire, soit être elles-mêmes poursuivies en cas d'infraction.
«Ils n'en ont rien à faire de leurs clients»
Pour Beat Rieder, «ces groupes commerciaux qui réalisent en Suisse un chiffre d'affaires de plusieurs centaines de millions de francs se moquent éperdument de leurs clients. Jamais ils ne leur disent que ces produits sont interdits en Suisse et que leur importation est punissable. Cela doit cesser. Elles ont des succursales en Suisse dont les collaborateurs pourraient être poursuivis pénalement. L'Etat ne peut tout de même pas capituler devant les groupes internationaux.»
Si le Conseil des Etats a approuvé à l'unanimité l'intervention de Beat Rieder, le conseiller fédéral socialiste Beat Jans s'est montré plus réservé à ce sujet. Ainsi, il propose simplement d'adapter l'ordonnance sur les armes afin que ne soit considéré comme arme factice que ce qui ne peut pas être distingué au premier coup d'œil d'une arme réelle, même par un spécialiste. «Cela devrait entraîner une diminution significative des poursuites pénales», a affirmé le ministre de la Justice.
Mais pour le Conseil des Etats, cela ne suffit pas. Si ces entreprises ne peuvent pas être poursuivies ou obligées de marquer clairement les produits interdits en Suisse, il faudrait au moins adapter la loi sur les armes. Les cas mineurs d'importation d'«armes» ne devraient par exemple plus être réglés par une procédure pénale, mais par une simple décision d'amende. Celle-ci se situerait alors entre 40 et 200 francs.