Fini les invitations à «se dépêcher». Fini aussi la roue de la fortune permettant de gagner des réductions. Le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) a en effet décidé de durcir le ton face aux méthodes marketing de Temu.
Arrivée en Suisse il y a à peine deux ans, la plateforme de vente en ligne chinoise est rapidement devenue un acteur incontournable du secteur. Selon les estimations de la société de conseil spécialisée dans l'e-commerce Carpathia, Temu a réalisé un chiffre d’affaires de 700 millions de francs en Suisse en 2024 grâce à ses produits à bas prix venus de Chine.
«Ils doivent faire quelque chose!»
Ce succès, Temu le doit non seulement à ses prix cassés, mais également à un marketing très agressif. Jusqu'ici, la plateforme n'a pas hésité à brandir des slogans tels que «Presque épuisé!», même lorsqu'il restait près de 200 exemplaires d'un article en stock. Le «Beobachter» avait notamment attiré l'attention sur ces méthodes relevant de la «rareté artificielle», un type de marketing visant à créer un sentiment d'urgence chez le consommateur.
Seulement voilà, Temu s'engage désormais à n'utiliser cette indication que lorsque le stock est effectivement peu garni. C'est en tout cas ce que promet Whaleco Technology, l'entreprise qui exploite la plateforme en Suisse. D’autres formules, comme «Offres éclair» ou «Agissez vite, votre article préféré pourrait disparaître» devraient également disparaître des e-mails promotionnels du géant chinois.
L'association du commerce de détail satisfaite
Cette évolution résulte d’un dialogue constructif avec le Seco, assure un porte-parole de Temu. Ce dernier se félicite tant de la qualité des échanges que du résultat obtenu, et assure que le groupe continuera à offrir à ses clients «une expérience d’achat positive, tout en maintenant des standards rigoureux en matière de protection des consommateurs».
Pour l'association suisse des commerces de détail, Swiss Retail, qui avait lancé cette procédure auprès du Seco, la signature par Whaleco d'une déclaration d'abstention est une excellente nouvelle. Il s'agit d'un «premier pas important vers des conditions de concurrence plus équitables pour le commerce de détail suisse», écrit la faîtière dans un communiqué.
La protection des consommateurs est sceptique
Du côté de l'association alémanique de protection des consommateurs Stiftung für Konsumentenschutz (SKS), on semble déjà moins emballé: «De telles procédures ne sont pas judicieuses», déclare Livia Kunz, responsable juridique de l'organisation. «Ces interventions devraient concerner tous les fournisseurs et pas seulement Temu.»
Elle juge par ailleurs l’accord insuffisant. Selon elle, Temu continue de recourir à des stratégies de vente manipulatrices, afin d'exercer une pression psychologique sur les consommateurs. Elle cite en exemple les faux jeux-concours qui garantissent systématiquement un gain. «Le jeu de la roue a été remplacé par un autre jeu de dupes qui vise tout autant à influencer le comportement d’achat», déplore-t-elle.
Depuis leur arrivée sur le marché, les plateformes chinoises de vente en ligne font l’objet de critiques répétées, tant de la part de l’industrie que des associations de consommateurs. Mais à l'avenir, les règles pourraient se durcir pour les revendeurs étrangers. Plusieurs motions déposées par différents partis au Parlement, demandent que ces fournisseurs soient soumis aux mêmes lois que les acteurs suisses, notamment en matière de sécurité des produits.