Lisa Murkowski, Susan Collins, Rand Paul et Mitch McConnell: ces quatre sénateurs républicains veulent contraindre Donald Trump à lever immédiatement les droits de douane punitifs imposés à plus de 100 pays, dont la Suisse. Jeudi, ils ont rompu avec le président américain en votant, aux côtés des démocrates, la fin de sa politique douanière.
Trump, peu habitué à la dissidence interne, affiche encore un sourire en distribuant des friandises à la Maison Blanche pour Halloween. Mais cette fronde venue de son propre camp montre qu’il ne contrôle plus totalement «son» parti. Plusieurs indices laissent penser qu’une tempête politique va se lever et pourrait bien l’ébranler.
Fin de l'état d'urgence
Le cœur du conflit? La politique douanière annoncée en avril lors du «Liberation Day», que Trump applique depuis d’une main de fer à presque tous les pays du monde. Grâce aux voix des quatre républicains – que Trump qualifie de «Rinos» («Republicans In Name Only») – le Sénat réclame désormais la fin de l’état d’urgence qui lui permet d’imposer unilatéralement ces taxes.
Les droits de douane punitifs de Trump sont «une recette pour le chaos», a tonné le sénateur Rand Paul, dénonçant une Amérique «en marche vers la tyrannie». Même son ancien allié Mitch McConnell a demandé de mettre fin à cette politique «qui ne fait que tout renchérir sans profit pour personne».
Le gardien de Trump bloque un vote décisif
La Suisse, toutefois, ne peut pas encore se réjouir de la disparition du «marteau douanier» de 39%. Tant que la Chambre des représentants ne confirme pas la décision du Sénat, l’état d’urgence reste en vigueur.
Mike Johnson, président de la Chambre et fidèle soutien de Trump, a déjà prévenu: aucun vote n’aura lieu pour l’instant. Et même en cas de vote, Trump pourrait opposer son veto. Pour le contourner, il faudrait une majorité des deux tiers – bien plus que quatre «Rinos» isolés. Le troupeau devra grossir pour espérer piétiner le chef.
Une perspective qui n’est pas si improbable. Le malaise républicain grandit face aux choix du président. Sa décision de retirer une partie des 4000 soldats américains stationnés en Roumanie a suscité la colère de plusieurs poids lourds du parti, tout comme son refus d’associer les démocrates aux discussions sur la lutte contre les cartels de la drogue vénézuéliens.
Inquiétude pour l'armée américaine
Dans les Etats agricoles, la grogne monte aussi après l’annonce d’importations massives: 80’000 tonnes de bœuf argentin. Si Trump a obtenu de Pékin la reprise des exportations de soja américain, l’arrivée de cette viande étrangère menace directement les éleveurs du pays.
Pendant ce temps, le «shutdown» paralyse la vie de millions d’Américains depuis un mois: cuisines populaires improvisées, parcs nationaux fermés, système de santé à l’arrêt. Les soldats, eux, ne sont payés que grâce à un don privé de 130 millions de dollars destiné à financer temporairement leur solde.
Voir l’armée la plus puissante du monde dépendre d’un super-riche glace le sang. Un scénario digne d’Halloween... mais pas d'une démocratie, selon une majorité d’Américains. D’après les derniers sondages, 53% estiment que Trump fait mal son travail. Les «Rinos», eux, n’ont peut-être pas fini de grogner.