Sheinbaum a réussi à éviter les taxes
La présidente du Mexique joue le jeu de Trump bien mieux que lui

La présidente mexicaine Claudia Sheinbaum surprend par son habileté diplomatique. Lors des négociations avec le président américain Donald Trump, elle a obtenu la suspension des droits de douane pour le Mexique, ce qui lui vaut des éloges inattendus.
Publié: 18.04.2025 à 06:00 heures
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Dernière mise à jour: 18.04.2025 à 08:17 heures
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Le Mexique s'en est jusqu'à présent tiré à bon compte dans la guerre commerciale avec les Etats-Unis – et il le doit principalement aux talents de négociatrice de sa présidente Claudia Sheinbaum.
Photo: keystone-sda.ch
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Chiara Schlenz

C'est presque curieux: le président américain Donald Trump, qui aime d'habitude couvrir ses opposants de quolibets et d'insultes, fait l'éloge de la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum en la qualifiant de «femme merveilleuse». Cette faveur profite à Sheinbaum et à son pays dans le conflit douanier actuel: «Dans le cas du Mexique, il n'y a pas de droits de douane supplémentaires», annonce-t-elle avec un sourire détendu. Et tout le monde sait que cette phrase est le résultat d'âpres négociations avec un prédateur politique.

Pour Claudia Sheinbaum, le nouveau conflit douanier est plus qu'une simple manœuvre de politique étrangère. Ce coup de projecteur montre que même un Donald Trump peut être maîtrisé avec des arguments et de la stratégie. Si on sait comment s'y prendre!

Du laboratoire au palais du gouvernement

Le fait que Sheinbaum tienne tête à Trump sans hausser le ton fait d'elle une exception sur la scène internationale. Alors que d'autres se laissent aller à la provocation, elle reste objective, froide, concentrée. Pas de contre-taxes, pas d'escarmouches sur X+, pas de protestations bruyantes. Au lieu de cela: un appel téléphonique. Et puis un autre. Et soudain, le Mexique est exempté des droits de douane draconiens des Etats-Unis tandis que d'autres tremblent. Sheinbaum appelle cela «la coopération plutôt que la confrontation».

Cette femme de 62 ans n'est pas du genre à se mettre sous les feux de la rampe. Née dans une famille de scientifiques juifs, elle a obtenu un doctorat en physique et a mené des recherches sur le changement climatique en Californie avant de se lancer dans la politique. Sa carrière s'est déroulée presque comme dans les manuels: chef de district, maire de Mexico, présidente. Mais ceux qui pensent qu'elle n'est que la marionnette de son puissant mentor et prédécesseur López Obrador l'ont sous-estimée. Sheinbaum a trouvé depuis longtemps son propre ton: froid, analytique, efficace.

C'est justement ce style qui agit désormais comme un contre-modèle au haut-parleur de Trump. Alors que son homologue américain aime démonter ses adversaires en public, Sheinbaum contre-attaque avec des chiffres, des faits, de la diplomatie. Lors de négociations, Trump cite soudain des statistiques mexicaines sur la sécurité fournies par Sheinbaum. Un coup de relations publiques d'un genre particulier: des vidéos d'information mexicaines sur le fentanyl se retrouvent dans des campagnes américaines. Leur stratégie silencieuse est efficace.

Entre souveraineté et dépendance

Ce faisant, elle se tient en équilibre sur une corde raide diplomatique. A l'intérieur, elle doit défendre la souveraineté du Mexique – à l'extérieur, elle doit soigner les relations avec le voisin du nord, qui est essentiel à sa survie économique. Plus de 80% des exportations mexicaines sont destinées aux Etats-Unis. Si les relations s'enveniment, l'économie mexicaine s'arrête. Mais au lieu de baisser la tête, la politique de Sheinbaum donne des résultats: les barons de la drogue sont extradés et dix mille soldats américains supplémentaires sécurisent la frontière avec son autorisation. Et pourtant, elle s'en tient toujours à sa maxime. Coopération: oui. Soumission: non.

Même ses détracteurs, qui l'ont longtemps accusée de soumettre trop facilement le Mexique aux souhaits de Trump, doivent désormais le reconnaître: sa stratégie fonctionne. Au Mexique, son taux d'approbation dépasse les 75%. La technocrate autrefois froide devient la porteuse d'espoir d'un pays qui a été marqué pendant des années par la violence, la corruption et l'insécurité économique.

C'est peut-être justement ce pragmatisme sobre qui caractérise Sheinbaum. Pas de promesses creuses, pas de pathos idéologique. Mais une méthode: écouter, analyser, agir. Un style qui n'est pas criard, mais qui passe à l'action. Et qui montre que le leadership politique peut aussi être silencieux, et d'autant plus durable. Reste à savoir si elle pourra dompter Trump durablement. Mais il est d'ores et déjà clair que Claudia Sheinbaum l'a surpris et a ainsi donné un avantage décisif au Mexique.

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