Ils sont venus de nulle part, puis ils ont disparu. Les drones qui ont mystérieusement survolé les aéroports de Copenhague et d'Oslo interrogent. Ce qui n'a pas manqué de créer toute une série de spéculations, alimentées par le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Dans un post sur les réseaux sociaux, il a critiqué une «violation par la Russie» de l'espace aérien de l'OTAN à Copenhague.
Les polices danoise et norvégienne ne se sont pas exprimées sur le type de drones utilisés. La chef du gouvernement danois, Mette Frederiksen, a toutefois considéré l'événement comme une «attaque», sans pour autant nommer de responsables. Quoi qu'il en soit, ces incidents font une fois de plus le jeu de Vladimir Poutine. Le chef du Kremlin a trouvé un nouveau moyen de freiner les Européens qui le gênaient.
Tout comme les attaques de pirates informatiques sur les aéroports de Berlin et de Bruxelles la semaine dernière (dont l'auteur n'a pas non plus été clairement identifié), les drones mystères d'Oslo et de Copenhague ont entraîné des perturbations et des retards massifs dans le trafic aérien.
Le message de Poutine à la population
Les chaînes de télévision russes ont diffusé en boucle les images de passagers inquiets, qui attendaient dans les hubs aériens européens. Les Russes connaissent ce genre d'images. Depuis des mois, plusieurs aéroports russes sont régulièrement paralysés, cibles de cyberattaques ou de problèmes techniques. Le message que le régime de Poutine veut envoyer à ses 144 millions de citoyens est que les populations occidentales rencontrent, elles aussi, les mêmes difficultés. Il ne faut donc pas s'inquiéter.
Sauf que les Européens sont tout sauf tranquilles. Après les violations de l'espace aérien par des drones russes en Pologne et en Roumanie, ainsi que la récente incursion d'avions de combat russes armés de missiles dans l'espace aérien estonien, l'Occident est en alerte.
Ce genre de manœuvres tactiques ne date pas d'hier. Depuis plusieurs années, les pays baltes et la Finlande signalent régulièrement des incursions d'avions russes dans leur espace aérien. Le point le plus marquant de ces actions perturbatrices russes reste l'incendie d'une usine d'armement en Allemagne l'été dernier. Comme souvent, Moscou fait la sourde oreille, nie toute implication, et persiste.
Le Kremlin profite du «brouillard de la guerre», de l'incertitude liée à ces actions confuses, pour détourner l'attention des véritables méfaits de la guerre en Ukraine. Tant que l'Europe parvient à détourner l'attention des violences persistantes des soldats russes dans le Donbass, des 20'000 enfants enlevés en Russie selon les autorités ukrainiennes, ainsi que des mensonges de propagande sur la soi-disant volonté de Moscou d'engager de véritables négociations de paix sérieuses, Poutine peut se détendre.
La dissuasion de l'OTAN, un échec
Maintenir l'Europe sous tension: telle semble être la stratégie de Poutine pour continuer à envoyer ses soldats à la mort au nom de ses ambitions impérialistes, sans être véritablement inquiété. Selon des études, un climat de tension constante pousse à se focaliser sur des scénarios catastrophiques, renforce l’anxiété et alimente le sentiment de désespoir.
Mais l'Europe ne peut pas se permettre cet état de nervosité. Aujourd'hui, le mot-clé devrait être la dissuasion. Mais c'est précisément sur ce point que les experts estiment que l'Europe a failli. Le politologue et expert en sécurité allemand Carlo Masala met en garde contre le fait que l'Europe ne doit pas se laisser déstabiliser par des incidents comme ceux des drones en Scandinavie: «Nous devons nous demander comment nous pouvons à nouveau être dissuasifs», déclare-t-il sur X. Selon lui, le véritable enjeu est de retrouver une véritable capacité de dissuasion, au lieu de simplement gérer ce type de provocations.
La position de Washington reste floue. Donald Trump, pour sa part, se contente de reprendre la rhétorique russe, à savoir que le survol de drones en Europe de l'Est étaient probablement des «incidents involontaires».
Adopter un ton ferme
Le ton ferme adopté par Varsovie cette semaine va dans ce sens-là. «Je veux être clair et précis», avait déclaré le Premier ministre polonais, Donald Tusk. «Nous abattrons les objets volants qui violent notre espace aérien. Nous ne discuterons pas.»
Lundi, le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, a renchéri lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU. «Si un missile ou un avion russe pénètre à nouveau dans notre espace aérien sans autorisation, que ce soit intentionnellement ou par erreur, et si cet avion est ensuite abattu, ne venez pas vous plaindre», a déclaré Radoslaw Sikorski à l'intention des Russes. «Vous êtes prévenus.»