Le nouveau Tom Cruise?
Glen Powell, le Texan à l’ancienne qui renverse Hollywood

L’acteur au sourire enjôleur, à l’affiche de «Running Man», est passé en trois ans d’étoile montante à nouvelle coqueluche de Hollywood. En mêlant charisme d’un autre temps et stratégie bien de son époque.
Publié: 08:31 heures
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Glen Powell à l'hôtel Beverly Hilton de Beverly Hills, le 5 janvier 2025, pour la 82ème cérémonie annuelle des Golden Globes.
Photo: KEYSTONE
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Margaux BaralonJournaliste Blick

Souvent, on le compare à Tom Cruise. Parce que c’est à ses côtés qu’il a véritablement été révélé, en 2022, dans «Top Gun: Maverick», la suite du film culte. Parce qu’il est aussi producteur des films dans lesquels il joue, et qu’il aime faire ses cascades lui-même. Peut-être aussi, sûrement, parce que sa gueule d’ange rappelle la tornade que fut le petit brun quarante ans plus tôt. Physiquement, pourtant, Glen Powell ressemble plus à Armie Hammer, ancienne étoile montante à Hollywood dans les années 2010, star de «Call me by your name», depuis avalé par les limbes du scandale (des accusations de violences sexuelles et de cannibalisme). Même mâchoire carrée, même blondeur, même regard clair – ne reste plus qu’à souhaiter au premier meilleur comportement et meilleur destin.

Ce charisme à l’ancienne réveille des souvenirs de gros bras des années 1980. Gros bras, d’ailleurs, Glen Powell a tendance à l’être souvent au cinéma et dans les séries, parfois réduit à des rôles d’athlète, d’arrogant ou les deux. Pourtant, celui qui est à l’affiche, le 19 novembre prochain, de «Running Man», une nouvelle adaptation de Stephen King, ne passe pas son temps à foncer tête baissée. Stratégique dans ses choix, le comédien de 37 ans prend un malin plaisir à casser son image.

Elevé comme un bonhomme texan

Car le Texan sait très bien l’image qu’il renvoie de prime abord. Celle d’un type un peu bourrin, pour ne pas dire bas du front, élevé comme un bonhomme du sud des États-Unis, dans un ranch équipé d’un champ de tir avec un oncle, Billy, qui lui apprend à se battre. «Qu’il s’agisse de changer un pneu, de conduire un tracteur ou de débourrer un cheval, dans ma famille, les compétences étaient très importantes», raconte-t-il à «GQ». Son premier rôle, il le décroche à 13 ans, après avoir fait ses armes sur les planches du théâtre de son école. Il apparaît quelques minutes à l’écran dans «Spy Kids 3», production locale, avant d’être casté dans une émission télévisée à la «Survivor». Un échec total dès la première épreuve, qu’il raconte plus tard au «Hollywood Reporter»: «C’est le truc le plus gênant qui puisse vous arriver quand vous êtes en première année de lycée. Je m’en suis pris plein la gueule.»

Le jeune Glen décide de prendre sa revanche et de se bâtir un physique d’athlète. Mais aussi de travailler deux fois plus. Lorsqu’il arrive aux premières lectures du film «The Great Debaters», signé Denzel Washington, il connaît déjà tous ses dialogues, et ceux des autres. Impressionné, l’acteur-réalisateur décide de lui présenter un agent, Ed Limato, qui n’a qu’un conseil pour lui: déménager à Los Angeles. Une fois le Texan déraciné, rien ne fonctionne. Une question d’image, encore une fois. Nous sommes dans les années 2000, la star montante du moment s’appelle Robert Pattinson. «C’était le mec auquel il fallait ressembler», se souvient Glen Powell dans les colonnes de «GQ». 

Le physique de l’emploi

En audition, tous les apprentis acteurs sont des hipsters minces et ténébreux avec un bonnet sur la tête. Sa gueule et sa carrure de quarterback ne font pas recette. Le jeune homme galère, vit «chichement», comme il le raconte à «Vanity Fair». «Je cachais une flasque dans ma botte si j’allais boire un verre. Tu ne peux peut-être rien te payer dans cette ville [de Los Angeles] mais tu peux te maintenir à flot.»

«Je ne pouvais pas lui conseiller d’être né 25 ans plus tôt mais je l’ai pensé à son sujet. 'Mon Dieu, tu n’es pas de la bonne époque'», dit d’ailleurs de lui dans le «Hollywood Reporter» Richard Linklater, qui l’a dirigé dans «Everybody Wants Some!» en 2016. Dans ce film, Glen Powell incarne un joueur de baseball texan. Pour le coup, il a le physique de l’emploi, et c’est pendant longtemps le seul genre de rôles qu’il réussit à décrocher. 

Il postule pour la série «Friday Night Lights», centrée autour d’une équipe universitaire de football américain. Pour apparaître dans «The Expendables 3», un blockbuster qui rassemble tous les papis du cinéma d’action, de Dolph Lundgren à Arnold Schwarzenegger, il envoie directement une lettre à Sylvester Stallone pour raconter qu’il a appris à se battre et manier les armes. La peur de rentrer définitivement dans une case, celle du cinéma d’action, pour ne jamais en sortir le guette. «C’est ce qui est drôle à Hollywood, vous n’avez pas vraiment le choix», raconte-t-il à «GQ». «J’ai réalisé petit à petit que les gens aimaient me voir incarner des personnages arrogants et sûrs d’eux.» Quand il ne joue pas, l’acteur prend la plume et écrit des scénarios, qu’il parvient parfois à vendre pour tenir quelques mois de plus. 

Action à l’ancienne

Dix ans plus tard, Glen Powell a-t-il évité le piège de la case? En le voyant à l’affiche de «Running Man», il est permis d’en douter. Dans cette adaptation de Stephen King, l’acteur incarne un homme lambda embarqué dans un jeu mortel retransmis à la télévision. Comme le titre l’indique, il court beaucoup. Un rôle déjà tenu au cinéma par un certain… Arnold Schwarzenegger. Pour sortir du cinéma d’action tonitruant, on a vu mieux. D’autant que le Texan a tenu à effectuer toutes ses cascades lui-même, et a donc poussé de la fonte pour se bâtir une musculature en conséquence. Auprès de «GQ», il assume l’avoir fait «pour épater le public».

Glen Powell dans une scène du film «Running Man».
Photo: KEYSTONE

Un conseil qui lui a peut-être été donné par Tom Cruise, le roi de la cascade maison, sur le plateau de «Top Gun: Maverick». Encore un choix de Glen Powell qui le cantonne au cinéma à l’ancienne, celui des années 1980 (le premier volet date de 1986), et lui donne l’occasion de tomber sur le t-shirt pour révéler des abdos en béton armé, sculptés par l’entraînement et la lumière tombante d’un bord de mer. L’année dernière, il était aussi un petit arrogant musclé, aussi dans une suite de film culte, pour «Twisters». Chapeau de cow-boy sur la tête, il jouait de son image de redneck insupportablement sûr de lui. Avant de se révéler plus fin et plus sensible.

Un vrai comico-romantique

Pour apprécier la carrière de Glen Powell, et la stratégie développée derrière, il faut justement accepter d’aller au-delà des clichés. Si à première vue, c’est bien la suite de «Top Gun» qui l’a propulsé parmi les acteurs les plus bankables de Hollywood, en réalité, c’est un autre film, sorti quatre ans plus tôt sur Netflix, qui l’a remis à flot. Dans «Petits coups montés», le comédien incarne un simple assistant dans le monde de la finance, qui finit par tomber amoureux alors qu’il complote pour caser son patron. Une comédie romantique pure et dure, pour laquelle les producteurs auraient préféré Zac Efron. Glen Powell se bat pour avoir plus de temps d’écran et le film devient le succès surprise de la plateforme de streaming.

C’est encore une comédie romantique qui le fait rentrer dans le cercle fermé des acteurs qui n’ont plus besoin de passer des auditions parce qu’on les appelle directement: «Tout sauf toi», sorti en 2023. Et si Glen Powell charme tout le monde dans un rôle de trader qui tombe amoureux sans le vouloir (décidément!), c’est surtout la promotion assurée avec sa partenaire, Sydney Sweeney, qui excite les réseaux sociaux et les directeurs de casting. Les rumeurs d’une véritable idylle vont bon train et aucun des deux ne fait l’effort de les faire taire. «Les gens ont tendance à oublier que les tournées promo, c’est aussi du spectacle», rappelle simplement Glen Powell à «Vanity Fair». 

Glen Powell et Sydney Sweeney dans une scène du film «Anyone But You» (2023).
Photo: IMAGO/Landmark Media

Toujours est-il que c’est bel et bien dans le genre de la comédie romantique, souvent abusivement qualifié de féminin, que l’acteur se révèle. Pour le coup, ce n’est pas du jeu: il est capable de citer intégralement «La revanche d’une blonde». «Beaucoup d’acteurs me donnent leur film préféré et souvent, c’est dark. Moi, j’aime les films qui vous réconfortent, que vous pouvez revoir», confie Glen Powell au «Guardian». «J’aime m’évader grâce à des œuvres qui ne me pompent pas mon énergie mais m’en donnent, et pour moi ce sont les comédies romantiques.»

Subvertir son image

C’est un genre, aussi, qui permet le ridicule. Et ça, il adore. Dans «Hit Man», qu’il a co-scénarisé avec Richard Linklater, le Texan incarne un faux tueur à gages. Postiches, moustaches, déguisements…Glen Powell enchaîne les looks plus ridicules les uns que les autres. Et subvertit son image. Sortie cet automne sur AppleTV+, la série «Chad Powers» lui donne une nouvelle occasion de se grimer, en prenant le rôle d’un ancien quarterback ridiculisé qui enfile perruque et prothèse nasale pour reprendre du service sans être reconnu. 

Car s’il a une réputation de bosseur sur les tournages, Glen Powell fait partie de ces acteurs qui, fondamentalement, cherchent à s’amuser. «Vraiment, je ne sais pas comment font les gens pour se prendre au sérieux dans ce métier», lance-t-il au «Guardian». «Sur chaque film, je m'assois littéralement en pensant à quel point c’est impossible tant ce métier est ridicule.» Celui qui ne se déplace jamais sans son chien Brisket, un petit chihuahua croisé qui fait pipi partout (l’acteur a dû nettoyer les dégâts sur le shooting du magazine britannique), en profite pour faire le clown. 

De passage en France pour la promotion de «Running Man», il passe une tête dans le château de la Star Academy. Dans l’émission «Hot Ones», qui consiste à répondre à des questions en mangeant du poulet arrosé de sauce très (très) épicée, il explique que son animal préféré est le capybara… un rongeur sud-américain avec lequel les internautes lui trouvent une ressemblance physique. Et il n’hésite pas à enchaîner les pas de danse maîtrisés avec une chute rocambolesque dans le «Saturday Night Live». Voilà d’ailleurs sûrement pourquoi celui qui s’est empressé de retourner vivre au Texas maintenant qu’il a sa place à Hollywood n’est pas le nouveau Tom Cruise. Il a le coeur léger et beaucoup, beaucoup d’autodérision.


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