Le président russe Vladimir Poutine s'est félicité vendredi de récents gains territoriaux de son armée en Ukraine, assurant que les forces de Moscou «avancent sur tout le front», alors que d'intenses efforts diplomatiques sont déployés pour mettre fin à près de quatre ans de guerre.
«Nos troupes avancent sur toute la ligne de contact (...), l'ennemi recule dans toutes les directions», a déclaré Poutine au début de sa grande conférence de presse annuelle retransmise à la télévision. «Je suis sûr qu'avant la fin de cette année, nous assisterons encore à de nouveaux succès», a-t-il ajouté.
Vladimir Poutine a aussi mis en garde l'Europe. Il a prévenu vendredi que l'utilisation des avoirs russes pour financer l'Ukraine pourrait «avoir des conséquences lourdes», après un sommet des 27 jeudi sur le sujet qui n'a pas abouti à un accord. «C'est un braquage. Mais pourquoi ce n'est pas possible de commettre ce braquage? Parce que les conséquences peuvent être très lourdes», a-t-il déclaré.
Poutine, 73 ans et au pouvoir depuis un quart de siècle, est rompu à cet exercice médiatique qui dure généralement plusieurs heures. Dans la salle bondée, des journalistes de toutes les régions de Russie, certains en habits et coiffes traditionnels, et des médias étrangers, a constaté l'AFP. Le président russe s'exprime à cette occasion sur un vaste spectre de sujets allant de la géopolitique et l'économie aux préoccupations concrètes de la population et problèmes locaux.
«Pas responsable de la mort des Ukrainiens»
Le président russe Vladimir Poutine a déclaré vendredi qu'il ne se considèrait «pas responsable» pour les morts causées par le conflit en Ukraine déclenché par son pays il y a bientôt quatre ans. «Nous ne nous considérons pas responsables pour la mort des gens, parce que nous n'avons pas commencé cette guerre», a-t-il déclaré lors de sa grande conférence de presse annnuelle retransmise à la télévision, imputant la responsabilité du conflit aux autorités ukrainiennes.
Le président russe Vladimir Poutine a affirmé vendredi que «la balle est dans le camp» de l'Ukraine et des Occidentaux dans les négociations visant à mettre fin à la guerre, indiquant que Moscou avait accepté des «compromis» dans ce processus.
«La balle est entièrement dans le camp de nos adversaires occidentaux, les dirigeants du régime de Kiev et leurs sponsors européens en premier lieu», a déclaré Poutine lors de sa conférence de presse annuelle retransmise à la télévision. Il s'est dit prêt «à négocier et à mettre fin au conflit par des moyens pacifiques».
L'Ukraine en priorité
Comme les années précédentes, il était très attendu sur l'offensive russe en Ukraine, débutée en février 2022, mais aussi sur ses relations avec le président américain Donald Trump, ou encore l'escalade des tensions avec les Européens.
Mercredi, Poutine a une nouvelle fois martelé que les objectifs de la Russie en Ukraine seraient «sans aucun doute atteints», que ce soit par la voie diplomatique ou par des moyens militaires. Il a aussi eu un ton très dur envers les dirigeants européens, qu'il a qualifiés de «porcelets» qui ambitionnent de provoquer «l'effondrement» de la Russie.
Le président français Emmanuel Macron a estimé vendredi qu'il allait «redevenir utile» pour lui et les Européens de parler à Vladimir Poutine, à l'issue des efforts menés par les Etats-Unis pour faire cesser la guerre. Les forces russes ont accéléré cette année leurs conquêtes en Ukraine, dont elles contrôlent environ 19% du territoire.
Quand arrivera la paix?
Le conflit reste une préoccupation majeure des Russes. Selon une enquête d'opinion du centre indépendant Levada de mi-décembre, 21% des sondés souhaitent demander vendredi à Vladimir Poutine quand «l'opération militaire spéciale» en Ukraine, selon les termes en vigueur en Russie, prendra fin. Selon cet institut, déclaré «agent de l'étranger» par les autorités, 16% des sondés aimeraient savoir quand leurs conditions de vie vont s'améliorer, alors que la Russie est visée par des sanctions occidentales massives, et confrontée à une forte inflation.
«Si j'avais la possibilité de poser une question au président, je lui demanderais quand la paix arrivera pour tous. Ce serait le bonheur!», a déclaré à l'AFP Anna, une retraitée de 65 ans, interrogée dans les rues de Moscou.
Grigori, logisticien de 62 ans, voudrait, lui aussi, «entendre des nouvelles positives sur la fin du conflit», mais aussi sur «une baisse des taux d'intérêt des prêts hypothécaires», dont les niveaux records en Russie freinent les investissements.
Si l'économie russe a résisté jusqu'ici face aux restrictions visant notamment ses exportations d'hydrocarbures, les difficultés qu'elle traverse s'expriment via des pénuries de main d'oeuvre, un coût prohibitif des crédits bancaires et l'inflation. Après deux années de croissance portées par l'effort de guerre, elle donne des signes de ralentissement: la Banque centrale table sur une croissance du PIB comprise entre 0,5% et 1% pour 2025, contre 4,3% en 2024 et 4,1% en 2023.
Questions de la population épluchées
Cette conférence est aussi l'occasion pour Vladimir Poutine d'écouter pléthore de doléances locales de la population à travers les régions du plus vaste pays au monde, comme la vétusté des hôpitaux, le manque d'écoles ou l'état des routes.
Selon le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, Poutine s'est préparé mercredi «jusque tard dans la nuit» en épluchant les questions des citoyens, ainsi que toute la journée de jeudi. Selon Peskov, plus de deux millions de questions ont été posées au président, triées avec l'aide de l'intelligence artificielle. Les questions sociales «occupent la première place», a-t-il affirmé au journal Izvestia.
Ce programme était autrefois divisé en deux parties: la grande conférence de presse annuelle avec la participation de médias occidentaux et la «Ligne directe» de questions-réponses avec les citoyens. Depuis 2023, les deux émissions ont été fusionnées. Le face-à-face de Vladimir Poutine avec la presse porte généralement sur la politique et les grands dossiers internationaux. La session de questions-réponses avec la population offre, elle, à Vladimir Poutine l'occasion de promettre de régler des problèmes de particuliers, de réprimander des responsables régionaux et parfois, de faire des confidences sur sa vie privée.
Ces deux évènements, organisés quasi chaque année depuis 2001, sont les deux grand-messes télévisées annuelles du président russe. En 2022, elles n'avaient pas eu lieu, alors que l'armée russe venait d'essuyer des revers importants en Ukraine.