Le monde change, mais pas les Simpson: les pères de la série animée américaine restent, 36 ans après sa création, «fidèles à leurs personnages», devenus des «êtres familiers» pour des millions de spectateurs. Pour le reste, ils «font ce qu'ils veulent».
Invités au festival international du film d'animation d'Annecy, Matt Groening, créateur de la série, David Silverman, producteur consultant et réalisateur historique, et Matt Selman, auteur-producteur, l'affirment lors d'un entretien avec l'AFP : les Simpson, famille américaine moyenne, «on s'y identifie toujours autant».
Série traduite en 26 langues
De la fameuse exclamation «D'Oh!» d'Homer Simpson, ce «mauvais père» qui «craint», à la chevelure bleue de sa femme, Marge, la série, qui fêtera son 800e épisode début 2026, a su devenir intergénérationnelle, notent ses créateurs d'une seule voix.
«Un père, qui était fan quand il était enfant, peut maintenant regarder avec ses enfants» les épisodes parfois déjantés, dont le premier fut diffusé aux Etats-Unis en 1989, explique Matt Selman. Au cœur de cette série haute en couleur, traduite depuis en 26 langues différentes dans une centaine de pays, des histoires loufoques, nourries d'une «combinaison» d'anecdotes personnelles des scénaristes aux absurdités du monde.
Une famille «iconique»
La famille «iconique» d'Homer, ouvrier incompétent dans une centrale nucléaire où il risque «de tuer tout le monde», et Marge, femme au foyer à la voix rauque, n'a jamais été «moderne», explique Matt Groening. En 1989, «ils étaient déjà intemporels», avance le créateur.
Leurs enfants – Bart, 10 ans, sale gosse turbulent, Lisa, fille modèle surdouée et Maggie, bébé à la tétine mais aux accès de violence insoupçonnés – ne vieillissent pas, comme tous les habitants de Springfield, ville américaine moyenne fictive où ils vivent.
Une liberté narrative qui permet aux scénaristes de garder les enfants jeunes et de «faire ce qu'ils veulent» dans chaque épisode pensé comme un petit «film». De quoi rendre ces personnages jaunes éternels malgré des audiences en baisse: ils étaient 13,4 millions de téléspectateurs pour la première saison en 1990, contre 1,99 million pour la saison 35, diffusée en 2023-2024.
Un deuxième film?
Sur grand écran, avec l'adaptation de la série au cinéma en 2007, ils explosent le box office: «Les Simpson, le film» rencontre un succès mondial avec 536,4 millions de dollars de recettes au total et attire plus de 3,4 millions de Français au cinéma.
«On est encore en train de s'en remettre», plaisante Matt Groening, balayant pour l'instant l'idée d'un deuxième film: «La triste vérité, c'est qu'on n'a pas le temps de faire à la fois la série et le film.»
Etre fidèles aux personnages
Le scénario de 2007, une catastrophe environnementale causée par Homer qui conduit au confinement sous un dôme de Springfield, reflète un thème récurrent et puits infini d'inspiration pour les auteurs: «l'environnement», car «il n'est pas prêt d'être assaini», explique le créateur de la série.
«On ne fait pas d'humour politique, parce que c'est très limité et ça se périme très vite», estime-t-il, la production d'une saison nécessitant entre six et neuf mois minimum, bien loin de la réactivité immédiate des réseaux sociaux.
«Nous devons simplement être fidèles à nos personnages, à leur esprit, à leurs relations. Et lorsqu'ils font face aux tristesses du monde, les gens se sentent brièvement liés à eux», résume Matt Selman.
Les Simpson «ne changent pas»
Les événements décrits dans la série, diffusée sur la chaîne américaine FoxTV et la plateforme de son racheteur, Disney Plus, deviennent parfois réels, comme l'élection de Donald Trump évoquée dès 2000, alimentant le mythe d'une série prophétique. Une idée que les créateurs réfutent, parlant plutôt d'allusions à des événements déjà plausibles.
Bourrée de références culturelles, la série continue de parodier le monde, avec dernièrement l'intelligence artificielle, à qui les auteurs ont demandé d'imaginer la «fin parfaite des Simpson».
Résultat? Une succession de clichés et de fins vues ailleurs, «très peu originales et stupides», constate Matt Selman. «C'était notre tentative de repousser l'IA et la fin de la série», résume le directeur. «Non», les Simpson «ne changent pas» et ne sont pas prêts de quitter nos écrans.