Merci, shérif Trump? (1/3)
Ces 5 guerres contre lesquelles l'OTAN nous protège (encore)

La Suisse ne fait pas partie des 32 pays membres de l'OTAN, l'Alliance atlantique qui réunit ce mardi 24 et mercredi 25 juin son sommet annuel à La Haye. Mais elle profite du parapluie militaire de cette coalition mise à l'épreuve par Donald Trump.
Publié: 24.06.2025 à 18:38 heures
|
Dernière mise à jour: 24.06.2025 à 18:40 heures
Partager
Écouter
1/5
Le sommet annuel de l'OTAN s'est ouvert ce mardi 24 juin à La Haye, aux Pays-Bas.
Photo: AFP
Blick_Richard_Werly.png
Richard WerlyJournaliste Blick

Un sommet entre alliés, pour célébrer ensemble la puissance incomparable de la première coalition militaire mondiale? En théorie, c’est ce que devrait être le sommet de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord) qui s’ouvre ce mardi 24 juin à La Haye en présence des 32 dirigeants des pays membres.

Mais la réalité est bien différente. D’abord parce que Donald Trump, occupé par la guerre en Iran, ne sera qu’un passage éclair dans la capitale néerlandaise. Ensuite parce que les relations entre les Etats-Unis et leurs alliés européens n’ont jamais été aussi compliquées, voire mauvaises. Au point que certains doutent aujourd’hui qu’en cas d’attaque contre un pays de l’OTAN, Washington riposterait aux côtés de tous les pays membres, comme le veut l’article 5 d’assistance mutuelle de la charte de l’Alliance créé en 1949 pour faire face à la menace de l’ex-URSS.

Merci à l’Amérique

Faut-il donc encore dire merci à l’Amérique, protectrice du Vieux Continent et de tous les pays européens, y compris la Suisse neutre? Ou faut-il au contraire se sentir floués par les demandes répétées (et désormais acceptées) de l’administration Trump de voir les alliés dépenser au moins 5% de leur produit intérieur brut pour leur défense? La vérité est qu’il n’existe pas, aujourd’hui, de solution de rechange à l’OTAN pour assurer la sécurité de l’Europe. Sans l’Alliance, ces cinq guerres pourraient nous être fatales, y compris en Suisse.

Contenu tiers
Pour afficher les contenus de prestataires tiers (Twitter, Instagram), vous devez autoriser tous les cookies et le partage de données avec ces prestataires externes.

L’OTAN, bouclier antiaérien

Un seul exemple résume tout: un petit pays comme la Belgique, qui abrite à Bruxelles le siège de l’OTAN et celui de la Commission européenne, mais aussi le QG militaire de l’Alliance à Mons (près de la frontière française), ne dispose pas de défense antiaérienne. Si une puissance ennemie venait à déclencher des tirs de missiles ou des bombardements contre ses villes, les dégâts seraient alors terribles. Quid de la Suisse? La situation est presque identique. La Confédération a confirmé, en 2023, son achat d’un système de défense sol-air de longue portée Patriot, dans le cadre de son programme Air 2030. Ses batteries antimissiles fabriquées par l’américain Raytheon viendront suppléer à la défense sol-air de courte portée de l’armée suisse: canons de DCA de 35 mm, missiles Rapier et Stinger. Date de livraison des Patriot? A partir de 2026. D’ici là, merci l’OTAN!

L’OTAN, bouclier satellitaire

La guerre en Ukraine le démontre chaque jour: sans renseignements très précis sur les positions et les mouvements de l’ennemi, une armée moderne est aveugle. C’est pour cela que les Européens redoutent tellement l’interruption de l’aide américaine en matière de surveillance par satellite de la Russie et du front. Sans l’OTAN, qu’adviendrait-il? «Toutes les armées du Vieux Continent ou presque se trouveraient subitement devant un tableau noir», note un diplomate à Bruxelles. Les Européens ont activé, pour aider l’Ukraine, leur réseau Govsatcom (un système gouvernemental de communications sécurisées par satellite), auquel la Suisse est associée. Ils comptent aussi sur l’imagerie du réseau Eutelsat. Reste une évidence: la galaxie satellitaire américaine, mise à la disposition de l’OTAN, est aujourd’hui irremplaçable.

L’OTAN, bouclier nucléaire

32 pays membres de l’OTAN depuis l’intégration, en 2023 et 2024, de la Suède et de la Finlande, deux ex-pays neutres. 3,3 millions de soldats mobilisables si l’on ajoute les forces américaines à celles des alliés. Mais surtout, trois pays dotés de la dissuasion nucléaire, dont deux sur le sol européen: la France et le Royaume-Uni. Impossible de faire l’impasse sur cette réalité stratégique. Même si la France ne participe toujours pas au groupe des plans nucléaires de l’Alliance, le débat actuel (avec l’Allemagne et la Pologne en particulier) sur la reconfiguration de la dissuasion tricolore, qui pourrait être également au service de l’Europe, montre l’importance de ce bouclier atomique.

L’OTAN, bouclier industriel

C’est le sujet le plus délicat car Donald Trump entend bien faire profiter à plein son industrie de défense des futures commandes européennes. En clair: le président des Etats-Unis veut que les alliés augmentent leurs dépenses à 5% du PIB (3,5% en achats militaires effectifs, 1,5% en dépenses d’infrastructures), mais qu’ils achètent en priorité sur étagère du matériel «Made in USA». Ce que la Suisse a fait avec les Patriot et les avions F-35. On peut voir néanmoins les choses sous un autre angle: l’OTAN, parce qu’elle offre des standards communs entre alliés, est aussi un débouché naturel pour une industrie européenne de la défense relancée. C’est l’objectif de la Commission européenne qui a dévoilé en mars 2025 un plan d’investissement dans ce secteur à 800 milliards d’euros. Sans l’Alliance, les économies d’échelle seraient beaucoup plus compliquées. Le danger est, bien sûr, que les Etats-Unis siphonnent la majorité des commandes grâce à l’OTAN. Le Portugal vient de créer un précédent en abandonnant, lundi 23 juin, sa commande de F-35 pour des Rafale Français.

L’OTAN, bouclier cyber

L’Alliance atlantique dispose à Tallinn (Estonie) d’un centre spécialisé dans la cyberguerre. Il s’agit plus d’un laboratoire que d’un commandement pour la guerre numérique. Mais compte tenu du nombre d’infrastructures critiques à protéger en temps de guerre, le fait de bénéficier de la protection de l'OTAN demeure un véritable atout. Seule l’Alliance peut, par exemple, disposer d’une flotte suffisante pour surveiller les câbles sous-marins si importants, y compris pour la Suisse. Sans l’OTAN, les attaques hybrides, déjà menées par la Russie en Europe, seraient sans doute encore plus difficiles à déjouer. L’armée suisse dispose d’un commandement cyber spécialisé dans le cyberespace et l’espace électromagnétique (CYBEEM). Celui-ci se coordonne régulièrement avec les exercices cyber de l’Alliance.

Prochain épisode: La course aux armes du futur

Partager
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la