La soirée idéale de la parfaite fleur bleue? Un film romantique (qui finit bien), une assiette de pâtes en forme de cœur, un crescendo de violons et un paquet de mouchoirs déjà presque vide (même si le film finit bien). Il s’agit évidemment d’une brochette de clichés associée aux âmes romantiques, qui n'ont rien demandé. Or, lorsqu’on s’éloigne des stéréotypes, force est de constater que certaines personnes apprécient davantage le romantisme «guimauve» que d’autres.
Il suffit de tendre l’oreille, à l'approche du 14 février, pour en avoir le cœur net: les uns frétillent d’impatience à l’idée de recevoir des roses, les autres ronchonnent dans leur coin, agacés ou moroses à la vue du moindre chocolat pailleté. Cupidon a-t-il gâté les premiers, avant d’écraser les orteils des seconds? Peut-être, mais il ne s’agit pas de l’unique facteur. En réalité, notre goût de ce qui s’apparente au cheesy est influencé par de nombreux critères différents, aussi complexes que personnels.
Une experte nous en a détaillé quatre, afin de vous aider à comprendre votre amour profond, votre indifférence ou votre aversion viscérale des comédies romantiques et autres effusions de bons sentiments. Si vous êtes ami avec Cupidon ou Aphrodite, ne leur montrez pas cet article.
Votre personnalité
Comme n’importe quelle préférence, notre opinion du «guimauve» est hautement individuelle: «Alors que certaines personnes sont introverties et timides, d’autres sont extraverties et constamment en quête de nouveauté, explique la psychologue Carolyn Jost. Les individus appartenant à la première catégorie auront probablement moins envie d’exprimer leurs émotions et se sentiront mal à l’aise lorsque d’autres exprimeront les leurs.» Les personnalités plus extraverties auront, à l’inverse, tendance à apprécier les grandes émotions ou à participer à toutes les fêtes, dont Noël, Halloween ou la Saint-Valentin.
«Par ailleurs, les personnalités plus créatives auront peut-être une plus grande attirance envers les contenus 'guimauves' que les personnalités dites plus rationnelles et logiques», précise l’experte. Un article paru fin 2023 sur la plateforme d’édition australienne «The Expert Editor» listait justement les caractéristiques typiques des personnes qui détestent les comédies romantiques: parmi elles, on trouve une grande indépendance, une certaine introversion, un penchant pour le réalisme et la stimulation intellectuelle. Rappelons toutefois que chaque personne est unique et que ce type de liste ne décrit évidemment qu’une vague tendance.
Votre éducation et votre culture
Un sondage réalisé en 2023 par YouGov révélait que 7 Américains sur 10 aiment ou adorent les comédies romantiques, tandis que seuls 5% d’entre eux les détestent. Du côté du Royaume-Uni, en revanche, une étude citée en 2023 par «The Independent» soulignait que 49% des Britanniques accusent ce type de production de créer des attentes irréalistes, en termes de relations amoureuses. Ainsi, notre penchant pour le «guimauve» dépend-il aussi de notre culture et du contexte?
En partie, oui, affirme Carolyn Jost, qui constate un engouement bien plus important chez les Américains, lorsqu’il s’agit de la Saint-Valentin: «Ce type de fête est célébré de manière beaucoup moins exubérante en Suisse qu’aux États-Unis, par exemple, où cet événement prend une place énorme. Par conséquent, si nous avons grandi dans un milieu qui ne prêtait pas attention à ce genre de chose, on peut se sentir moins à l’aise avec les grandes démonstrations romantiques.»
De même, l’experte souligne que les personnes ayant grandi dans une famille peu encline à déverser des déclarations d’amour, ou dont les parents dédaignaient l’idée d’offrir des fleurs, par exemple, ont pu intégrer l’idée que les émotions «guimauves» ne devraient pas être exprimées trop souvent.
Vos expériences passées
La Saint-Valentin vous évoque-t-elle des lumières tamisées, des rires sonores, des soirées au restaurant et des cartes de vœux? Ou au contraire, vous rappelle-t-elle une rupture déchirante vécue en plein hiver, à l'aube d'un 14 février particulièrement amer? Ces souvenirs jouent un rôle crucial dans votre idée du «guimauve», dans la mesure où celle-ci peut être fortement teintée d’expériences négatives ou positives:
«Tout dépend des associations qu’on a bâties au cours de notre vie, confirme Carolyn Jost. Typiquement, les personnes ayant grandi avec des proches qui critiquaient tout ce qui se rapporte au ‘guimauve’, ou celles qui ont vécu des événements difficiles dans le domaine amoureux, peuvent ressentir, de manière temporaire ou plus définitive, une aversion complète pour les contenus romantiques ou la Saint-Valentin en elle-même.»
Vos biais cognitifs
Pour terminer, il reste une question intéressante à se poser: qu’évoquent chez vous les termes «guimauve» ou cheesy? Vous mettent-ils automatiquement de bonne humeur ou leur conférez-vous un aspect risible ou médiocre? En effet, ils s'associent à de nombreux discours biaisés et une large flopée de clichés: «Les contenus considérés comme étant ‘guimauves’ sont stigmatisés, dans la mesure où on les associe généralement aux femmes, censées aimer tout ce qui est romantique, mignon et rose bonbon», remarque Carolyn Jost.
De ce fait, certains hommes cis auront automatiquement tendance à rejeter tout ce qui est socialement connoté comme n’étant «pas masculin» et contraires à ce qu’ils sont censés représenter: «Cela ne leur laisse pas beaucoup d’espace pour vivre leurs émotions, puisqu’ils se sentent obligés de s’adapter aux codes du machisme, déplore notre experte. Rappelons que, biologiquement, nous sommes toutes et tous capables de ressentir la même palette d’émotions.»
Les contenus «guimauves» sont-ils bénéfiques?
Si vous adorez les films ou les romans dégoulinants de marshmallow fondu, votre entourage vous a probablement rétorqué, au moins une fois, que vous barbotez en pleine illusion. Or, il s’avère qu’une dose modérée de plaisirs cheesy ne peut pas nous faire de mal, lorsqu’on en tire des émotions positives: «Le fait de regarder une comédie romantique peut constituer une échappatoire, mais cela n’est pas forcément mauvais, rassure notre intervenante. En effet, ces contenus suscitent de la dopamine et de l’ocytocine, l’hormone de l’attachement associée au bonheur et aux sentiments amoureux.»
En d’autres termes, tant qu’on ne s’attend pas à ce que la réalité se calque sur notre film ou livre préféré, il n’y a aucun mal à se réconforter avec un Happy End dramatiquement heureux, sous une pluie battante: «Par contre, si l'on exige que notre partenaire agisse comme dans un film, nos attentes peuvent être complètement désynchronisées», prévient Carolyn Jost. Hélas, même les plus grandes fleurs bleues (comme moi) sont obligées d’admettre que les tapis de pétales ne mènent pas toujours au paradis (mais parfois, si!)