Mike Horn se réjouissait sans doute de pouvoir redorer son blason. Ce 28 avril, l’aventurier, installé en terres vaudoises depuis 1990, allait être décoré dans son pays d’origine. Ce vendredi, il allait recevoir un «National Order» — Ordre National, en français, l’équivalent de la Légion d’honneur en France — des mains du président sud-africain, Cyril Ramaphosa, dans la capitale.
Mais les choses ne se passeront pas comme prévu, communique Pretoria, ce dimanche. «À la suite d’objections de la part de différents secteurs de la société civile et sur recommandation du National Orders Advisory Council, le président Ramaphosa a accepté le retrait de trois nominés qui devaient recevoir un National Order», annonce le texte. Parmi les trois figure Mike Horn, qui ne sera donc finalement pas honoré.
Aucune explication supplémentaire n’est donnée, s’étonne le «Sunday Times», média sérieux basé à Johannesburg. Mais le National Orders Advisory Council promet d’adopter des mesures pour renforcer le processus de sélection des candidates et candidats à la plus haute distinction d’Afrique du Sud. Objectif: «Maintenir l’intégrité des National Orders».
Avec le sanglant bataillon 101
C’est le dernier rebondissement d’une immense polémique. Souvenez-vous: le 19 janvier, la diffusion d’une enquête documentée de «Temps Présent» faisait l’effet d’une bombe en Suisse romande. L’émission de la RTS révélait des pans sanglants — inconnus jusqu’ici — du passé militaire trouble de Mike Horn.
Aujourd’hui quinquagénaire, le très médiatique citoyen de Château-d’Œx s’était engagé volontairement — dans le cadre de son service militaire obligatoire — dans le bataillon 101 de l’armée sud-africaine, en plein apartheid, alors qu’il n’avait pas 20 ans, en 1986. Le bataillon 101? Une unité d’élite de contre-insurrection «spécialisée dans la traque et l’élimination de l’ennemi», notamment active en Namibie actuelle, pour le compte du régime raciste. Face caméra, les protagonistes — dont d’anciens frères d’armes — parlent de chasse à l’homme, de rouler sur les ennemis avec des blindés légers, de tueries politiques et de crimes de guerre.
Vive émotion en Suisse romande
L’affaire avait provoqué un tsunami de réactions et avait même occupé le Grand Conseil vaudois, à la suite d’une interpellation de la socialiste Jessica Jaccoud, qui questionnait le rôle de Mike Horn au sein de Vaud Promotion, organe financé par l’État. Mike Horn avait également reçu beaucoup de soutien, notamment dans son fief du Pays d’Enhaut, comme l’avait constaté Blick sur place. Toujours sur nos plateformes, le sociologue du sport Fabien Ohl ne s’en était pas étonné. «Le fait de s’identifier à une personne peut inciter à une tolérance excessive», avait-il avancé lors d’une interview.
Dans «Temps Présent», il s'était mal défendu devant les caméras, avant de faire savoir qu'il regrettait «d'avoir participé à ces opérations», bien qu'il assumait «parfaitement» tout ce qu'il avait fait dans sa vie. Après deux semaines de silence et face au tollé, Mike Horn avait fini par sortir des fourrés dans «L’illustré» et sur les réseaux sociaux, où il compte plus de 2 millions de followers au total. Le célèbre aventurier avait notamment souligné ne jamais avoir caché son passé militaire, n’avoir jamais soutenu l’apartheid ou fait partie d’opérations politiques, comme l’assassinat de l’activiste namibien Immanuel Shifidi, le 30 novembre 1986, dont le bataillon 101 est responsable.