Depuis le Pakistan
Des maîtres chanteurs font vivre un enfer aux salons de tatouage suisses

Un maître chanteur résidant au Pakistan tente de soutirer de l'argent à des salons de tatouage suisses. Il publie des commentaires négatifs sur Google et demande de l'argent pour les effacer. Le directeur d'un studio témoigne.
Publié: 09:27 heures
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Mauvaise surprise pour plusieurs salons de tatouage suisses: ils sont la cible d'un maître chanteur.
Photo: Shutterstock
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Marco Lüssi

Près de 20% des restaurateurs ont déjà été la cible de chantage de la part de leurs clients. Un rabais, une consommation gratuite, ou alors des évaluations négatives sur Internet. Cette pratique se produit également chez les dentistes

Mais d'autres domaines sont aussi touchés. Depuis deux semaines, des salons de tatouage basés en Suisse ont dû faire face à des maîtres chanteurs professionnels étrangers. Des histoires à faire froid dans le dos ont commencé à paraître dans les avis clients Google.

«Au début, ce tatoueur était très sympathique. Nous avons convenu de plusieurs rendez-vous, mais il a annulé deux fois: la première pour cause de maladie, la deuxième en raison de ses vacances. Puis il ne m'a plus jamais répondu», pouvait-on lire dans un commentaire laissé sous la page Google d'un studio zurichois. 

Pour un autre, on peut lire la critique suivante. «Les instructions concernant le suivi n'étaient pas claires, et lorsque j'ai demandé de l'aide, personne n'a répondu pendant plusieurs jours. Au final, le tatouage n'a pas bien cicatrisé.» De quoi inciter les clients à changer d'avis.

Un «marché» proposé

Un salon de tatouage lucernois aurait également été victime de diffamation. «Le tatoueur n'a pas respecté ce que je lui avais demandé et a apporté des petites modifications au dessin, le tout sans me demander mon avis. Au final, le tatouage ne correspondait plus du tout au modèle que je lui avais montré. Son comportement était très peu professionnel.»

Tous ces avis Google, accompagnés d'une note d'une étoile – la plus mauvaise – ont un point commun: ils ont été créés par le même compte et ont été inventés de toutes pièces. Michi Kohler, directeur d'un salon lucernois touché par cette affaire, raconte qu'il s'est d'abord demandé qui était la personne qui avait pu formuler ces critiques. Mais ses interrogations ne sont pas restées sans réponse pendant longtemps. 

Il a été rapidement contacté sur WhatsApp via un numéro de téléphone provenant du Pakistan. L'expéditeur lui aurait proposé un «marché» comme condition pour supprimer ses commentaires négatifs. Il s'engageait même à rédiger des avis positifs. Michi Kohler n'est jamais entré en matière.

Avec l'aide d'une intelligence artificielle?

Au lieu de cela, le directeur a signalé les commentaires en question à Google, qui les a supprimés au bout de trois jours environ. Il s'étonne de l'audace du maître chanteur. Et il ajoute: «Malheureusement, ces commentaires négatifs étaient redoutablement bien écrits.» Selon lui, une intelligence artificielle avait probablement été utilisée pour les rédiger.

Blick a appris que d'autres studios de tatouage ont également été contactés par le même numéro de téléphone pakistanais. Le malfrat a également exigé de l'argent aux autres tatoueurs concernés pour supprimer les avis. On ignore si certains studios ont cédé au chantage.

«Ne pas répondre du tout»

L'Office fédéral de la cybersécurité (OFCS) connaît bien cette arnaque. «Nous conseillons aux personnes concernées de ne pas répondre lorsqu'elles reçoivent une demande de paiement», explique Manuela Sonderegger, porte-parole de l'OFCS. Il convient de signaler les faux commentaires à la plateforme d'évaluation et de porter plainte auprès de la police. C'est aussi ce qu'indique la police cantonale de Zurich sur le site cybercrimepolice.ch. Dans de tels cas, il est également conseillé d'indiquer sous l'avis diffamant, quand cela est possible, qu'il s'agit d'un faux commentaire.

Contacté, Google ne s'exprime pas sur ces cas en question. Mais il déclare: «Nous vérifions minutieusement les contributions 24 heures sur 24 afin de détecter les évaluations frauduleuses.» Pour y parvenir, le géant américain mise tant sur l'intervention humaine que technologique. «Lorsque nous constatons que des personnes produisent des faux commentaires, nous prenons immédiatement des mesures. Cela va du retrait de contenus à la suppression définitive du compte.» 

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