Un médecin de famille a été condamné par le Tribunal cantonal valaisan (TC) pour lésions corporelles graves par négligence. Il n’a pas détecté une première rupture d’anévrisme qui a débouché sur une seconde, plus grave. L'affaire ira au Tribunal fédéral.
Condamné à 45 jours-amendes avec sursis par le Tribunal de district de Sierre en février 2024, l'ex-praticien a vu son appel être rejeté par le Tribunal cantonal, la valeur du jour-amende passant de 55 à 230 francs. Le septuagénaire devra également s'acquitter d' une amende de 1500 francs et devra verser 185'000 francs pour tort moral envers la victime et sa famille.
Le 29 mai 2017, une trentenaire, victime de douleurs aux cervicales et à la tête, soudainement devenues aiguës, se présente chez un médecin de garde à Sion. Le praticien lui prescrit alors des antidouleurs. Ils s'avéreront sans effet.
Mauvais diagnostic
Trois jours plus tard, la jeune maman d'un bébé de 2 mois appelle le cabinet de son médecin de famille, toujours diminuée dans sa santé. Celui-ci choisit de l'accueillir en urgence l'après-midi. Pour le médecin, les douleurs sont liées à un choc, la tête de la femme ayant heurté une porte, quelques jours plus tôt. Pas de quoi s'alarmer. La réalité est tout autre: la patiente a fait une première rupture d'anévrisme.
Durant la consultation, le praticien n'insiste pas pour faire une IRM avec un produit de contraste, sa patiente ayant une phobie de ce genre de pratique. Il choisit cependant de la soumettre à un scanner pour faire la lumière sur son état de santé. Chargé de la mission, un spécialiste en radiologie ne décèle alors rien de préoccupant. Le spécialiste a été acquitté par le Tribunal cantonal.
Manquement au devoir de diligence
Le 5 juin, la femme est toutefois acheminée en urgence par hélicoptère aux HUG, à Genève. Verdict: une seconde rupture d'anévrisme, beaucoup plus importante que la première, doublée d'une hémorragie cérébrale massive et de graves séquelles.
Pour le Tribunal cantonal, «le médecin traitant a manqué à son devoir de diligence en ne recherchant pas, par le biais de l'anamnèse, puis d'examens appropriés, si sa patiente avait été victime d'une hémorragie cérébrale consécutive à une rupture d'anévrisme. Les conséquences de ce manquement ont été dramatiques puisque sa patiente a été victime d'une seconde rupture d'anévrisme qui a entraîné une hémorragie et des séquelles importantes et irréversibles.»
«A ce jour, elle souffre toujours de graves déficits moteurs et cérébraux. Compte tenu de sa formation et de sa longue expérience, le prévenu devait envisager la possibilité d'une rupture d'anévrisme», ajoute le TC.
Un troisième procès en vue
Pour l'avocate de la partie plaignante, «la famille est soulagée que la condamnation soit confirmée et espère qu'il acceptera désormais sa responsabilité.»
Egalement contacté par Keystone-ATS, l'avocat du praticien a toutefois indiqué que son mandant souhaitait «porter l'affaire devant le Tribunal fédéral.» L'arrêt du TC «procède d'une appréciation arbitraire des faits et d'une lecture biaisée de l'expertise judiciaire», a réagi le médecin.