L'Eglise évangélique réformée de Suisse (EERS) veut faire la lumière sur les abus sexuels en son sein. Son parlement a chargé à l'unanimité lundi le Conseil de l'EERS de faire réaliser une enquête scientifique sur cette question.
Le synode a également approuvé un crédit pouvant aller jusqu'à 250'000 francs pour ce projet, a indiqué le porte-parole de l'EERS, Stephan Jütte, à Keystone-ATS. Il l'a accepté par 61 voix contre une et deux abstentions.
L'étude devrait être présentée à la fin 2027. Elle doit traiter de manière indépendante les abus sexuels et spirituels survenus dans le contexte des Eglises réformées ainsi que des conditions structurelles propres à ce contexte. Sur son site internet, l'EERS définit l'abus spirituel comme le fait d'influencer une personne afin de la rendre dépendante tant psychologiquement que spirituellement. «Cet abus d'autorité est un abus de l'autorité religieuse», écrit-elle.
Après les catholiques
Avec cette décision, l'EERS entend à son tour faire la lumière sur les abus qui gangrènent plusieurs institutions religieuses. En septembre 2023, une étude de l'Université de Zurich avait montré que des prêtres et des religieux catholiques avaient commis plus d'un millier d'abus sexuels en Suisse depuis le milieu du XXe siècle.
La publication de ce document avait provoqué une vague de départs au sein de l'Eglise catholique, mais aussi chez les réformés. Depuis, le nombre de personnes quittant l'Eglise a fortement diminué, selon les chiffres publiés en septembre dernier par l'Institut suisse de sociologie pastorale (SPI).
Outre-Rhin, une étude avait révélé que des abus sexuels avaient également eu lieu dans l'Eglise réformée allemande. La présidente de l'EERS Rita Famos avait alors affirmé en avril 2024 avoir entendu parler de nombreux cas également au sein de l'Eglise réformée de Suisse. Selon elle, l'étude allemande a ouvert les yeux à l'EERS.
Travail interdisciplinaire
En juin 2024, le synode avait toutefois refusé de réaliser une étude. Un groupe de travail devait d'abord étudier si une telle recherche était utile. Cet organe a estimé que c'était le cas.
L'appel d'offres qui sera lancé n'impose pas de méthode à l'étude et demande un travail interdisciplinaire. Un groupe d'accompagnement composé de représentants des victimes, d'experts et de délégués des Eglises devra suivre l'appel d'offres et l'attribution du mandat.
Recherches de la Confédération
Le crédit accordé pour cette étude est largement inférieur à l'enveloppe de 1,6 million de francs qui avait été envisagée l'an dernier. L'EERS estime que son étude apportera «un complément pertinent» au mandat de recherche lancé par la Confédération sur les abus sexuels dans différents espaces de socialisation, tels que les Eglises, les écoles, les familles et les organisations de loisirs.
Avec son étude, l'EERS veut se concentrer spécifiquement sur le cadre de l'Eglise réformée. Son examen porte aussi sur les personnes victimes adultes, les abus spirituels et des facteurs institutionnels comme des asymétries de pouvoir ou des mécanismes de dissimulation, écrit-elle.
En juin dernier, le synode avait par ailleurs adopté de nouvelles normes de protection contre les abus. Ces normes définissent des exigences minimales claires pour les concepts de protection, avait alors annoncé l'EERS.