Ses concurrents la décrivent comme «la bonne femme qui arrive toujours au bon moment», et même ses adversaires politiques ne veulent pas dire de mal d'elle. La directrice de la SSR Susanne Wille est la femme qui semble plaire à tout le monde.
En ce moment, elle n'a cependant pas un rôle facile: le ministre de la communication Albert Rösti a réduit la redevance radio-TV de 335 à 300 francs et l'initiative de réduction de moitié, lancée par l'Union démocratique du centre (UDC), sera probablement soumise au vote l'année prochaine. C'est sous ces sombres auspices que Susanne Wille a succédé à Gilles Marchand en novembre dernier.
Une légende en Suisse alémanique
Susanne Wille est une femme de la SSR jusqu'au bout des ongles. En tant qu'ancienne présentatrice de «10 vor 10», une émission d’information télévisée diffusée sur la chaîne SRF 1, elle est pour le grand public alémanique une figure emblématique des médias. Même sa propre histoire d'amour a commencé là. Son mari est Franz Fischlin, présentateur de longue date de la SRF. Dès 2016, elle a assumé ses premières tâches de management, avant de devenir chef du département culturel de la chaîne en 2020. En mai 2024, elle a finalement été élue directrice générale de la SSR.
Elle y adopte un tout autre ton que son prédécesseur. Alors que le prophète du déclin Gilles Marchand déplorait l'initiative de réduction de moitié comme une «attaque contre la Suisse», Susanne Wille tente une autre stratégie: lors de son premier jour de travail, elle a annoncé «la plus grande transformation de l'histoire de l'entreprise» – 270 millions de francs doivent être économisés d'ici 2029. Ce lundi, elle et le reste de la direction de la SSR ont annoncé les premiers points clés: il s'agit avant tout d'économiser dans l'appareil administratif.
Mardi les mauvaises nouvelles sont très vite arrivées: d'ici 2026, la SRF veut supprimer 66 postes à plein temps, la RTS jusqu'à 70. Avec la baisse de la redevance, la SSR est bel et bien sous une pression. Mais le message implicite est le suivant: «Regardez, nous faisons des économies. Aucune raison de dire oui à l'initiative de réduction de moitié!»
«Elle allie le professionnalisme journalistique à la chaleur humaine»
Susanne Wille doit économiser, moderniser et surtout convaincre la population qu'un service public financé par la redevance a encore une raison d'être. Dans cet exercice de corde raide, force est de constater qu'elle ne s'est jusqu'à présent guère attiré de critiques.
L'analyste politique Mark Balsiger suit son parcours depuis 25 ans. Il est directeur de l'alliance Pro Medienvielfalt, qui se bat notamment contre l'initiative de réduction de moitié. «Susanne Wille allie le professionnalisme journalistique à la chaleur humaine», dit-il. «C'est une combinaison rare qu'elle n'a pas perdue, même en tant que manager.»
«Le fait qu'il y ait si peu de critiques à l'égard de Wille ne m'étonne pas», déclare également Bakel Walden, ancien directeur du développement et des offres au sein de la SSR, considéré autrefois comme son concurrent pour le poste de directeur général. Une rumeur qu'il réfute. «Je travaille depuis près de 30 ans dans les médias et je n'ai pratiquement rencontré personne qui apporte sa combinaison de clarté, d'engagement et d'empathie.»
Selon les informations, de nombreux collaborateurs soutiennent également la ligne de conduite de Susanne Wille. Et elle n'a pas encore laissé de ruines derrière elle, contrairement à Nathalie Wappler, directrice de la SRF, qui a récemment mis fin à l'émission de société «Gesichter & Geschichten».
Les éloge de l'UDC
En réalité, Susanne Wille a réussi là où ses prédécesseurs ont échoué. L'entreprise de médias publique et les privés se rapprochent et font preuve d'unité: la SSR fait des concessions à plusieurs sociétés qui s'engagent en contrepartie à ne pas soutenir l'initiative de réduction de moitié de l'UDC. Seul TX Group ne souhaite pas y participer.
Même le conseiller national UDC Thomas Matter, à la tête de l'initiative, tire un bilan positif de sa nomination. «Je suis heureux qu'elle prenne à cœur le mandat d'économie. Bien sûr, il faut maintenant voir si elle met vraiment tout cela en œuvre.»
Mais une fois que la campagne électorale sera entrée dans sa phase la plus chaude, les opposants à la SSR ne devraient pas laisser Susanne Wille s'en tirer aussi facilement. Elle devra se préparer à une campagne de votation difficile. Et Thomas Matter met le doigt sur un sujet sensible: la mise en œuvre concrète des mesures d'économie. «Elles se font toujours en partie sur le dos du personnel, explique Mark Balsiger. Jusqu'à présent, elle l'a fait savoir clairement et avec beaucoup d'humanité». Mais d'après lui, le défi d'entraîner l'ensemble du personnel dans l'avenir numérique est de taille. Ce grand écart sera peut-être son plus grand challenge: ne pas mettre en péril la cohésion interne malgré les vents politiques contraires.