Chez Pilatus à Stans, on a poussé un grand soupir de soulagement: 0% de droits de douane américains sur les avions produits en Suisse. Pilatus bénéficie d’un traitement spécial. Les Etats-Unis et la Suisse renouent avec un accord de 1979, auquel plus de 30 pays s’étaient engagés pour un commerce sans droits de douane dans le secteur des avions civils. Cette règle avait été suspendue à cause des taxes imposées par Trump. Elle est désormais de nouveau appliquée. Cela est crucial pour le bien-être économique de Pilatus: 40% du chiffre d’affaires de l'entreprise nidwaldienne proviennent des Etats-Unis.
A Stans, on a rapidement réagi à la bonne nouvelle. Pilatus livre désormais à nouveau le PC-12 et le PC-24 vers les Etats-Unis, comme le rapporte la NZZ. Les deux avions sont principalement utilisés pour les voyages d’affaires. Le PC-12 est le jet d’affaires le plus vendu aux Etats-Unis. Mais cette réjouissance est trompeuse. Derrière les portes de l’usine de Stans, les inquiétudes grandissent, car Pilatus a déjà commencé à planifier son avenir en dehors de la Suisse.
Le syndicat Unia craint un énorme coup dur
Avant même que le président américain Donald Trump ne retourne à la Maison Blanche, le site de Pilatus avait pris une décision: les avions PC-12 destinés à l’Amérique du Nord et du Sud seront désormais assemblés à Bradenton, en Floride. La construction de l’usine est en cours. Pour de nombreux employés de Stans, cela constitue une attaque directe contre le tissu industriel local. Le responsable régional d’Unia, Giuseppe Reo, avertit: «Je crains qu’il n’y ait un énorme big bang dans la région», a-t-il déclaré à la NZZ. Les emplois de Pilatus ne seraient pas les seuls menacés, les sous-traitants le seraient également.
Parallèlement, Pilatus construit une nouvelle usine dans un parc technologique près de Séville. Sur un terrain de 97'000 mètres carrés, l’usine, dont le coût est estimé entre 75 et 100 millions de francs, devrait accueillir jusqu’à 500 employés. 75 collaborateurs travaillent déjà en Espagne. Certains ont été transférés depuis Stans et des employés espagnols ont été formés dans le canton de Nidwald. Dans cette nouvelle usine seront notamment fabriqués des éléments de structure et des câblages pour le PC-12 et le PC-24.
La baisse du moral des employés critiquée
En 2024, le CEO de Pilatus, Markus Bucher, avait déjà exprimé des doutes sur le site suisse: «Business follows tax», disait-il, signifiant que les entreprises vont là où l’environnement fiscal est le plus favorable. Il critiquait ainsi la taxe minimale de l’OCDE ainsi qu’un «moral au travail en baisse», comme il l’avait déclaré à l’époque à la NZZ. Selon lui, si toute une génération souhaite moins travailler, c'est un problème pour une entreprise opérant à l’échelle mondiale.
Pourtant, les affaires se portent bien à Stans. En 2024, Pilatus a porté son chiffre d’affaires à 1,6 milliard de francs, soit une hausse de 10%. Parallèlement, le constructeur d’avions a employé pour la première fois plus de 3'000 collaborateurs, avec 3'326 postes à plein temps l’année dernière, dont près de 90% en Suisse. Le CEO Markus Bucher garde néanmoins le regard tourné vers l’avenir. Dans un entretien avec la «Handelszeitung» fin 2024, il déclarait: «Il y a les entreprises qui prospèrent et cellesqui meurent.»