Espionnage, cyberattaques, activités d'influence: la sécurité de la Suisse n'a jamais été aussi menacée au cours des dernières décennies. Elle doit donc davantage assumer sa propre sécurité, a dit lundi le nouveau ministre de la défense Martin Pfister lors d'une conférence de presse depuis la place d'armes de Bure (JU).
La Suisse doit aussi pouvoir faire face à des menaces comme les missiles de longue et moyenne portée, largement utilisés dans les conflits en Ukraine et au Proche-Orient, constate le Zougois. Et le pays doit aussi se tenir prêt pour le cas d'une guerre traditionnelle.
Défense du pays
Pour ces raisons, l'armée doit être à nouveau principalement axée sur la défense du pays. Dans ce cadre, la structure de commandement actuelle sera examinée.
La hausse prévue du budget de l’armée à 1% du PIB d’ici 2032 permet de faire un premier pas dans ce sens. Cela concerne notamment de nouveaux systèmes d’artillerie, davantage de munitions ainsi que la modernisation de l’infrastructure informatique et de la défense aérienne, a rappelé Martin Pfister.
Coopération à poursuivre
En parallèle, il est essentiel d’intensifier notre coopération avec nos pays voisins, l’OTAN et l’Union européenne, dans le respect de notre neutralité, a souligné le ministre, se plaçant dans la lignée de sa prédécesseure Viola Amherd. L'autonomie en matière de politique de sécurité n'est «pas réaliste».
Et de citer la participation aux entrainements internationaux qui permettent aux troupes suisses de s'améliorer, comme l'exercice Trias du mois dernier en Autriche. En cas de conflit sur le sol européen, l'interopérabilité des forces armées est essentielle, par exemple dans l'espace aérien.
Enfin, l'accès aux technologies modernes de défense est essentiel pour la Suisse. Dans ce cadre, il n'est pas question de remettre en cause par exemple l'achat des avions de combat américains F-35, a justifié Martin Pfister.
Stratégie d'armement
A cause des restrictions légales sur l'exportation du matériel de guerre, la Suisse se retrouve toutefois de plus en plus écartée d'achats importants et des chaînes d'approvisionnement, constate Martin Pfister, ce qui conduit à des coûts plus élevés et des temps de livraison plus longs.
Le Conseil fédéral veut donc revoir sa stratégie d'armement. Il s'agit aussi de renforcer les capacités nationales dans ce domaine. Le Département de la défense (DDPS) présentera au gouvernement une stratégie de politique d'armement d'ici les prochains mois.
Le Secrétariat d'Etat à la politique de sécurité, créé par Viola Amherd, devra aussi élaborer une nouvelle stratégie de politique de sécurité. Une consultation est prévue cette année encore.
L'armée fait aussi face à un problème d'effectifs. Des premières mesures ont été prises ou vont passer devant le Parlement, sur la protection civile et le service civil par exemple, mais elles ne suffiront pas à long terme, a rappelé Martin Pfister. La question de l'extension aux femmes de l'obligation de servir dans la sécurité (armée ou civile) reviendra sur le tapis rapidement. Le Parlement s'active sur le sujet.
Nominations à venir
Le nouveau conseiller fédéral doit encore régler deux importantes nominations: trouver le ou la future responsable du Service de renseignement (SRC), ainsi qu'un nouveau chef pour l'armée.
Pour le SRC, Martin Pfister s'est montré confiant sur le fait de pouvoir présenter un nom au plus tard après les vacances d'été. L'actuel patron, Christian Dussey, doit rester en poste jusqu'au printemps 2026.
Pour l'armée, le travail de recherche est «plus facile», selon le chef du DDPS. Le nombre de candidats potentiels est limité. «Nous y travaillons intensivement, nous y arriverons d'ici la fin de l'année», moment du départ de l'actuel chef Thomas Süssli. Le nouveau patron devra avoir un poids très fort au sein de l'armée, a noté Martin Pfister.
Confiance à rétablir
La fin du mandat de Viola Amherd avait été émaillée de couacs et de critiques, en matière de communication, de personnel, de politique d'armement ou avec le scandale autour de Ruag. La confiance du public et du monde politique doit être améliorée, reconnaît le DDPS.
Martin Pfister a déjà renforcé la surveillance des projets au sein du département. Il a décidé de donner plus de poids au Secrétariat général dans un rôle de surveillance. La transformation en cours au sein du SRC, qui a fait couler beaucoup d'encre, devra aussi être menée à bien d'ici fin 2026, sans mettre en péril la mission du service.
Source: ATS