Les propriétaires de logements en Suisse ont découvert un nouveau sport national: s'opposer aux demandes de permis de construire. En effet, les oppositions face aux nouvelles constructions se feraient de plus en plus nombreuses en comparaison d'il y a quelques années. «Nous devons revenir à plus de pragmatisme», a exigé Jens Vollmar, CEO d'implenia, dans une interview accordée à Blick.
L'ancienne conseillère nationale du Parti libéral-radical Doris Fiala plaide également en ce sens. «Les oppositions doivent avoir un coût, sinon elles sont souvent utilisées pour retarder les projets de construction», déclare-t-elle à Blick.
Les nombreuses oppositions découragent de construire
Actuellement, le droit fédéral empêche que les frais de procédure soient mis à la charge des plaignants dans le cadre de projets de construction. Du moins dans un premier temps, lorsque les autorités statuent sur les oppositions.
Doris Fiala est convaincue que cela invite à un recours en matière de construction. Personne n'est prêt à accepter un peu plus d'ombre provenant du terrain voisin ou à perdre une partie de sa vue. «Nous assistons en Suisse à une véritable politique d'obstruction, qui empêche en partie la construction de logements à prix modérés», explique-t-elle.
Seulement en cas de procès, les frais de procédure sont mis à la charge de la partie perdante. Doris Fiala se demande pourquoi cela n'est pas le cas dès le début, avec la procédure administrative. En effet, les procédures d'autorisation prennent de plus en plus de temps. En ville de Zurich, il faut en moyenne près d'un an pour obtenir une autorisation, et même un an et demi à Genève, comme l'a montré une étude de la Banque cantonale de Zurich il y a deux ans.
En Suisse, plusieurs milliers de logements sont bloqués. La peur des recours a en outre un effet dissuasif sur les maîtres d'ouvrage. Selon la banque cantonale zurichoise, la construction de plusieurs milliers de logements n'est donc pas entreprise chaque année.
Freiner la motivation des recourants
Selon Doria Fiala, le droit d'opposition est important. «Mais celui qui fait opposition administrativement et perd devrait à l'avenir couvrir les frais de procédure.» Cela pourrait freiner la motivation de certains recourants. Les oppositions auraient aussi augmenté parce que certains voisins monnaient le versement d'un dédommagement par le maître d'ouvrage en contrepartie d'un retrait de recours. Mais la loi sur l'aménagement du territoire joue également un rôle: la densification accrue augmente le risque de conflit.
La demande de Doris Fiala n'est pas fortuite. Elle siège depuis peu au conseil d'administration de Port Real Estate. L'entreprise veut développer des biens immobiliers à des endroits attrayants, c'est-à-dire exploiter le potentiel de densification et profiter d'une utilisation plus importante. L'objectif est de créer davantage de logements pour la classe moyenne. Selon le site Internet de l'entreprise, les investisseurs peuvent espérer de solides plus-values et des rendements stables. «Avec le vieillissement de la population, l'immigration devient de plus en plus importante. C'est pourquoi nous devons densifier», explique-t-elle.
Un sujet à l'étude à Berne
Les oppositions gratuites font également l'objet d'un débat à Berne. Il y a deux ans, le Conseil des États a transmis un postulat au Conseil fédéral. Celui-ci doit examiner s'il est possible de créer une base légale permettant de modérer les coûts des oppositions. Les cantons auraient alors la possibilité d'adapter les lois, comme certains l'ont déjà fait auparavant.
Mais le Tribunal fédéral a annulé ces dispositions dans un arrêt. Il a décidé en 2017 que les frais de procédure ne pouvaient en principe pas être mis à la charge de l'opposant lors du réexamen par les autorités. Les recours manifestement abusifs constitueraient une exception.